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30 juillet 2009 4 30 /07 /juillet /2009 17:09
Abdelkrim El Khattabi
Abdelkrim El Khattabi
Naissance 1882
Ajdir, Maroc
Décès 6 février 1963 81 ans)
Le Caire, Égypte
Origine Maroc Maroc
Faits d’armes Guerre du Rif
Bataille d'Anoual

 

 


1919-1926 : la guerre du Rif



Entretien avec René Gallissot, historien (*)


Pendant six ans, à partir de 1919, se déroule dans l’étroite bande côtière du Maroc, la sanglante " guerre du Rif ". Elle opposera successivement, puis conjointement, l’armée espagnole et l’armée française à la guérilla conduite par Abd el-Krim, et fera des dizaines de milliers de victimes. Finalement, le leader marocain sera déporté à La Réunion, et la provisoire République du Rif sera dissoute. Pourquoi cet acharnement dans une guerre coûteuse, alors qu’Abd el-Krim ne menaçait guère ces empires coloniaux ?


René Gallissot:


La conquête du Maroc renvoie au partage de l’Afrique, à la rivalité franco-allemande au début du XXe siècle. L’exemple n’en est pas moins un des premiers compromis du système-monde impérialiste. À la conférence d’Algésiras en 1906 (la Russie et les États-Unis y participent), la zone Nord, le Rif donc, est dévolu à l’Espagne, et la plus grande part du pays à l’occupation française. Les deux zones seront sous protectorat conservant le régime du sultanat chérifien. Tanger reste zone franche internationale. La Banque d’État du Maroc est un consortium privé dont le principal actionnaire est la Banque de Paris et des Pays-Bas ; le commerce du Maroc n’est pas intégré à l’empire français, mais déjà au marché mondial car les douanes sont limitées au plus bas selon le régime dit de la " Porte ouverte ".


La guerre mondiale à peine finie, quels intérêts l’Espagne puis la France ont-elles de se lancer dans cette grande opération guerrière ?


René Gallissot:

 

La guerre de 1914 a fait des États-Unis le banquierdu monde, la puissance qui tire profit de sa dette. La France est saignée, mais dispose d’une immense armée faisant appel aux troupes coloniales. Lyautey destitué, c’est Pétain qui sera envoyé pour combattre Abd el-Krim ; il disposera de 32 divisions, plus de 350 000 hommes. L’Espagne qui est en mal d’empire perdu, est poussée par le parti africaniste à reprendre pied outre-mer ; or son armée a déjà été battue dans ses tentatives de conquérir le Rif, avant 1914 à partir de Ceuta et Melilla ; elle l’est à nouveau à Anoualen en 1921 ; elle reste en difficulté sous l’action de guérilla que mènent Abd el-Krim et ses groupes mobiles de montagnards armés ; Hô Chi Minh puis Mao le citeront en exemple. Devant les succès d’Abd el-Krim, la panique gagne Fès et les villes au pied du Rif. L’armée française va prêter main-forte ou plutôt main lourde à l’armée espagnole, en mobilisant les grands moyens, des bateaux de guerre et des avions et en procédant à des bombardements, avec usage de " bombes asphyxiantes ".


Qui est Abd el-Krim ? Quelles sont ses bases sociales et ses idées ? Veut-il unifier le Maroc sous sa souveraineté ?


René Gallissot:

 

République du Rif ne veut pas dire État marocain. C’est nous, et plus encore après 1945 et à travers l’ONU, qui avons l’État nation dans la tête avec un État, un peuple, un territoire ; c’est la forme ultime du nationalisme, et nous sommes incapables de comprendre le soulèvement des peuples, au pluriel, et les mouvements nationalitaires de résistance qui se manifestent encore dans l’entre-deux guerres.

Le nom de Mohammed ben Abd el-Krim el-Khattabi manifeste les deux faces du personnage social et politique : le leader moderne et le lettré de famille de fonction. Le père a été cadi (juge) au début du siècle, investi par le sultan dans sa région de la tribu berbérophone des Beni Ouriaghel ; il a été aussi écarté lors de changement de sultans. C’est dire que la famille a un patrimoine, une notabilité et des alliances. Les fils Abd el-Krim, capital familial aidant, sont allés à l’école espagnole ; un frère, Abdessalam, qui sera l’intendant de la défense du Rif, a poursuivi ses études en Espagne ; il est ingénieur. Celui qu’on appelle l’émir, pour dire commandant en chef, après des études secondaires, a été plusieurs années collaborateur d’un journal espagnol de Melilla, accompagnant et servant la pénétration coloniale. Les Rifains partent nombreux en émigration, laissant leur pays de vallées et de montagne à son organisation réglée par la parenté et le pouvoir des chefs de familles et de tribus. Ces Rifains ouverts sur le monde, étonnés par la guerre et les révolutions de Russie et de Turquie, s’enflamment pour des Républiques fondées sur un soulèvement populaire contre des envahisseurs et contre la domination des puissances et des groupes capitalistes étrangers.

Pour Abd el-Krim, la République doit être moderne, établir un État de fonction publique et de justice par la réforme d’un État musulman. Il n’en reste pas moins que son initiative est en rupture avec le sultanat du Maroc ; il ne revendique pas l’empire des chérifs qui prétendent descendre de la famille du Prophète. il fait exploser dans le Rif une République qui fait partie de ces soulèvements de minorités nationales, dans l’élan des mouvements Jeunes nationaux, après la révolution soviétique, en pays kurde au Moyen-Orient, et avec le soulèvement principalement druze en Syrie et au Liban. Précisément, c’est contre la guerre du Rif et de Syrie que l’Internationale communiste appelle à faire campagne.

En septembre 1924, les communistes français salueront dans un télégramme à Abd el-Krim " la victoire du peuple marocain sur les impérialistes espagnols ". Comment le jeune Parti communiste et l’Humanité ont-ils développé l’action contre la guerre ?


René Gallissot:

 

C’est Jacques Doriot pour les Jeunesses communistes et Marcel Sembat pour la Section française de l’Internationale communiste (SFIC) qu’est le jeune Parti communiste, qui signent ce télégramme de salut. En France, la guerre du Rif est présentée par les actualités cinématographiques. Après la boucherie de 1914-1918 et pour compenser la censure, la grande presse comme l’Illustration est pleine de photos et d’images, voire de reportages qui se tiennent entre la vision guerrière et l’exotisme. L’Humanité est alors un journal iconoclaste. Ainsi en juin 1925, ce bandeau à la une : " Caillaux de sang ", pour dénoncer l’impôt que le ministre des Finances fait voter pour faire " la guerre des banquiers et des industriels ", les prolétaires et les colonisés ont les mêmes exploiteurs. C’est à Pétain que l’on fait appel. Verdun n’est pas encore un mémorial patriotique, surtout pas pour les communistes qui reprennent, après la campagne contre l’occupation de la Ruhr, ce qu’on appelle " l’action anti " : antimilitariste, antinationaliste, anticolonialiste et en même temps anticléricale, contre ce cléricalisme qui bénit les drapeaux, honore les ganaches décorées et fait défiler les anciens combattants pour le compte de la droite nationaliste. Cette virulence qui continue l’anarcho-syndicalisme, dénonce la guerre du Rif que mène le gouvernement du Cartel des gauches, car la gauche est coloniale. La directive de l’Internationale communiste de Front unique avec les socialistes, reste une formule abstraite ; pour renaître, le mouvement ouvrier doit exorciser la faillite et la honte de 1914 qui ont fait l’Union sacrée.

Le jeune communisme est en dehors du nationalisme français, fut-il exprimé sous les voiles du patriotisme républicain de gauche. Les socialistes passés en majorité au PC au congrès de Tours, reviennent en 1923 à la vieille maison. Restés en petit nombre, quand ils ne sont pas des militants venant du syndicalisme révolutionnaire, les communistes sont des adhérents de vingt ans. Vingt ans en 1920, c’est l’âge du communisme. Ces jeunes démobilisés et en quête d’emploi, ces destinées prolétaires se retournent contre le vieux monde et les prêcheurs de guerre avec cet éclat subversif que jettent, eux aussi, les jeunes écrivains et artistes surréalistes.


Comment ce jeune parti mène-t-il son action ? Quel rôle joue vraiment Maurice Thorez ?


René Gallissot:

 

La geste d’histoire du PCF autour de Maurice Thorez sera écrite par la suite. C’est après 1931-1932 que Moscou fait fond sur Maurice Thorez. La campagne a été menée par les Jeunesses communistes. C’est Jacques Doriot qui conduit le plus souvent la bataille parlementaire qui tient effectivement de la bataille. C’est l’activisme des jeunes qui anime les manifestations sur les lieux publics, devant les casernes et quelquefois dedans, en criant les mots d’ordre de fraternisation qui s’adressent d’abord aux troupes coloniales. André Marty monte au créneau pour répéter le geste des mutins de la Mer noire : " Hissez le drapeau rouge, n’embarquez pas de cadavres en sursis pour la terre africaine " (juin 1925, encore dans l’Humanité). Quand Maurice Thorez est mis à la tête du Comité d’action contre la guerre du Rif, en avril 1925, c’est cependant pour montrer que le Parti existe et pas seulement les Jeunesses ; à ce titre il sera condamné à quatorze mois de prison.

Les Jeunesses s’appuient sur les syndicalistes révolutionnaires de la CGTU, qui s’emploient à entraîner les travailleurs " coloniaux " dans des congrès ouvriers nord-africains. Les mots d’ordre partent de la Maison des syndicats, rue de la Grange-aux-Belles ; ce volontarisme appelle à la grève générale. Au lendemain des manifestations du 12 octobre 1925, l’Humanité titre sur 900 000 grévistes ; les historiens rabattent sur 300 000 ou 400 000, ce qui est déjà extraordinaire face à une guerre coloniale. C’est la force et l’étroitesse de la minorité révolutionnaire.


Abd el-Krim est défait en mai 1926 et déporté ; il s’échappera en 1947 du bateau qui le ramène de La Réunion et s’établira au Caire. Comment interpréter la phrase qu’il prononce en 1963, peu avant sa mort : " Je suis venu trop tôt. " ?


René Gallissot:

 

Trop tôt pour que l’emporte une guerre de libération nationale. À partir de 1948, et derrière le Bureau du Maghreb et de la Palestine de la Ligue arabe, pour les pays arabes qui n’ont pas d’État, il s’emploie à préparer l’entrée en lutte de l’Armée de libération du Maghreb. C’est ce dispositif qui pousse en avant, au Maroc, les deux branches armées de libération, celle du Rif, à nouveau donc, et celle du Sahara, et l’ALN algérienne. Il est ainsi présent à la fin des temps de libération nationale, moins la Palestine.

Pour le PCF, qui s’est investi dans l’idéologie nationale à travers le Front populaire, la lutte antifasciste et la Résistance, ce passé d’" action anti " apparaît bien comme un moment de jeunesse. Quel contraste avec les motifs de la campagne contre la guerre d’Algérie, mesurés par le suivisme de la stratégie soviétique et les vains exercices de front avec la SFIO. En mars 1956, le vote des pouvoirs spéciaux, les appels derrière le Mouvement de la paix, laissent les manifestations de rappelés sans relais. L’endurcissement stalinien et tout autant le discours de glorification nationale font s’ouvrir la coupure avec la jeunesse et les nouveaux mouvements. L’Humanité a fort à faire pour remonter ces temps de l’âge de fer.


Entretien réalisé par: Lucien Degoy


(*) Professeur émérite d’histoire à l’université Paris-VIII, fondateur et ancien directeur de l’Institut Maghreb-Europe. Dernier ouvrage paru : le Maghreb de traverse (Éd. Bouchenne, 2000).


Source: http://www.humanite.fr 

Article paru
le 22 mai 2004

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25 janvier 2009 7 25 /01 /janvier /2009 16:57
ETYMOLOGIE

L'étymologie d'Amazigh a suscité bien des hypothèses contradictoires :

– Celle de Ch. de Foucauld, qui a longtemps prévalu, consistait à rattacher la forme touarègue (Ahaggar) Amahegh au verbe ahegh, "piller". Amaheq signifiant alors "pillard". L'explication cadrait bien avec la société touarègue où le pillage était l'un des piliers de l'économie et de la culture traditionnelles. Mais c'est là une étymologie "populaire", insoutenable du point de vue de la linguistique historique berbère. Amahegh n'étant qu'une variante locale de Amazigh, toute étymologie valant pour l'un doit nécessairement être acceptable pour l'autre. Or, il est impossible d'expliquer l'Amazigh du berbère nord à partir du verbe ahegh, "piller, prendre par violence". Ce verbe a pour correspondant en touareg méridional agh(u) [Alojaly 1980 : 64], et en berbère nord agh, "prendre, saisir..." (issu d'un ancien awgh, encore attesté dans certains parlers de Petite Kabylie ; Cf. chap. 17). Ceci démontre que /h/ de ahegh Ahaggar ne provient pas d'un ancien /z/ puisque, si tel était le cas, on devrait trouver : *azegh/a−zegh/ašegh en touareg méridional et *azegh en berbère nord. Il s'agit en fait d'une autre correspondance phonétique, plus rare, mais bien établie : Berbère ancien = /w/ > Berbère moderne = /w/, /h/ ou zéro (selon les dialectes et les environnements ; Cf. Prasse 1957 et 1969). Il ne peut donc y avoir de lien entre Amahegh/Amazigh et le verbe ahegh/awgh/agh, "piller/prendre...", car cela supposerait en berbère nord une forme *amawigh/amawegh au lieu de l'amazià attesté. – T. Sarnelli (1957) a proposé de rattacher Amazià à la racine ZWgh, "rouge". Sa démonstration n'est guère convaincante au plan linguistique dans la mesure où tous les dérivés de cette racine maintiennent très nettement, et dans tous les dialectes, les trois phonèmes constitutifs, y compris la semi-voyelle médiane [izwigh/izwagh, azegg°agh/azeggagh, tezwegh, imizwigh...]. Or, Amazigh, dans un système de correspondances synchroniques, ne peut être rattaché qu'à une base *Zgh. Il faudrait donc admettre un traitement particulier de la semi-voyelle dans le cas de la relation postulée ZWgh > Amazigh. Les seuls arguments que l'on pourrait avancer en faveur de cette thèse seraient d'ordre éthnologique (peintures corporelles, couleur de peau, habillement, représentations conventionnelles...). – Karl Prasse (1972 : 9, note 4 et 1974 : 299), suivant sur ce point F. Nicolas (1950 : 188), rapproche prudemment Amazigh d'un verbe −z−zegh, "marcher d'un pas altier, comme un noble". On peut se demander s'il ne s'agit pas d'une coïncidence fortuite, ou d'une reconstruction sémantique locale : ce verbe semble n'avoir qu'une existence très locale et n'a jamais été signalé ailleurs qu'en touareg méridional (tawellemmet de l'Est). Il est possible qu'il n'y ait là qu'une variante de −zeghegh, "être brave, intrépide" [Alojaly 1980 : 83]. Du point de vue morphologique, un dérivé de forme ama−zegh serait anormal et assez surprenant à partir d'un verbe −z−zegh à initiale tendue (on attendrait un *ama−z−zagh). Il faudrait, là encore, postuler un traitement morphologique et phonétique particulier à partir d'une base primitive *(W)Zgh (qui aurait donné d'une part amazigh, d'autre part −z−zegh) pour expliquer l'ensemble des faits. L'hypothèse ne peut être exclue mais elle reste à démontrer. En fait, les nom d'agent de structure aMaCiC sont plutôt rares dans l'état actuel de la langue et la plupart de ceux qui existent ne sont plus reliés à des bases verbales vivantes (l'un des rares exemples transparents est le chleuh amarir, "chanteur", formé sur le verbe irir/urar, "chanter/jouer" connu en chleuh et en kabyle). En définitive, les seuls éléments de (quasi) certitude auxquels on puisse aboutir quant à la formation de ce mot peuvent se résumer ainsi :Amazigh est : - de façon quasi certaine un nom dérivé (Nom d'Agent à préfixe m-), - construit, d'un point de vue synchronique, sur un radical *Zgh (= *izigh/uzagh) dont on ne trouve apparemment pas de trace certaine en berbère moderne, en tant que lexème verbal vivant. A titre d'hypothèse cependant, on avancera un rattachement à la racine Zgh "dresser la tente" (Laoust 1935), attestée dans le Maroc central et qui n’est sans doute pas sans lien avec le lexème nominal pan-berbère tazeqqa/tizghwin "maison"). Si ce lien est exact, amazigh a pu tout simplement signifier : "le nomade, celui qui habite sous la tente" ou "l'habitant, le résident", en fonction du sens que l’on retient pour ce verbe à date ancienne.

En tout état de cause, difficile d'établir un étymologie sûre pour cet éthnique dont la formation remonte à une époque très ancienne (au moins l'Antiquité) et dont la base verbale à partir de laquelle il a été formé peut avoir disparu depuis longtemps. Imazighen, "les hommes libres" Au niveau sémantique, de nombreux chercheurs ont pensé et écrit que Amazigh/Imazighen signifiait "homme(s) libre(s), noble(s)" (ce qui est du reste le cas de beaucoup de noms d'ethnies dans le monde). Cette interprétation semble venir de Jean-Léon l'Africain [1956, notamment p. 15] : « aquel amazig [= awal amazigh], ce qui veut dire langage noble. » Elle a été reprise et répandue par St. Gsell [HAAN, V : 119 et 1916 : 135] et on peut la rencontrer sous la plume des meilleurs auteurs. Pourtant, elle n'est certainement pas fondée et relève d'une extrapolation indue faite à partir de données régionales exactes : dans certains groupes berbères où il existait une stratification sociale forte [Touaregs] et/ou une importante population (réputée) allogène (négroïde) [Sud marocain, Sahara algé-rien], le terme Amazigh a eu tendance à désigner spécifiquement le Berbère blanc, l'homme libre, voire le noble ou le suzerain (comme chez les Touaregs méridionaux), par opposition aux berbérophones noirs ou métissés, de statut social inférieur (esclaves, descendants d'esclaves, quinteniers quasiment asservis, castes professionnelles spécifiques : musiciens, bouchers...). Mais il ne s'agit là que d'usages locaux secondaires, déterminés par les conditions socio-économiques particulières de ces groupes et il n'y a pas d'argument sérieux [sinon les réactions d'auto-glorification nationale des Berbères eux-mêmes !] pour les postuler dans la significationsignification idéologico-politique profonde de sa récupération par les Etats algérien et marocain... Sans doute les Imazighen et le tamazight sont-ils moins subversifs que les Berbères et la langue berbère.
* Bibliographie - ALOJALY Gh., Lexique touareg-français, Copenhague, 1980. - BASSET R., Notice "Amazigh", Encyclopédie de l'Islam, 1908, p. 329. - BATES O., The Eastern Libyans, Londres, 1914 [réédition 1970) [notamment : p. 42-43 et 77] - BEGUINOT F., Il Berbero Nefûsi di Fassato, Roma, 1931. - CAMPS G., Massinissa ou les débuts de l'Histoire, Alger, 1961, [p. 23-29]

DESANGES J., Catalogue des tribus africaines de l'Antiquité classique à l'Ouest du Nil, Dakar, 1962. - FOUCAULD Ch. de, Dictionnaire touareg-français, Paris, 1950-51. [Amahegh : t. II, p.673-4] - GALAND L., "Afrique du Nord", Revue d'Onomastique, sept. 1958. p. 222. - GALAND L., La langue berbère existe-t-elle ?, Mélanges linguistiques offerts à Maxime Rodinson, Paris, Geuthner, 1985, p. 175-184 (= Supplément 12 aux C.R. du GLECS). - GSELL St., Histoire ancienne de l'Afrique du Nord, Paris, 1918-1928, [t. V, 1925]. - GSELL St., Hérodote [Textes relatifs à l'histoire de l'Afrique du Nord], Alger, A. Jourdan, 1926. - IBN KHALDOUN, Histoire des Berbères, Paris, 1925 (rééd.) - JEAN-LEON L'AFRICAIN, Description de l'Afrique, [édit. Epaulard], Paris, A. Maisonneuve, 1956, 2 vol. - LANFRY J., Ghadames, II (Glossaire), Alger, FDB, 1970. - LAOUST E. : L’habitation chez les transhumants du Maroc central, Paris, Larose (collection Hesperis VI) 1935. - MASQUERAY E., Le Djebel Chechar, Revue Africaine, XXII, 1978, p. 26-48, 129-144, 202-213, 259-281. - NICOLAS F., Tamesna. Les Ioullemmeden de l'Est ou Touâreg "Kel Dinnik", Paris, 1950. - PRASSE K.G., Le problème berbère des radicales faibles, Mémorial André Basset, Paris, A. Maisonneuve, 1957, p.121-130. - PRASSE K.G., L'origine du mot Amazigh, Acta Orientalia [Copenhague], XXIII, 1958, p.197-200. - PRASSE K.G., A propos de l'origine de h touareg (tahaggart), Copenhague, 1969. - PRASSE K.G., Manuel de grammaire touarègue (tahaggart), Copenhague, 1972-1974, 3 vol [notamment vol. 1, 1972, p. 9-10 et vol 3, 1987, p.299]. - PROVOTELLE Dr., Etude sur la tamazir't ou zenatia de Qalaat Es-Sened, Paris, 1911. - SARNELLI T., Sull'origine del nome Imazighen, Mémorial André Basset, Paris, A. Maisonneuve, 1957, p.131-138. 
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25 janvier 2009 7 25 /01 /janvier /2009 16:36
 [Encyclopédie berbère IV, 1987, p 562-568.]

AMAZIGH, "(le/un) Berbère" par Salem CHAKER

Orthographe française : Amazigh plur. : Imazighen, "les Berbères" fem. : tamazight, "(la/une) Berbère" et "(la) langue berbère" Le second /a/ est, dans tous les dialectes, phonétiquement long : [ama:zigh]

LES DONNEES ACTUELLES

Ce terme est employé par un certain nombre de groupes berbérophones pour se désigner eux-mêmes. L'aire d'extension de cette dénomination couvre actuellement :

1° L'ensemble du Maroc

Elle est exclusive chez les berbérophones du Maroc Central qui se dénomment eux-mêmes Imazighen (Braber en arabe) et appellent leur dialecte tamazight (ou tamazixt, avec assourdissement de la vélaire /à/ au contact de la dentale sourde /t/). Elle est connue chez les Chleuhs où elle est un archaïsme littéraire. Elle y désigne aussi spécifiquement le "Berbère blanc", le "vrai Berbère", par opposition aux "négroïdes", bien représentés dans le Sud Marocain et réputés allogènes. Les Rifains l'emploient également à côté des dénominations courantes arifi/tarifit. Dans ces deux groupes, elle s'applique surtout à la langue berbère : chez les Rifains, tamazight est même plus courant que tarifit (qui semble être un néologisme d'origine arabe). Les Chleuhs eux-mêmes dénomment leur langue poétique awal amazigh, "la langue berbère" (Galand-Pernet 1969, 1972). L'expression est déjà donnée avec cette signification par Jean-Léon l'Africain au XVIesiècle (1956 : 15). Au Maroc, Amazigh/tamazight renvoient donc assez nettement à une identification linguistique, connotée de manière très valorisante et impliquant la conscience d'une communauté dépassant le cadre régional-dialectal.

2° Le monde touareg

Elle y prend, en accord avec l'évolution phonétique générale du touareg, les formes suivantes : - Amahegh/Imuhagh et tamahaq, en Ahaggar et en Ajjer, parlers dans lesquels /z/ du berbère nord est normalement traité en /h/, - Ama−zegh/Ima−zeghen et tama−zeq, dans les parlers méridionaux [Niger-Mali : Aïr, Iwllemmeden, Kel-Geres...] où /z/ du berbère nord est traité en /−z/, - Amašegh/Imušagh et tamašeq en Adrar des Ifoghas (Mali) où /š/ correspond régulièrement à /z/ du berbère nord. Chez les Touareg du nord (Ahaggar/Ajjer), Amahegh s'applique à tout membre de la société (quelle qu'en soit la classe sociale), alors que chez les Touaregs méridionaux (Niger-Mali), Ama−zegh désigne spécifiquement l'aristocrate nomade. L'ensemble des Touaregs y étant dénommé : Kel-tema−zeq, "les gens [de langue] tamajeq". Chez les Touaregs, comme chez les Imazighen du Maroc Central, c'est la seule auto-désignation qui soit utilisée.

3° Autres attestations actuelles

Enfin, comme chez les Chleuhs et les Rifains, Amazigh/tamazight est connu et employé, concurremment à d'autres termes locaux, chez les berbérophones : - de Tunisie : Sened [Provotelle 1911], - de Libye : Djebel Nefoussa [Beguinot 1931] et Ghadames [Lanfry 1972 : 224, n° 1060] - du Sud Oranais : oasis berbérophones algériennes et marocaines entre Aïn Sefra et Bechar [Figuig, Bousemghoun...]. Le terme est également connu dans les oasis du Touat-Tidikelt-Gourara [le Tawat des Touaregs et des auteurs arabes anciens], à Ghat et Djanet [Foucauld, II : 673] avec le sens de "maître", "suzerain", "seigneur" et même "Dieu" en zénète du Gourara (Mammeri 1984 : 214, par ex.). Signifi-cations qui renvoient aux anciennes conditions socio-politiques de ces populations d'agriculteurs sédentaires, plus ou moins asservies par une aristocratie locale ou extérieure, détentrice des droits de propriété sur la terre (ou l’eau) et elle-même berbérophone. En définitive, Amazià est donc attesté, avec des acceptions synchroniques variables, dans une très vaste zone en forme d'écharpe qui part de la Tunisie méridionale, englobe les parlers berbères de l'Ouest libyen, l'ensemble du domaine touareg, le Touat-Tidikelt-Gourara, le Sud Oranais et la totalité du Maroc. En-dehors de ces régions, i.e. dans toute l'Algérie du nord et le nord du Sahara, le terme Amazià est inconnu dans la culture traditonnelle des berbérophones. C'est en particulier le cas en Kabylie, au Mzab et dans les Aurès. C'est apparemment à tort que R. Basset évoquait les Chaouïas dans sa notice "Amazià" de l'Encyclopédie de l'Islam (1908). Cette affirmation, que l'on retrouve aussi chez Bates (1914 : 42) semble provenir de l'étude de Masqueray sur le Djebel Chechar (1878 ; notam-ment p. 27, note 1 : 259-261 et 281.), travail des plus sujets à caution sur les plans linguistiques et socio-linguistique. La répartition actuelle n'est pas sans analogie avec les données anciennes, médiévales et antiques.

L'ANTIQUITE

Amazigh est en effet un ethnonyme bien attesté depuis l'Antiquité. Les auteurs grecs et latins en donnent des formes multiples, en tant que nom de tribus indigènes de l'Afrique du Nord. La forme va-rie quelque peu selon les sources et les époques mais elle est presque toujours suffisamment proche de l'étymon berbère [(a)mazigh] pour que l'identification ne fasse guère de doute. On rencontre ainsi : Maxyes chez Hérodote Mazyes chez Hécatée Mazaces, Mazices, Mazikes, Mazax, Mazazaces... chez les auteurs de langue latine. Le thème de base que l'on doit poser pour l'Antiquité (Mazik-) est parfaitement compatible avec la forme (A)mazigh actuelle. L'initiale /a/ est une marque nominale, autrefois facultative (Cf. chap. 4) et l'occlusive finale palato-velaire /k/ peut correspondre, soit à la restitution latine de la vélaire vibrante berbère [gh] (Cf. latin causa > berbère ta-ghawsa), soit à une ancienne variante occlusive [q] : dans le système phonologique fondamental du berbère, [gh] et [q] sont en effet les allophones d'un même phonème. La localisation précise de ces populations antiques est en général plutôt problématique et incertaine. Le catalogue de Desanges (1962) et l'inventaire de G. Camps (1961 : 26-27) montrent clairement que ces Mazik-es se rencontrent un peu partout au Maghreb : - en Maurétanie tingitane [Maroc] (Desanges : 34), - en Maurétanie césarienne [Algérie centrale, au sud du Zaccar] (Desanges : 63), - en plusieurs points d'Africa [Tunisie] (Desanges : 111-112]. Un premier constat s'impose donc : cet ethnique est, dès l'Antiquité, répandu dans tout le Maghreb. Et il semble que son extension se soit accrue au cours de l'Antiquité - du moins dans les usages des auteurs latins - et qu'il ait eu tendance à avoir une acception de plus en plus large avec le temps : « Déjà au III° siècle, Saint Hyppolite met les Mazices sur le même plan que les Mauri, Gaetuli, Afri. » (Desanges : 113).

Des auteurs aussi différents que Lucain [Marcus Annaeus Lucanus, 39-65 ap. J.C.] et Corippus [Flavius Cresconius Corippus; il écrit vers 550 ap. J.C.] emploient même la forme Mazax pour désigner tous les habitants indigènes du Maghreb [Cf. Camps 1961 : 27-28] ! Il est évidemment difficile de déterminer si cette extension progressive correspond aux pratiques des Berbères eux-mêmes [qui se seraient, dès cette époque, eux-mêmes dénommés Mazik-/Mazigh] ou s'il ne s'agit que d'un usage littéraire latin. En tout état de cause, cela établit que l'ethnonyme Mazik-/Mazigh était suffisamment répandu, connu et socialement important pour que certains auteurs de langue latine aient eu tendance à en faire la désignation du peuplement autochtone dans sa globalité. Un autre constat, assez troublant, est que le Mazik- antique est attesté dans des régions qui ne connaissent pas (ou plus ?) Amazigh à l'heure actuelle [Algérie centrale et occidentale]. Il est vrai que cette zone a été profondément arabisée et qu'il ne s'y maintient plus que des îlot très réduits et menacés de berbérophonie. La forte érosion et la fragmentation extrême qu'y a subies la langue berbère expliquent peut-être la disparition du terme (A)mazigh. On notera enfin que (A)mazigh a été dans l'Antiquité, comme bien d'autres ethniques, un surnom courant [Desanges 1962 : 63, note 1 et 112, note 8]. On le rencontre encore aujourd'hui dans l'onomastique maghrébine comme nom de famille (en Tunisie notamment).

LE MOYEN AGE

Chez les auteurs de langue arabe du Moyen Age, (A)mazigh n'apparaît jamais en tant qu'ethnique. Mais Ibn Khaldoun, dans son Histoire des Berbères, [t. I : 167-185] propose une synthèse critique très précise des théories de l'origine des Berbères, formulées selon le modèle généalogique de l'époque. Et il admet, au terme d'une revue très serrée, que : « leur aïeul [des Berbères] se nommait Mazîgh.» (p. 184) Un doute pourtant demeure chez lui quant à la filiation des groupes berbères Sanhadja et Ketama qui pourraient avoir une autre généalogie... Ainsi, selon les auteurs médiévaux de langue arabe (en l'occurrence des généalogistes pour la plupart eux-même Berbères), de très nombreuses tribus berbères se réclamaient d'un ancêtre mythique Mazigh. Traduit en termes modernes, cela signifie qu'un grand nombre d'entre elles s'identifiaient (et se dénommaient) comme (A)mazigh. Là encore, on doit relever une contradiction factuelle par rapport aux données contemporaines. Parmi ceux dont le lien avec l'ancêtre Mazigh est mis en doute, figurent des précurseurs des Touaregs actuels, les Lemtouna [ilemteyen en berbère] qui appartiennent au groupe Sanhadja. Or, les Touaregs se dénomment eux-mêmes Ama−zegh (< amazigh)... Mais il est probable que les (re)constructions généalogiques médiévales ne représentent qu'un effort de rationalisation de données géo-politiques, nécessairement fluctuantes, de l'époque. Ce que l'on peut en retenir est que (A)mazigh est un terme lar-gement répandu au Moyen Age et qu'il couvre une grande partie des populations berbères. Cette extension, on le voit très ancienne, en faisait un excellent candidat pour dénommer, en berbère, l'ensemble des Berbères et leur langue. C'est ainsi que dans les usages actuels, Amazigh/Imazighen et tamazight désignent désormais les Berbères et la langue berbère, dans toutes les régions berbérophones, y compris celles où ces appellations n'étaient pas connues dans la culture traditionnelle locale (Kabylie, Aurès...). L'impulsion initiale à cet emploi néologique vient d'ailleurs de Kabylie et peut être précisément datée des années 1945-50. Les néologismes Amazigh/Imazighen et tamazight y sont diffusés et implantés à cette époque par le biais de la chanson "berbéro-nationaliste" qui s'est développée dans le cadre du Mouvement national algérien (Cf. Chaker 1989/90). Le terme est désormais tout à fait acclimaté et admis partout comme désignation globalisante des Berbères et de leur langue. En quelques décennies Amazigh s'est donc imposé comme ethnique général.
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3 septembre 2007 1 03 /09 /septembre /2007 22:31
Afer : poète antique berbère
 
 
 afer

Afer est né en 185 av.jc, enlevé par des légionnaires romains dans la région d’Hippone (actuelle Annaba, dans l’est-algérie), "Afer" signifie en berbère : l’habitant de l’africa (province romaine de la berbèrie orientale qui englobe la Tunisie et la Libye actuelle)

 

Agé de 5 ans Afer fût vendu à un donateur, Publius Lucanus qui lui donnera un autre prénom, Terentius tout en lui gardant celui qu’il possédait à l’origine à savoir. Il l’affranchira aussitôt et le considéra comme son propre fils ce qui lui permettra d’avoir eu une excellente éducation.

 

Afer se mit à écrire à un âge précoce, c’est à dire à...8 ans ! en 166 av.jc, il présentera une pièce de sa composition qu’il nommera "Adria"qui connaîtra alors un succès retentissant. A l’âge de 11 ans Afer deviendra le représentant de l’aristocratie romaine, mais influencé par la pensée grecque qui alors était basé sur la libération de l’esprit réfractaire, il deviendra le fer de lance d’un nouveau courant d’idées qui veut rompre avec les habitudes et les traditions, rejetant toute pensée traditionaliste qui gênait la vie quotidienne du citoyen (parlons ici plutôt de sujet).

 

Outre "Adria " ! son œuvre était composée entre autres de cinq autres pièces "Ennuchus"(l’énnuqué), ou il développe le rejet de la bouffonnerie et qui aura un succès éclatant "Hecyra" (la belle-mère), trop imprégnée d’influences hellèniste sera un échec total mais lui permettra de d’en comprendre les raisons et suivra "Heautontimoroumenos" (le bourreau de soi), un essai sur les liens entre l’aristocratie régnante et le petit peuple en insistant sur les goûts communs de ces deux parties "Phormio", et "Adelphi" où il établira un meilleur équilibre sans oublier des formules scéniques prises de la civilisation grecque, donnant ainsi une certaine psychologie aux personnages sortis de son imagination. N’occultant aucunement les problèmes primordiaux vécus par la société et donnant même une importance particulière à la jeunesse, ces ouvrages feront sa réputation d’écrivain berbère enfin rendue possible et reconnue

 

Afer gardera toutefois son originalité, il étale la difficulté des caractères de ces personnages ainsi que la complexité relevée dans les comportements à caractère sentimentaux. Il parviendra à apporter des justifications par des arguments très solides. Enfin, la composante humaine ne sera pas négligée.

 

il montrera les attributs des parents honorant le rôle noble joué par la femme au sein de la société et allant plus loin dans ses analyses, il mettra en garde contre les diverses déviations juvéniles, pensées qui postérieurs

 

En 159, Afer mourut, il n’avait que 26 ans mais avait marqué de son empreinte son époque


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29 août 2007 3 29 /08 /août /2007 00:18

Les berbères à travers les millénaires

La véritable patrie d’Apulée où l’identité amazighe revendiquée et assumée

Les Amazighs - Berbères, ont toujours affirmé hautement, et dans les formes les plus diverses,l’attachement à leur identité quelque soit le contexte ou le milieu dans lequel ils vivent. Aujourd’hui, comme hier, pour preuve le texte d’Apulée en réponse à Emilianus.
 

« Quant à ma patrie, vous avez rappelé, d’après mes propres écrits, qu’elle était située sur les limites mêmes de la Numidie et de la Gétulie. J’ai déclaré en effet, dans une conférence publique faite en présence de Lollianus Avitus, que j’étais demi-numide, demi-gétule. Mais je ne vois pas ce qu’il y a pour moi de plus déshonorant que pour Cyrus l’ancien d’avoir été sang mêlé, demi mède et demi perse. Ce n’est pas au lieu de naissance, mais au caractère de chacun qu’il faut regarder ; ce n’est pas dans quel pays, mais sur quels principes s’est fondée son existence qu’il faut considérer. Un marchand de légumes, un marchand de vin, c’est admis, et à juste titre, feront état, pour donner plus de prix à leurs légumes ou à leurs vins, de la noblesse du terroir. On dit : un vin de Thasos, légumes de Phlionte. Ces produits de la terre tirent un goût plus délicat de la fertilité du pays, de l’humidité du climat, de la douceur des brises, de l’action bienfaisante du soleil, de la générosité du sol. Mais, pour l’âme humaine, cette étrangère qui vient séjourner dans le corps comme un hôte de passage, en quoi ces circonstances peuvent- elles ajouter ou ôter quelque chose à ses vertus ou à ses vices ?N’a-t-on pas vu à toutes les époques toutes les races produire des génies divers, encore que certaines d’entre elles paraissent se distinguer davantage plus par la sottise ou par l’intelligence ?C’est chez les Scythes, gens épais, qu’est né le sage Anacharsis ;chez les Athéniens avisés, Mélétidès l’idiot. Cela ne veut pas dire que je rougirais de ma patrie même si nous étions encore la ville de Syphax. Mais après la défait e de ce prince, la faveur du peuple romain nous fit passer sous la domination de Massinissa ; plus tard notre cité fut fondée à nouveau par l’établissement de vétérans ; et nous sommes maintenant une colonie florissante. Dans cette colonie, mon père a occupé le haut rang de duumvir, après avoir passé par tous les honneurs ; et sa situation dans l’Etat, depuis que je fais partie de la curie, je la conserve sans déchoir, aussi honoré, je l’espère, et aussi considéré. Pourquoi tous ces détails ? C’est afin, Emilianus, de calmer ton courroux, et d’obtenir ton pardon, si par mégarde peut-être, je n’ai pas choisi pour y naître ton Zarath, ce foyer d’atticisme. »

 

Voici une très belle lettre, en réponse à une attaque, d’Apulée sur son identité berbère et les valeurs, pleine d’humour aussi nous le voyons.

 
 


Source :

Briand-Ponsard Claude et Hugoniot Christophe, L’Afrique romaine de l’Atlantique à la Tripolitaine, 146 av. J.C.-533 ap. J.C., A.Colin (U), 2005.

 
 

PS.d’atticisme » : style élégant et sobre propre aux artistes de la Grèce antique au V et IVème siècle av JC notamment aux écrivains (d’Eschyle à Démosthène)
Source: cbf.fr

 
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6 juillet 2007 5 06 /07 /juillet /2007 13:34

Traditions prophétiques à propos des Amazighs

En présentant des traditions prophétiques à propos des Amazighs, nous ne souhaitons pas polémiquer sur la vérité historique de ces événements mais de les situer dans le contexte de l’affrontement de différents courants religieux et des légitimités dans l'Afrique du Nord. Même si elles n’ont pas pu s’imposer dans l’histoire médiévale maghrébine et contribuer à édifier des mouvement se réclamant d'une prise de conscience solide de l'amazighité, ces traditions ont produit une littérature destinée à asseoir une origine textuelle à l’action politique des Berbères.

Ces traditions sont produites dans le contexte des justifications diverses qu’opposaient les Kharidjites nord-africains aux tenants de l’idéologie califale classique prônée par les Omeyyades. Cette idéologie, ne voulant pas ouvrir le champ de la concurrence politique aux non-arabes, reposait sa théorie à propos du Califat sur des considérations généalogiques. Le Calife ou commandant des croyants ne peut être qu’un Arabe koraïchite. Face à cette théorie inadaptée à l’extension universelle du message religieux, un mouvement contestataire, en l’occurrence le mouvement kharidjite, est né depuis la première moitié du premier siècle de l’hégire. Ce mouvement, et en dehors des circonstances particulières qu’ils lui ont donné naissance, occupe une position radicalement opposée. Le kharidjisme postule que tout musulman, moralement et religieusement irréprochable, est capable d’être élevé au titre d’émir des croyants, " fut-il même un esclave noir. " Il ouvre, de fait, la voie à tous les prétendants au pouvoir parmi les populations périphériques et marginales converties à l’Islam.

Qu’en est-il alors de leur apparition en Afrique du nord ? Les chroniqueurs médiévaux racontent que juste après le retour de Musa ben Nusayer à Damas, certains chefs de confédérations tribales amazighes, convertis à la doctrine kharidjite, appelèrent à la révolte contre les gouverneurs exacteurs omeyyades. Musa ben Nusayer, l’un des premiers gouverneurs arabes de l’Afrique du Nord, fut en effet interpellé pour lui substituer Abdallah ben Habhab. Ce dernier, ayant été commandité par le représentant du califat en Égypte et en Ifriqiya de lever sur les populations nord-africaines des impôts réservés aux populations soumises sans conversion, a ordonné de ne pas ménager les biens des Nord-Africains, de prendre les plus belles de leurs filles afin de les adresser aux palais de Damas et de placer les populations autochtones, contrairement aux Arabes, aux premiers rangs de l’armée pendant les batailles. Cette politique a suscité la colère des populations autochtones. Ces dernières n’ont pas tardé à dépêcher une délégation à Damas pour exprimer leur mécontentement vis-à-vis de la politique mise en œuvre. Et malgré les avertissements incessants des premiers kharadéjites, ayant infiltré le territoire, sur la complicité du Calife et des gouverneurs, les Amazighs ne voulaient pas rejeter l’allégeance avant de mettre au courant le Calife et de savoir son attitude à l’égard du comportement illégal de ses gouverneurs. En effet, ils ont envoyé une délégation à Damas. Celle-ci n’ayant pas été reçue par le Calife, se rendit au Maghreb et la région entra en guerre dès 122 de l’hégire (739/40). Les révolutions, animées par des chefs locaux convertis à la propagande kharidjite, secouaient la région. Maysara, que l’on trouvait à la tête de la dite délégation, déclara la guerre contre les gouverneurs arabes. Soutenu par les tribus Miknassa et Burghwata, il s’empara de Tanger et de Sous après avoir tué leurs gouverneurs ‘Umar ben ‘Abdallah al Muradi et Habib ben Abi ‘Ubayda. Ce fut donc le début de la révolte kharidjite. Elle comportait deux ailes, une modérée représentée par les Ibadhites et une autre, transformée en une forme de syncrétisme, a pris forme d’une version maghrébine de la doctrine yazidite apparue en Iran.

Les Ibadhites ont réussi à constituer leur premier Imamat dans la Tripolitaine. Il s’agit de l’Imamat d’Abu al Khattab. Après sa destruction par l’armée abbasside en 144 de l’hégire, les Ibadhites se retirèrent vers le Maghreb central et précisément à Tahert. Ainsi, Abeddarhman ibn Rustum fonda la ville qui portait le même nom (actuelle Tyart) et l’Imamat des Rustumides. Cette dernière fut reconnue par tous les Ibadhites nord-africains et même ceux de Basra et de l’Orient. En voulant asseoir leur légitimité politique et religieuse, ils étaient dans l’obligation de reconnaître la spécificité ethnique du territoire de leur installation. Ainsi, ces derniers, qui refusaient de reconnaître aux Koraïchites la propriété inaliénable de l’Imamat, cherchaient à reconstruire, à partir des textes religieux, une généalogie légitimatrice. C’est ainsi qu’ils ont rapporté des traditions du prophète de l’Islam Mahomet recensant les faits nobles des Amazighs. Elles traduisent cette volonté de valorisation. En fait, Ibn Sallam, le premier historien ibadhite nord-africain (contemporain des Rustumides (777/909), il est mort après 883), après l’évocation de la bataille de Tawargha qui a consacré la destruction de l’imamat de la Tripolitaine en 144, rapporte du prophète des traditions qualifiant les Amazighs de vénérables et de sauveurs de la religion. En marge de leur valeur psychologique de consolation, les traditions prévoient un avenir glorifiant à la doctrine en s’appuyant sur les tribus amazighs, vénérées du prophète, ces traditions, dont il est difficile de soutenir une origine fiable, expriment la volonté des Amazighs de se positionner dans le champ religieux et de se doter d’une affiliation discursive à l’intérieur de la tradition religieuse. Rapportées spontanément, elles révèlent la nécessité historique de la fabrication d’une légitimité textuelle. Et par-delà, l’inscription de l’amazigh dans les projets d’identification doctrinale et culturelle.

Après Ibn Sallam, d’autres chroniqueurs ibadhites ont, sans contestation, approuvé la légitimité de leur action à partir de l’existence de ces traditions. Aftayash (m. 1914), l’un des derniers auteurs ibadhites, adopte cette version des faits. Et par un ajustement de mémoire, il retrouve sa place dans la toile du fond de la légitimation religieuse des Amazighs auxquels appartenait l’auteur. La version française que nous présentons de ces traditions est la confrontation de deux références. La première est la traduction faite par E. Masquéray de la Chronique d’Abu Zakariya (Alger, 1879). La deuxième est tiré d’un mémoire de DEA préparé par Brahim Cherifi sur la Risala du Cheikh Aftayach (Université Paris VIII, Département d’anthropologie et de sociologie du politique, 1996).

Première tradition

Nous avons appris qu’un jour, un Berbère se présenta devant ‘A’isha, mère des croyants (que Dieu l’agrée); elle était assise et entourée des principaux muhajirin et ansar (émigrants et auxiliaires). ‘A’isha se leva de son coussin et l’offrit au Berbère, faveur qu’elle n’accordait pas à son entourage. Les Mouhajirin et les ansar se retirèrent irrités. Le Berbère consulta ‘A’isha sur un point de religion et se retira. Alors ‘A’isha fit revenir ses fidèles l’un après l’autre de leurs maisons. Quand ils furent réunis, elle leur dit :

Vous m’avez quittée avec colère, pourquoi cela ?

Un d’eux répondit :
    Nous étions irrités contre vous à cause de ce Berbère. Nous le méprisons, lui et son peuple, et vous lui avez fait plus d’honneur qu’à nous et à vous-même.
 ‘A’isha dit alors :
    Je lui ai fait honneur plus qu’à vous et à moi-même, à cause des paroles prononcées sur eux par l’envoyé de Dieu (que sur lui soit le salut). Connaissez-vous un tel le Berbère ?  Assurément Or j’étais un jour assise avec l’envoyé de Dieu, quand ce Berbère vint à nous, le visage pâle et les yeux caves. L’envoyé de Dieu le considéra et lui dit : " que t’est-il arrivé ? Es-tu malade ? tu m’as quitté hier le teint animé des couleurs de la santé, et maintenant tu as l’air de sortir de tombeau " " Ô l’envoyé du Dieu, dit le Berbère, j’ai passé la nuit dans une peine cruelle. " " Et quelle est cette peine cruelle ? "Le Berbère dit : " vous m’avez regardé hier avec insistance ; j’ai craint que quelque verset de Dieu fût descendu sur vous à mon sujet. "Le prophète lui dit : " En effet je t’ai regardé hier avec insistance, à cause de Gabriel (que sur lui soit le salut). Gabriel est venu vers moi et m’a dit : " Ô Muhammad, je te recommande la crainte de Dieu et les Berbères. " Je dis à Gabriel : " Et ces Berbères que sont-ils ?" Il répondit : " C’est le peuple auquel appartient cet homme. Il te désigna, et je te considérai. "  Je dis alors à Gabriel : " quel sera leur rôle ". Il me répondit : " Ce peuple vivifiera la religion de Dieu quand elle sera morte et la renouvellera quand elle sera usée. " Gabriel ajouta : " Ô Muhammad, la religion de Dieu est une créature parmi les créatures. Sa patrie est le Hijaz, elle a pris naissance à Médine. Née faible, elle se développera et grandira jusqu’à ce qu’elle soit puissante et glorieuse, elle donnera des fruits comme en donnera un arbre ; puis elle tombera. Or la tête de la religion du peuple de Dieu tombera dans le Maghreb ; et quand un arbre tombe, on n’en le relèvera pas en le prenant par le milieu ou par les racines, mais par la tête. "
Tradition 2

Nous avons appris que ‘Umar ben el khattab (que Dieu l’agrée) reçut un jour une députation de Berbères que lui envoyait ‘Amr ben el ‘As. Ils avaient la tête et le visage complètement rasés. ‘Umar ben el khattab leur dit : Qui êtes-vous ?

Ils répondirent : Nous sommes des Berbères louata.

‘Umar demanda aux assistants : Quelqu’un de vous connaît-il cette tribu parmi les tribus arabes ?

Non, dirent-ils, nous ne connaissons pas cette tribu.

Alors, El ‘Abbas ben Merdas el Selmi, dit :
    Émir des croyants, je connais ces gens-là. Ce sont des fils de Ber Ben Qais. Qais avait plusieurs enfants, un d’eux s’appelait Ber Ben Qais. Ce Ber Ben Qais avait un caractère difficile et emporté. Il commit plusieurs meurtres, et se retira dans le pays des Berbères. Sa prospérité s’y multiplia, et les arabes dirent : " ils berbérisent" pour dire ils se multiplient.

 ‘Umar ben el khattab se tourna vers eux. Or, ‘Amr ben el ‘As avait envoyé avec eux un interprète chargé de traduire leurs paroles s’ils étaient interrogés par ‘Umar ben el khattab. Ce dernier leur demanda pourquoi leurs visages et leurs têtes étaient rasés. Ils répondirent :"notre poil avait poussé quand nous étions incrédules, nous avons voulu le changer en entrant dans l’islamisme"

‘Umar dit : Avez-vous des villes dans lesquelles vous habitez ?

Ils dirent :  non

Avez-vous des lieux fortifiés dans lesquels vous gardiez vos biens ?

Ils dirent : non

Avez-vous des marchés sur lesquels vous fassiez des échanges ?

 Ils dirent : non.

Alors ‘Umar ben el khattab se prit à pleurer, et l’assistance lui dit : Quelle est la cause de tes larmes, émir des croyants ?

Il répondit :
    Ce qui me fait pleurer est une parole que j’ai entendue de la bouche de l’envoyé de Dieu (que le salut soit sur lui), le jour du combat de Honin. Les croyants pliaient. Je me tournai vers lui, et je me pris à pleurer. Il me dit : " Pourquoi pleures-tu, Ô ‘Umar. " Je répondis : " Je pleure, Ô prophète de Dieu, à cause du petit nombre de ces musulmans et de la multitude des infidèles réunis contre eux. " Alors, l’envoyé de Dieu dit : " Ne pleure pas ‘Umar, Dieu ouvrira à l’Islam une porte du côté du Maghreb ; il lui suscitera un peuple qui le glorifiera et humiliera les infidèles, peuple craignant Dieu et voyants, qui mourront pour ce qu’ils ont vu. Ils n’ont pas de villes qu’ils habitent, ni de lieux fortifiés dans lesquels ils se gardent, ni deux marchés sur lesquels ils vendent. " C’est pourquoi je viens de pleurer, car je me suis rappelé la parole de l’envoyé de Dieu, et les mérites qu’il a attribués à ces Berbères. 

‘Umar les envoya à ‘Amr ben el ‘As, et lui recommanda de leur donner les premiers rangs dans son armée, et de les traiter avec honneur. En effet, ‘Amr ben el ‘As les honora, et toujours ils prétendirent à être favorisés et placés aux premiers rangs de l’armée, et ils demeurèrent avec ‘Amr ben el ‘As jusqu’à la mort de ‘Utman ben ‘Affan. Or, comme les paroles citées plus haut ont été dites devant une réunion de gens du Maghreb par la bouche même de ‘Umar ben el khattab répétant les paroles de l’envoyé de Dieu, nous espérons qu’elles désignent particulièrement les compagnons de l’œuvre, et que ce sont eux qui en méritent la faveur.

Tradition 3

Nous tenons d’un homme de la postérité d’Abou Bakr que ‘Ali ben Abi Talib a dit :

    Ô gens de la Mecque, Ô gens de la Médine, je vous recommande par-dessus tout Dieu et les Berbères ; car ils vous apporteront la religion de Dieu du Maghreb, quand on l’aura corrompue ici ; c’est d’eux que Dieu parle dans son livre, quand il dit : " Ô vous qui croyez, il s’en trouve parmi vous qui renient toute religion. Certes, Dieu suscitera d’autres hommes qu’il aimera et qui l’aimeront. Humbles envers les croyants, et fiers envers les infidèles, ils combattront pour la foi et ne craindront pas le blâme. Dieu accorde sa faveur à qui lui plaît. " Et ils ne tiendront compte de personne ni de rien, sinon du respect dû à Dieu.
Le descendant d’Abou Bakr a dit encore :
    Quant vient l’heure de la bataille, on combat : nous, les Arabes, pour des dînârs et des dirhems, mais les Berbères, eux, combattent pour la religion de Dieu, afin de la faire triompher.
Il fait remonter la tradition suivante à Ibn Mas’ud : À la fin de son pèlerinage, le prophète dit :
    Ô gens de la Mecque, Ô gens de Médine, je vous recommande la crainte de Dieu et les Berbères, car ceux-ci vous apporteront du Maghreb la religion de Dieu. C’est eux que Dieu prendra en échange de vous, car il a dit : " Si vous tournez le dos, Allah vous substituera un peuple autre que vous qui ne sera pas semblable à vous. " J’en jure par celui qui tient en ses mains l’âme d’Ibn Mas’ud, si je les atteins, je serai plus obéissant envers eux que leurs esclaves et plus proche d’eux que leur couverture, c’est-à-dire leurs vêtements".
Tradition 4

On rapporte que ‘A’isha (que Dieu l’accueille dans sa miséricorde) vit un jeune garçon dont les cheveux étaient tressés des deux côtés de la tête et était beau et élégant. Elle dit :

    De quelle tribu parmi les nations est ce garçon ?
    C’est un Berbère, lui répondit-on.
    Les Berbères, reprit-elle, savent accueillir les hôtes, frapper avec le sabre et brider les rois comme on bride les chevaux.
Afulay
http://www.mondeberbere.com

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19 juin 2007 2 19 /06 /juin /2007 17:51

barghwata

Au sud de l'oued SEBOU, les Barghwata fondent un petit état indépendant en 744 dans le Maroc occidental, qui pratique un islam altéré et dure jusqu'à la fin du XIe sc. Sur la Méditerranée, deux autres petits états musulmans se détachent : l'un arabe, fondé à Nakour de 809 à 917, l'autre berbère à Sebta (Ceuta) qui dure jusqu'en 931.

source

C est Youssef Ben Tachfine qui vint a bout des Barghwata et qui unifia le Maroc

source



Ce texte n’a pas prétention d’apporter des éléments nouveaux sur ce royaume berbère tout au moins original . Il s’agit pour moi à travers cet article de la faire connaître un peu plus.

En effet , très peu de chercheurs contemporains se sont réellement intéressés à ce à ce sujet  (mis à part l’excellent travail de Talbi et le travail sur l’origine du nom de M . Redjala ). 

            Les sources historiques sont peu nombreuses et  et peu fiables pour parler sans prudence de ce royaume qui a pourtant duré quatre siècles . 

            La question fondamentale , à mon avis , est de savoir pourquoi il ne reste plus de documents écrits contemporain des Berghwata . On pense spontanément que les archives ont été volontairement détruites pour faire passer dans l’oubli un peuple qui dérangeait et qui remettait en question des valeurs arabes et islamiques déjà bien implantées à cette époque .

Quelle est l’origine de ce royaume ?
Les sources historiques diffèrent quand à leur origine . Des trois traditions qui nous sont parvenues , celle de Cordoue est la plus importante puisque confirmé par Abou Salih Zemmour , grand prieur , dépêché en ambassade auprès du Calife arabe de Cordoue par le septième prince de la Dynastie des Berghwata au milieu du dixième siècle . 

        Cette tradition qui nous est rapportée par El Bekri , Ibn Idari et Ibn Khaldoun nous apprend que le fondateur de cette dynastie , Tarif , était originaire de Salé et était de confession juive . 

          Bien que plausible , cette tradition n’est pas sûre puisque si l’on en croit Ibn Khaldoun , les barghwatatis font partie de la grande tribu des Masmouda et auraient existé avant l’Islam . De plus , El Bekri rapporte une autre source selon laquelle barghwatai serait une simple déformation de Barbat , localité espagnole , où  vécut le troisième prince de la Dynastie Tarifienne . M . Redjala , chercheur à l’Iremam ( Aix – en Provence) , vient ajouter à la confusion en proposant sa propre interprétation . Il les fait en effet venir des BALAGHWAT qui seraient partis de l’actuelle LAGHWAT ( Algérie) vers le TAMESNA (Maroc) . 

          La question posée n’a donc pas encore trouvé de réponse . Voilà une piste de recherche fort intéressante .

Quel est l’intérêt de mieux faire connaître ce Royaume ? 
L’originalité des Berghwata réside dans le fait que les connaissances acquises auprès des arabes ont été retournées contre eux . Le rejet de cet « autre » , vu comme un étranger conquérant , s’est exprimé violemment mais avec une radicalisation extrême . 

         Durant quatre siècles ( 741 – 11 – 1148 ) , ce Royaume de Tamesna occupant l’espace entre Salé et Azemmour sur la côte atlantique marocaine , s’était donné un prophète , un nouveau coran et utilisait le berbère comme langue officielle .

          Ce particularisme lui a valu les geôles de l’histoire . 

Naissance du Barghwatisme
Pour mieux comprendre la doctrine des barghwatis , il est utile de la situer par rapport au mouvement kharidjite , c’est au septième siècle que Ali devait théoriquement se rendre maître du Califa . Ce dernier lui fût contesté par Moawiya et il s’en suivi un arbitrage qui fut à l’origine d’une désertion d’un nombre important de soldats de l’armée d’Ali . Ces kharidjites (du mot kharadji..sortir furent persécutés et trouvèrent refuge en Algérie où ils prospérèrent . 

          La doctrine kharidjite prônait en effet l’égalitarisme et les berbères y adhérèrent en masse pour marquer une opposition au pouvoir central arabe qui refusait d’accorder les pleins   droits aux populations autochtones . 

          Tarif , fondateur du Royaume des Barghwata , s’était d’abord fait sofrite , une tendance dure du mouvement kharidjite , et combattit auprès de Maysara chef militaire kharidjite . Son engagement s’expliquerait par une volonté d’être musulman mais berbère . 

          Lorsque les kharidjites perdirent la bataille de Kairouan , Tarif se refugia et fonda sa dynastie dans la première moitié du huitième siècle . Il continua son combat contre l’occupant arabe qui n’accordait que le statut de deuxième collège aux berbères musulmans . l’idéologie barghwatie est donc née d’une volonté de lutter contre l’oppression . Les Tarifiens franchirent le Rubicon en rejetant à la fois l’Islam comme religion et l’arabe comme langue . 

         En fait la religion Barghwatie fut l’œuvre de Salih fils de Tarif , mais restait publiquement musulman pour des raison de sécurité . C’est son petit fils Younes ( deuxième partie du neuvième siècle ) fils de Lyes qui divulga la prophétie et l’imposa par les armes .

En quoi consistait la religion des Barghwata ?
Lorsque Younes révéla la prophétie , il l’attribua à son grand – père qui fut un exemple de sagesse . Mais il faut citer une autre particularité , les chefs de la Dynastie Barghwatie étaient prophètes de père en fils . 

         La stratégie de Younes pour lutter contre l’occupant était de présenter face à l’Islam une religion qui leur était propre et face l’arabe le berbère . 

          Pour justifier l’utilisation du berbère , Younes fait appel à une sourate coranique : « Nous avons envoyé à chaque peuple un prophète qui lui parlerait dans sa langue. » Comme il fait toujours appel au Coran pour légitimer Salih , qui selon lui était nommément annoncé comme dernier prophète . Younes fait alors appeler son grand – père WER YELLI WARA  ( celui après qui il n y a personne). 

          Le livre Barghwati qui fut révélé en berbère contenait quatre vingt (80) chapitres et retient de nombreux titres propres au Coran et à la Bible. Le message devait servir , entre autre , à pratiquer les dix prières ( 5 de jour , 5 de nuit ) après des ablutions touchant la presque totalité du corps. 

         En fait cette religion s’avérera plus exigeante que le Coran musulman . Il fallait prouver qu’on pouvait aller encore plus loin dans la voie de pureté et de l’ascétisme . Ainsi en plus du mois de carême ( qui ne coïncidait pas avec celui des musulmans ) , il fallait jeûner de nombreuses autres journées dans l’année . Le zèle était poussé jusqu'à réciter tout le livre à chaque prière . Les restrictions alimentaires étaient encore plus draconiennes et la polygamie était sans limite . 

         Tout était donc fait pour élargir au maximum le fossé entre eux et les Arabes .

Du point de vue de la langue
Faute d’archives , détruites vraisemblablement , il est difficile de se prononcer quant à l’utilisation du berbère dans les affaires administratives . Cela n’est néanmoins pas impossible puisque Abu Salih Zemmour , grand prieur de la Dynastie Tarifienne à Cordoue , parfait en berbère et se faisait traduire en arabe par un interprète . De plus nous savons que leur livre a été révélé dans leur langue . 

         Tout concorde donc pour penser que le berbère avait statut de langue officielle , unique fois dans l’histoire des Berbères . 

          Ainsi donc comme pour le Donatisme ( 305 ap .J.C ) dans la période romaine , où le kharidjisme (740) , le barghwatisme a été un instrument de lutte contre une répression militaire et une oppression culturelle . 

          Il s’agissait pour les berbères d’affirmer pleinement leur berbérité à travers leur propre langue et leur propre religion .

                    Mouloud lounaouci      « Imazighen Ass – A » Revue culturelle de l’association   TAMAZGHA – ISSN -    1255 –    6416 – N° 2/3 Mars 1995.

source


Fatima MOUTAOUKIL
Parimazigh n°2

L'avènement des Barghwata sur la scène politique marocaine, vers le milieu du VIIIe siècle constitue un événement fort remarquable dans la mesure où leur royaume a résisté pendant plus de quatre siècles, en dépit des luttes continuelles qu'il a dû mener contre les attaques des puissances qui lui étaient contemporaines. En effet, et jusqu'au milieu du XIIe siècle, les Barghwata ont su sauvegarder leur souveraineté et leur indépendance.

Ils ont subi les attaques successives des Idrissides, des Fatimides, des Zirides, des Zanata et même des Almoravides. Toutes ces puissances ne seront parvenues à les anéantir. En effet, ce sont seulement les Almohades qui en viendront à bout. Il est regrettable que nous n'ayons que très peu de renseignements sur ce royaume amazigh original. En effet, nous n'avons pas de sources écrites exprimant le point de vue des Barghwata par rapport à leur histoire. Il est vraisemblable que toutes les archives qui les concernent ont été délibérément détruites pour faire passer sous silence l'existence d'un peuple qui dérangeait les idéologies arabo-islamiques qui avaient déjà atteint une grande ampleur au Maghreb.

Les sources historiques que nous possédons sont des sources largement postérieures aux Barghwata et qui sont d'ailleurs peu fiables, présentant souvent un contexte historique contradictoire et très confus. Selon l'étude de Talbi, ces sources représentent trois traditions. La première et la plus ancienne est attribuée à Ibn Hawqal, qui se trouvait à Sigilmassa vers 952, mais les renseignements qu'il a pu fournir sur les Barghwata ont été rédigés d'une manière hâtive, et souvent recueillis par l'intermédiaire d'autres personnes. Une autre tradition nous a été rapportée par un certain El Madhigi, dont on ne connaît ni l'identité, ni la position chronologique par rapport au royaume des Barghwata.

Néanmoins, la troisième tradition nous paraît plus intéressante. Elle nous parvient de Cordoue et son auteur est Abu Salih Zammur, le Grand Prieur des Barghwata, dépêché en ambassade par Abu Mansur Isa, le septième prince de la dynastie de ces derniers, auprès du calife cordouan, Al Mustanir, vers le milieu du Xesiècle. Cette tradition de Zammur est considérée comme la plus détaillée concernant les Barghwata. Elle a été rapportée par El Bakri, Ibn Idari et par Ibn Khaldun, bien que leurs interprétation comportent parfois des divergences de points de vue.

En fait, les Barghwata n'étaient au départ qu'une confédération de tribus, avec comme chef, Tarif, qui était semble-t-il originaire de Salé et de confession juive. Ils avaient participé aux combats de Maysara contre l'autorité arabe, après avoir adopté le schisme kharijiste, qui était la seule doctrine musulmane préconisant un égalitarisme total, et cette confédération tribale, en se ralliant à la cause kharijiste, voulait aussi manifester son indépendance vis-à-vis d'un pouvoir central arabe qui refusait d'en reconnaître un peuple fondamentalement autochtone. Mais après la défaite des Kharijistes dans la bataille de Kairouan en 741, les Barghwata se sont réfugiés dans le Tamesna (les plaines atlantiques entre Salé et Azemmur), où ils ont fondé leur dynastie. Ils ne constituent pas un groupe ethnique homogène, et Ibn Hawqal ainsi qu'Ibn Khaldun par la suite considèrent qu'ils font partie de la grande tribu de Masmuda.

 

Mais certains historiens pensent que le terme Barghwata n'est qu'une déformation phonétique du terme Barbati, un nom que portait Tarif, car il semblerait que ce dernier est originaire de la région de Rio de Barbate, en Espagne. Il est donc possible que les Banu Tarif aient adopté le terme Barghwata comme dérivation de Barbati, le fondateur de leur royaume, pour désigner leur nouvelle religion. Ce nom ne renvoie pas uniquement à une confédération tribale, ou à un royaume, il incarne surtout une secte religieuse, regroupant plusieurs tribus, adeptes d'une même confession.

La particularité curieuse de cette religion réside dans ce fait que les Barghwata ont cherché à travers leur doctrine une berbérisation radicale de l'Islam, en lui attribuant un aspect fondamentalement local. Ed. Michaux-Bellaire parle alors de cette berbérisation comme l'exemple « le plus frappant de la tendance des berbères à tout nationaliser à leur profit ».

En fait, c'est Salih, le fils de Tarif, et qui était aussi dans les armées de Maysara comme son père, qui se déclarait prophète, en prétendant être le « Salih Al Mouminin » dont un verset du Coran annonce la venue. Il compose alors un Coran en tamazight (berbère) comprenant quatre-vingt sourates qui portent les noms des prophètes et d'animaux. Il constitue également un code religieux très rigoureux prescrivant des interdictions alimentaires (des têtes des animaux, des œufs, des poissons non égorgés, ...). Mais ce code préconise aussi une vie ascétique et une austérité de mœurs, par la pratique de cinq prières par jour et autant la nuit, après des ablutions complètes. Et en plus du remplacement du jeûne du mois de Ramadan par celui de Rajab, les fidèles étaient aussi astreints d'observer de fréquents jeûnes hebdomadaires. Les règles de mariage sont également mises en place avec une polygamie sans limite et largement répondue, ainsi que l'interdiction des mariages avec les musulmans orthodoxes, assimilés aux infidèles.

Salih avait instauré cette doctrine originale tout en restant publiquement musulman pour des raisons de sécurité. Il part ensuite en Orient en laissant à son fils Ilyas la charge de prêcher la nouvelle religion. Mais c'est son petit fils Younus qui a pu donner une grande ampleur à la mission de ce grand père qu'il appelait War Yelli Wara (Celui après lequel il n'y a personne). Selon Al Bakri, il a en effet imposé cette nouvelle confession dès 841 par la persuasion et la force.

Par ailleurs, le livre saint des Barghwata est révélé dans la langue tamazight ainsi que les invocations répétées en tamazight après la prière publique, montrent que cette langue avait le statut de langue officielle dans leur royaume.

En tout cas, cette nouvelle doctrine religieuse apparaît comme un Kharijisme spécifique au Maghreb, intégrant à la fois la rigueur sofrite et ibadite et la tradition mahdite chiite. C'est une confession qui n'exprime pas une volonté de se libérer de l'emprise de l'Islam. C'est certes une façon de se démarquer des autres communautés. Mais pour ce peuple autochtone, cette nouvelle confession était avant tout une réplique réactionnaire contre une orientalisation imposée, afin de sauvegarder l'intégrité d'une berbérité indépendante.

Références

Charles-André. Julien, Histoire de l'Afrique du Nord des origines à 1894, Paris, Payot 1994.
G. Marçais, La Berbérie musulmane et l'Orient, Paris, 1948.
G. Camps, Les Berbères, mémoire et identité, Paris, Errances 1987.
Brahim Khalf El Aabidi, Les Barghwata au Maroc, Presse universitaire, Casablanca, 1983.

source


Monsieur Johadi Lhoucine, Professeur d'histoire dans un lycée de Casablanca, vient de terminer la traduction des 114 sourates du Coran en Tamazight. Enfin, le Coran sera à la portée de millions de Marocains, et autres Maghrébins de confession musulmane, dont Tamazight est la langue maternelle. Rien de plus normal, pourrait-on penser. Et pourtant, le Coran en Tamazight provoque quelques remous au sein de l’establishment religieux au Maroc, car en donnant aux Imazighens l'accès à la parole d’Allah dans leur langue, cette traduction risque de saper l’autorité des tenants de l’arabo-islamisme. 
Le Coran a été traduit en plus de 40 langues. La Turquie, le Pakistan, l'Indonésie et l'Iran ont tous leurs versions nationales, accompagnées de leurs interprétations. Imazighens eux, non! Au Xe siècle, le royaume des Barghwata traduisit son Coran en berbère. Mais les Barghwata furent vaincus par les "puritains" sunnites qui les accusèrent d'apostasie. ILs firent brûler toutes les copies du Coran berbère, dont il ne subsiste que des fragments, conservés dans des musées occidentaux. 

L’absence de Coran berbère aide à comprendre pourquoi le Maroc fait partie du monde arabe, contrairement à l'Iran ou à la Turquie, par exemple. Depuis que les Arabes ont islamisé l'Afrique du Nord, il y a mille quatre cents ans, une élite arabophone s’est imposée comme pouvoir d'interpréter la parole d'Allah. Et les autorités entendent bien voir cette situation perdurer. Des sources proches du ministère des Affaires islamiques affirment que la publication de ce Coran berbère sera probablement interdite. 

Au delà de la traduction du Coran en Tamazight, on assiste à un regain d’intérêt en ce qui concerne les Barghwata. En effet, les intellectuels berbères entendent redonner sa juste place au passé barghwata dans les livres d'histoire marocains. Cette année, on a vu paraître de nombreux ouvrages non seulement sur les Barghwata, mais aussi sur la culture berbère préislamique. On n’est donc pas étonné de voir l'opposition islamiste du Maroc, de plus en plus virulente, présenter ces intellectuels comme de nouveaux Barghwata et les qualifier eux aussi d'apostats. 

Qu’à cela ne tienne! De toutes les façons, si le terrain du débat change, la stratégie des islamistes reste elle constante. Tantôt ils accusent les militants berbères de reprendre à leur compte l'idéologie des anciens colonisateurs, tantôt ils leur reprochent d’être des apostats. Dans un cas comme dans l’autre, ces tenants du pouvoir veulent continuer à marginaliser le peuple, le vrai peuple marocain. Jouissant d'une bien plus grande influence politique que les militants berbères, ils réalisent à quel point leur supériorité numérique s’amenuise. Car la renaissance berbère est en marche et rien désormais ne l’arrêtera, tant la conscience de cette génération d’Imazighens est grande. Monsieur Aseed, Professeur à Rabat, souligne que "Dans les années 70, tout ce que nous voulions, c'était la parité avec l'arabe. Aujourd'hui, après trente ans sans changement, les extrémistes appellent à la suprématie de Tamazight. Le combat est engagé." 

Force est de constater que l'intransigeance et l’extrémisme des Islamistes mettent en péril la paix civile au Maroc, comme dans les pays voisins. Personne aujourd’hui ne peut nier que l’Afrique du Nord est Berbère et que l’arabe est une langue et culture venue d’ailleurs. Bien que des populations berbères entières aient été arabisées au cours du temps, il n’en reste pas moins que peu de Nord Africains peuvent prétendre être d’origine arabe. Gabriel Camps ne précise-t-il pas dans son formidable ouvrage “Les Berbères, mémoire et identité, Editions Errance” en parlant des Nord-africains qui se croient arabes : “Mais bien rares sont parmi eux ceux dont les veines charrient quelques gouttes de sang arabe, de ce sang nouveau apporté par les conquérants du VIIème siècle ou par les envahisseurs bédouins du XIème siècle: Beni Hilal, Beni Solaïm, et Mâqil, dont les effectifs n’atteignaient pas 200 000 personnes d’après les estimations les plus optimistes”. 

Malgré cet état de fait, la berbèrité des peuples du Maghreb a longtemps été reniée. Aujourd’hui, il  faut leur rendre leur vraie culture et leur vraie identité. Ils doivent accéder à leurs droits fondamentaux d’apprendre leur langue à l’école, de communiquer dans leur langue, de pratiquer leur religion dans cette langue, et de s’appeler Massinissa, Yughurten ou Noumidia. L’histoire des Imazighens est une belle illustration que les peuples ne peuvent être forcés à épouser une autre identité  que la leur. Ainsi, malgré le poids du temps, Imazighens n’ont d’arabe que la langue qui leur a été imposée. 

(Source: “The Economist”, 13 Février 99).

source

 


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28 février 2007 3 28 /02 /février /2007 12:45
Le printemps berbere

Désigne l'ensemble des manifestations réclamant l'officialisation de la langue tamazight et la reconnaissance de l'identité et de la langue berbère en Algérie à partir de mars 1980 en Kabylie et à Alger. Il s'agit du premier mouvement populaire d'opposition aux autorités depuis l'indépendance du pays en 1962.

Les causes 

Les berbérophones représentent de un quart à un tiers de la population algérienne. Depuis l'indépendance de ce pays, l'arabe succède au français comme langue officielle. La politique linguistique algérienne se traduit par une arabisation massive de l'administration et de l'enseignement.

La réflexion sur la situation linguistique est d'abord le fait d'intellectuels expatriés (Taos Amrouche, Mouloud Mammeri et des membres de l'Académie berbère).

À l'intérieur du pays, c'est en Kabylie que se trouve la plus importante concentration de berbérophones. L'université de Tizi-Ouzou, créée dans cette région en 1977, est un lieu d'échange, y compris sur le plan culturel. Comme ailleurs, l'organisation de débats et de concerts, ainsi que la représentation de pièces en langue berbère y sont soumises à autorisation — par ailleurs souvent refusées.

Les événements 
  • 10 mars 1980 : les responsables du Centre universitaire de Tizi Ouzou annulent une conférence de l'écrivain Mouloud Mammeri sur la poésie kabyle ancienne. Les personnes à l'origine de cette décision refusent de s'expliquer — il s'agirait d'un ordre émanant de l'État.
  • 7 avril : imposante manifestation à Alger. La répression est féroce et la journée se solde par une centaine d'arrestations, de nombreux blessés et peut-être un mort. D'autres rassemblements ont lieu dans plusieurs villes en Kabylie.
  • 7 avril : début de la grève à l'université de Tizi Ouzou.
  • 8 avril : une autre manifestation converge vers Alger, mais sans réactions violentes des forces de police.
  • 10 avril : grève générale en Kabylie. Le syndicat étudiant (UNJA) proche du gouvernement, dénonce des manifestants « téléguidés de l'extérieur ».
  • 17 avril : dans un discours, le président algérien Chadli Bendjedid déclare que l'Algérie est un pays « arabe, musulman, algérien », et que « la démocratie ne signifie pas l'anarchie ». Le même jour, les grévistes sont expulsés de l'hôpital de Tizi Ouzou et des locaux de la SONELEC.
  • 23 avril : l'université de Tizi Ouzou est prise d'assaut par les forces de l'ordre au cours de l'opération Mizrana.

Le mouvement se poursuit en faveur des 24 détenus (dont Saïd Saadi, Mouloud Lounaouci, Mustapha Bacha, Saïd Khelil, Djamel Zenati, Ali Brahimi , Salah Boukrif...) et parvient à les faire libérer au mois de juin.
Dès lors, le mouvement berbère tiens des assises au mois d'août lors du Séminaire de Yakouren. Il décide de capitaliser l'avancée de ses idées dans le corps social en multipliant les activités de terrain par la voie pacifique.

C'est ainsi que, dès la rentrée universitaire d'octobre 1980, chaque campus universitaire du centre du pays se dote d'un collectif culturel en charge de la promotion des activités culturelles berbères en milieu universitaire. Dès janvier 1981, de nombreux lycées suivent.
Théâtre, chansons engagées foisonnent et expriment un bouillonnement inattendu chez les descendants de l'« Eternel Jughurta ». Mais c'est le succès considérable des "cours sauvages de berbère" animés par Salem Chaker à la Faculté Centrale d'Alger et par Mustapha Benkhemou à l'Université de Bab Ezzouar et dans les Instituts de Boumerdès qui pousse les autorités algériennes à mettre le holà.
Une grossière provocation policière est le prétexte à l'arrestation de 22 étudiants dont 3 récidivistes (Arezki Aït Larbi, Mustapha Bacha et Salah Boukrif), ainsi que Mustapha Benkhemou et Abderrezzak Hamouda (le fils du glorieux Colonel Si El Houas) de M'chounech dans les Aurès.

Les conséquences 

Politiquement, le Printemps berbère est le premier mouvement populaire spontané. Il ouvre la voie à une remise en cause du régime algérien. Ces émeutes préfigurent celles de Constantine en 1986 et d'Alger en 1988.

Sur le plan social, le mouvement traduit l'émergence d'une génération d'intellectuels engagés dans le combat démocratique (Tahar Djaout, Ferhat...).

Sur le plan culturel, le Printemps berbère brise le tabou linguistique et culturel : il est la traduction d'une remise en cause de l'arabisation intensive de l'administration au détriment du berbère. Cette prise de conscience identitaire a également touché le Maroc voisin, où ces événements sont commémorés chaque année par les étudiants berbérophones.

 

source: wikipedia.org


-  Dossier "Tafsut n Imazighen"

-  Chronologie des évènements d’avril 1980 en Kabylie


source: tamazgha.fr


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31 janvier 2007 3 31 /01 /janvier /2007 10:35
  A  LA  DECOUVERTE  DES  JUIFS  BERBERES

de Daniel Schroeter

        
 





Parmi les travaux et domaines d’études concernant le passé des Juifs marocains, l’histoire des Juifs dans les régions à dominance berbère occupe une très faible place. Cela provient en partie de la nature fragmentaire des sources historiques provenant des zones rurales du pays .

Comparée à la documentation sur les Juifs parlant arabe, vivant dans les régions urbaines du Maroc et qui ont produit un nombre considérable d’écrits, les données historiques sur la vie des Juifs berbères ou vivant parmi les Berbères, avant la période coloniale, sont très éparses, presque toujours de seconde main, et sont souvent basées sur des mythes d’origines et des légendes. Les voyageurs étrangers en visite au Maroc dans la période pré-coloniale, qui ont établi, quoique de façon inexacte, les listes des tribus et des " races " du pays ont rarement fait la distinction entre Juifs berbérophones et Juifs arabophones [2]. Les Juifs ont été considérés comme une catégorie à part, aux côtés des Maures ou Andalous, des Arabes, des Berbères et shleuh. Peu d’Européens ont voyagé à l’intérieur du Maroc avant le XXe siècle, et ceux qui le firent, comme John Davidson (qui fut tué) en rapportèrent des informations peu fiables. James Richardson, un militant anti-esclavagiste britannique, qui a visité le Maroc en 1840, a poussé plus loin les observations de Davidson ; il a été le premier à désigner les Juifs de l’Atlas comme des " juifs shelouh ", parlant berbère et dont les coutumes et caractéristiques étaient les mêmes que celles de leurs voisins non-juifs [3].

Cette référence aux Juifs berbères est, cependant, encore très inhabituelle et de fait, elle n’a pas donné lieu à des hypothèses hasardeuses sur les origines berbères des Juifs. D’après la plupart des visiteurs européens du XIXe siècle, les communautés juives elles-mêmes se revendiquent fermement comme descendant des Juifs de l’Ancien Israël. Les seules distinctions qu’on y trouve sont celles relatives aux clivages entre Juifs espagnols et Juifs autochtones, un clivage que les Juifs du Maroc eux-mêmes mentionnent par les termes " d’expulsés " et de " résidents " (megorashim et toshavim).

A la fin du XIXe et au XXe siècles, les voyageurs et ethnographes " découvrent " un grand nombre de communautés dispersées et donnent de ces Juifs vivant parmi les Berbères une image totalement différente de celle des communautés juives des régions urbaines. Sous le protectorat français, l’image des Juifs berbères va être définitivement établie conformément aux études qui leur seront consacrées par l’ethnographie coloniale, ainsi que par les hommes de l’Alliance israélite universelle. Enfin, la société israélienne va y ajouter sa touche, reflétant l’apport sioniste et le développement de stéréotypes à l’égard des Juifs marocains, dont la plupart ont immigré en Israël entre 1950 et 1960.

Mon propos concerne la façon dont a été formulée la perception des relations judéo-berbères aux XIXe et XXe siècles en me référant tout particulièrement à la documentation sur les Juifs d’Iligh, une communauté qui vivait avec les Berbères dans une région de langue tashelhit, du Sous [4].




La découverte des Juifs berbères

L’intérêt des Européens pour les Juifs des régions apparemment " éloignées " du monde n’est pas une invention du XIXe siècle ; ce qui est nouveau, c’est la signification conférée à cet intérêt. La recherche sur les tribus perdues n’est plus motivée uniquement par des considérations d’ordre messianique, car à l’ère du colonialisme triomphant, la recherche ethnographique sur les communautés lointaines d’Orient est devenue un moyen de gouvernement.

De plus, pour les Juifs européens, la découverte de coreligionnaires primitifs n’évoque pas seulement le souvenir des tribus perdues mais leur révèle aussi d’anciennes coutumes disparues, à un moment où eux-mêmes commencent à se considérer comme une nation et se tournent vers les terres bibliques du Levant pour restaurer la souveraineté juive [5].


Au début du XXe siècle, l’orientaliste et hébraïsant Nahum Slouschz parcourut l’Afrique du Nord pour y étudier les origines et l’histoire des communautés juives. Il a été le premier à étudier sérieusement l’histoire des communautés vivant dans les régions intérieures du Maghreb. Slouschz croyait que pendant les siècles qui ont précédé l’expansion arabe en Afrique du Nord, les Juifs, originaires de Palestine, se sont répandus parmi la population berbère et en sont devenus un élément dominant [6]. Durant l’époque coloniale, ses opinions sur les origines berbères des Juifs vont avoir force de loi [7]. En 1906, Slouschz fut envoyé en mission au Maroc par la Mission scientifique du Maroc, grâce à ses relations avec son directeur, Le Chatelier [8]. La mission, parrainée par le Comité de l’Afrique française, a publié les premiers travaux importants sur la société marocaine. Slouschz faisait partie de ce cercle et ses idées influencèrent largement la vision française du judaïsme marocain. Après l’établissement du protectorat français, il retourna au Maroc et fut chargé par les autorités coloniales d’étudier les communautés juives et de soumettre ses conclusions au Résident-Général Lyautey en vue de leur réorganisation. Slouschz était sioniste et, en tant que tel, voulut " régénérer " le judaïsme marocain et réveiller sa conscience nationale juive. C’est en partie à cause de ses idées sionistes que les autorités françaises décidèrent de le relever de ses fonctions officielles [9].

Les tendances sionistes de Slouschz et ses efforts pour découvrir le passé juif berbère pré-arabe du Maroc procédaient d’une vision très cohérente. La population juive urbaine des grandes villes arabes du Maroc était très attachée à ses savants autant qu’à ses traditions. Pour Slouschz, ce sont les Juifs descendant des Berbères (comme il le croyait), avec leurs manières primitives et pénétrées d’influences locales, qui représentent les " vrais " Juifs nord-africains

" maintenant que l’Afrique est entrée également sous l’égide de l’influence occidentale ", écrit-il, " la pénétration de la civilisation française et l’émancipation de nos frères de Tunisie et du Maroc, suivant en cela l’exemple des Juifs algériens, vont faire disparaître le caractère spécifique du juif africain. Comme c’est déjà le cas dans les grandes villes françaises d’Afrique, les changements sociaux ont eu un effet radical sur les masses de la population, qui perdent rapidement leur individualité et leurs traditions millénaires [10] ".

Une fois ces coutumes abandonnées, grâce aux bienfaits de l’éducation occidentale, le judaïsme marocain aura-t-il une autre alternative que celle de rejoindre la nation juive moderne ?

C’est H. Z. Hirschberg qui le premier a mis en doute la thèse admise – établie d’abord par Slouschz et adoptée ensuite par de nombreux chercheurs de l’époque coloniale – selon laquelle les Juifs d’Afrique du Nord descendraient des tribus berbères converties au judaïsme dans 1’Antiquité. Hirschberg étudia systématiquement les traditions anciennes et parvint à la conclusion qu’il y a peu de preuves confirmant la thèse des Berbères judaïsés. D’après lui, la plupart des communautés se formèrent beaucoup plus tard, grâce à l’arrivée de commerçants juifs à l’intérieur du pays. Bien qu’il n’exclut pas qu’il ait pu exister des Berbères judaïsés, Hirschberg est sceptique quant à l’importance de ce phénomène [11]. Dans une étude récente basée sur des données linguistiques et ethnographiques importantes, Paul Wexler a réexaminé cette question, pour aboutir à la conclusion que la grande majorité des Juifs sépharades descendraient d’habitants d’Afrique du Nord convertis au judaïsme et installés en Espagne12. Si l’hypothèse de Wexler était exacte, il en découlerait que la plupart des Juifs marocains (toshavim comme megorashim) descendraient de Berbères convertis.

Les rares preuves contemporaines de l’existence de communautés juives en Afrique du Nord à l’époque pré-islamique ne permettent pas d’affirmer avec assurance l’importance démographique et culturelle du judaïsme parmi les Berbères. La première source historique évoquant des tribus juives berbères date du XIVe siècle. C’est le Kitab al-cibar d’Ibn Khaldoun [13]. Certes il y a également de nombreuses légendes locales sur les Juifs berbères au Sud marocain préislamique. Jacques Meunié, par exemple, est convaincu de l’authenticité de ces traditions et légendes, même si nombre d’entre elles n’ont été consignées que récemment [14]. Quelle que soit notre opinion au sujet de la conversion des tribus berbères au judaïsme dans l’Antiquité, on peut affirmer que des mythes sur les Juifs berbères ont existé au Moyen Age et que ces mythes concernaient également l’origine des Berbères dans leur ensemble. Ces mythes ont été élaborés afin de légitimer le pouvoir mérinide au XIVe siècle [15], avant d’être reformulés durant la période coloniale. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme parmi les Berbères à l’époque pré-islamique a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères des Arabes. Comme l’écrit Jacques Meunié : " malgré la précarité des indications que nous possédons sur l’extension ancienne du christianisme et du judaïsme dans le Sud marocain, [ces traditions] méritent cependant d’être retenues parce qu’elles peuvent aider à connaître les divers éléments de populations berbères et leurs usages anté-islamiques, au cours de siècles plus récents, et même jusqu’à l’époque actuelle [16] ".

 


Exhumer les séquelles du passé berbère judéo-chrétien est un moyen parmi d’autres visant à justifier le régime colonial au Maroc.





Les études sur le Maroc des premières années du Protectorat français soulignent les différences existant entre les régions contrôlées par le Makhzen et les régions non soumises au contrôle du gouvernement central : bilad al makhzen / bilad al-siba. Considérée comme une division entre Arabes et Berbères, cette perception prédominante de la société marocaine développée par les ethnographes coloniaux et perpétuée – largement – par l’ethnographie post-coloniale, a été sérieusement remise en question [17]. Peu d’attention a été accordée à la façon dont ce dualisme simpliste entre makhzen et al-siba a influencé les débats sur le judaïsme marocain.

L’affirmation selon laquelle les relations judéo-berbères étaient complètement différentes des relations arabo-juives est liée de très près à cette vision d’une dichotomie entre makhzen et siba. On cite en exemple la protection efficace des commerçants juifs par les chefs tribaux, ou les patrons berbères, au point de les rendre intouchables. " Tout juif de bilad al-siba appartient corps et biens à son seigneur, son sid ", écrit Charles de Foucauld, dont les relations avec les communautés juives du Maroc font partie du corpus historique sur le judaïsme marocain [18]. Bien que le Juif soit protégé, Foucauld le décrit comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartiennent au bilad al-siba, les Juifs se doivent d’obtenir la protection de chefs locaux et indépendants du Sultan. Slouschz considère la situation des Juifs du bilad al-siba à la manière de Foucauld : " à Tililit commence, pour les Juifs, le pays du servage, on pourrait même dire de l’esclavage. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaid, qui a droit de vie et de mort sur ses sujets. Il peut les tuer en toute impunité, il peut les vendre si tel est son désir... En échange de la perte de tous ses droits, le juif jouit de la sécurité, que le maître lui assure au risque de sa propre vie... Un Juif qui veut se marier doit acheter sa future femme au sid auquel appartient le père de la fille et qui est l’unique maître de son destin [19] ".

Alors que certains écrivains de la période coloniale considèrent la vie des Juifs dans les territoires berbères comme plus difficile que dans les régions citadines arabophones, d’autres au contraire, influencés par la thèse développée par l’ethnographie coloniale selon laquelle les Berbères étaient plus libres, plus démocrates et plus indépendants que les Arabes, qualifient la condition des Juifs dans les régions berbères de " meilleure " que parmi les Arabes. Cette idée avait des précurseurs depuis la première moitié du XIXe siècle. D’après Davidson, par exemple, les Juifs du Sous et du Rif étaient la " propriété des Maures ", mais " ils bénéficiaient néanmoins d’une plus grande liberté qu’à Tanger [20] ". De plus, d’après Davidson " les Juifs de l’Atlas sont de loin supérieurs, physiquement et moralement à leurs frères résidant au sein des Maures. Leurs familles sont nombreuses, et chacune d’elles est sous la protection immédiate d’un Berbère (les habitants originels d’Afrique du Nord), d’un patron, ou d’un seigneur. Ils ont par ailleurs leur propre sheikh, un juif, à la décision duquel tous les cas sont soumis. À la différence des Juifs résidant parmi les Maures, qui sont soumis à la loi musulmane, ils ne vivent pas dans le même état d’avilissement ou de servitude ; ils développent des relations de type patron/client [avec leurs voisins], tous ont les mêmes privilèges, et le Berbère est tenu de défendre la cause du juif en cas d’urgence. Ils disposent d’armes, et servent leurs patrons à tour de rôle [21] ".

 




 

En un lieu indéfini au sud de l’Atlas que Davidson n’a pas pu atteindre durant son voyage, on rapporte que 3 000 à 4 000 Juifs " vivent en toute liberté, et pratiquent tous les métiers ; ils possèdent des mines et des carrières qu’ils exploitent, ont de grands jardins et d’immenses vignobles, et cultivent plus de maïs qu’ils ne peuvent en consommer ; ils disposent de leur propre forme de gouvernement, et possèdent leurs terres depuis l’époque de Salomon [22] ". Faisant sien le point de vue de Davidson, Richardson y ajoute que les pratiques religieuses de ces Juifs, datent de l’époque pré-exilique, et de ce fait " ils redisposent les parties du Pentateuque et de la Torah dans le même ordre que celui de l’ensemble des Juifs ". Vivant isolés, ils considèrent leurs frères des autres parties du Maroc comme des hérétiques [23]. Les Juifs de l’Atlas jouissent d’une " quasi indépendance vis-à-vis de l’autorité impériale ", comme leurs voisins berbères. De plus, ces Juifs " possèdent toutes les caractéristiques des montagnards... ils portent le même costume qu’eux, et on ne peut pas les distinguer [de leurs voisins musulmans [24]]".

L’une des raisons pour lesquelles certains écrivains de la période coloniale considéraient la situation des Juifs parmi les Berbères comme meilleure que parmi les Arabes venait de l’idée que les Juifs étaient totalement intégrés à la société berbère, partageant nombre de coutumes de leurs voisins musulmans. On considérait que les Juifs du Haut-Atlas, par exemple, vivaient en paix et en symbiose avec les Musulmans [25]. Les chercheurs contemporains se sont appuyés souvent sur la littérature ethnographique coloniale pour décrire les relations entre Musulmans et Juifs dans l’intérieur du pays. Malheureusement peu de Juifs originaires des zones berbères ont été interrogés sur leur expérience. Aussi loin que l’on remonterait, on découvrirait sans doute une variété d’expériences que l’on ne saurait ramener à une simple dichotomie arabo-berbère ou à un clivage entre zones citadines et rurales. Les sources dont nous disposons sur les relations entre Musulmans et Juifs à Iligh pendant la période pré-coloniale offrent à cet égard une image très contrastée de ces relations.

Les sources provenant d’Iligh montrent que la communauté juive de cette localité, aussi bien que la communauté voisine d’Ifran, étaient étroitement liées au chef de la puissante famille du Sharif de la famille Abu Dami’a. Les signatures et parfois les déclarations en judéo-arabe des Juifs d’Iligh et d’Ifran quand ils recevaient des acomptes du Shanf ou quand ce dernier leur payait ses dettes, sont consignées dans deux livres de comptes appartenant à Husayn b. Hashim [26]. Les Juifs d’Iligh, qui voyageaient souvent à Essaouira pour leur commerce, étaient considérés comme des protégés du Sharif. S’ils étaient dévalisés ou tués, le Sharif punissait en représailles la localité à laquelle appartenaient les criminels. Parallèlement, le Sultan étendait sa protection à ses tujjar qui voyageaient à Iligh pour le commerce ou pour recouvrer leurs dettes. Les Juifs entretenaient avec les puissants chefs d’Iligh des relations comparables à celles des Juifs du Sultan. Dans un rapport envoyé d’Essaouira (Mogador) à l’A.l.U, en 1874, par Abraham Corcos il y est relaté que les Juifs d’Iligh considéraient le Sharif comme tout puissant. " Étant donné que ce gouverneur... n’est pas soumis à l’autorité de notre roi du Maroc, tout est objet de prières et de suppliques [27] ". Ce qui y était en cause cependant n’était pas l’oppression du Sharif, mais celle dont la responsabilité en incombait à leur propre Shaykh (Nagid en hébreu) qui était fondé de pouvoir du Sharif. Le Nagid Mas’ud b. Bokha, est décrit comme étant " une personne non civilisée et inculte, qui soutire d’eux (les Juifs d’Iligh) des amendes pour rien ou pour les moindres choses [28] ". Nous y apprenons également que ce personnage même, Mas’ud b. Bokha avait des relations d’affaires étroites avec le Sharif Husayn b. Hashim [29]. Ce qui compte ici, c’est le fait qu’un appel ait été fait à Essaouira, en parfaite connaissance de l’influence exercée par l’Alliance israélite universelle. Sachant l’indépendance virtuelle du Sharif Husayn, les Juifs d’Iligh avaient compris que ce n’était pas au Sultan qu’ils pouvaient demander assistance. Mais vue l’interdépendance économique entre Iligh et Essaouira, c’est par le truchement des Corcos et de l’Alliance qu’ils avaient cru obtenir l’intervention du Sharif contre le Nagid.


Le colonialisme et la question judéo-berbère

La politique coloniale française à l’égard des Berbères, telle qu’elle a été développée sous Lyautey avant d’atteindre son point culminant en 1930, avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes, reposait sur plusieurs stéréotypes. En premier lieu, celui de la résistance des Berbères indigènes du Maroc aux Arabes puis à toute forme d’autorité centrale, préservant jalousement leur liberté, leur individualisme et leurs institutions démocratiques. Deuxièmement, les Berbères n’auraient adopté que superficiellement l’Islam, conservant intactes ou presque leurs coutumes, leurs croyances et leurs superstitions pré-islamiques. Par conséquent, ils auraient résisté à l’application de la Sharia, maintenant farouchement leurs lois coutumières. Faute de respecter l’autorité suprême du Amir al-Mu’minin, les Berbères auraient " produit " leurs propres chefs marabouts. Le culte des saints, répandu chez les Berbères, serait le vestige d’une pratique pré-islamique. Fortement influencées par ces idées, les autorités françaises ont cru que les anciennes zones siba pourraient être assimilées à la culture française afin d’empêcher les progrès de l’arabisation [36].

Ces stéréotypes sur les Berbères furent d’une certaine façon reproduits à l’égard des Juifs vivant parmi les Berbères dont l’histoire, selon Slouschz, ne serait " que la quintessence de l’histoire des Berbères ". D’après lui, c’est " dans le blad es-siba, dans les qsour algériens et tripolitains, demeurés jusqu’ici inaccessible à l’infiltration européenne, qu’on peut retrouver le Judéo-Berbère dans un état à peu près semblable à celui des maghrabia tels que nous les représentent les littératures juives et arabe du Moyen Age ". A l’exemple de la population berbère musulmane qui est superficiellement islamisée, ces Juifs berbères primitifs " du judaïsme ne connaissent presque rien ". Là où il y a des saints judéo-berbères pré-islamiques, on trouve ces populations anciennes [37]. Slouschz se fait l’écho du discours colonial sur les Berbères, quand il écrit que les Juifs de l’Atlas font montre " d’une bonne dose de liberté [38] ". La dichotomie excessive entre makhzen et siba, élaborée pendant la période coloniale, est reproduite par Slouschz les Juifs du bilad al-makhzen reçoivent la protection royale de la dhimma, alors que ceux du bilad al-siba reçoivent celle de Sayyid individuels. Ces stéréotypes attachés aux Juifs vivant parmi les Berbères ont perduré pendant toute la période coloniale, pour devenir partie intégrante des idées reçues sur le Maroc traditionnel que l’on rencontre reproduites dans de nombreux ouvrages.

Toutefois il ne s’agissait pas seulement de représentations de l’Autre telles qu’elles avaient cours chez les Européens. Les Juifs marocains eux-mêmes ont fini par intérioriser ces stéréotypes, en particulier ceux d’entre eux ayant reçu une éducation française. Les Juifs du Haut-Atlas, du Sous et du Sahara – régions que les Français ont mis du temps à contrôler – étaient considérés par les Juifs marocains des villes comme des marginaux. Le mythe des Juifs berbères répercuté par les maîtres de l’Alliance et par les chercheurs français était devenu la réalité pour les Juifs marocains eux-mêmes. Dans l’étude la plus détaillée sur les conditions de vie des Juifs du Sud marocain, publiée peu après l’indépendance et basée essentiellement sur les informations fournies par les directeurs des écoles de l’Alliance, Pierre Flamand explique comment la " mentalité " des Juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. D’après lui, les Juifs appelés Shleuh sont faciles à identifier du fait de leurs noms, de leurs traits physiques et leur mode de comportement qui leur sont très typiques : leurs coreligionnaires d’autres extractions reconnaissent les Juifs dits shleuh à leurs patronymes : Abergel, Abouzaglo, Amoch, Assouline, Chriqui, Harrus, Oiknine, etc., et à quelques traits physiologiques et caractériels sommaires : larges épaules, fortes poitrines, yeux vifs dans des visages à traits fermes et droits, esprit d’entreprise, acceptation de rudes besognes [39].

L’épithète utilisé par les Juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués, " fils de shleuh " avait une connotation péjorative. Répercutée chez Flamand cette image stéréotypique des Juifs ruraux s’est transportée en Israël par les immigrants juifs du Maroc et le terme shleuh est devenu synonyme de simplet en argot israélien.

Déjà à l’époque pré-coloniale, la migration des Juifs ruraux vers les villes a produit des clivages entre Judéo-berbères et Judéo-arabes. A Essaouira et à Marrakech, les Juifs " autochtones " se distinguaient de leurs coreligionnaires ruraux. Cependant une fois installés en ville, les Juifs berbères s’arabisaient et s’adaptaient à un environnement urbain plus civilisé [40]. Ce processus s’intensifia à l’époque coloniale, mais un certain nombre de Juifs vécurent dans leur région d’origine jusqu’à leur départ en Israël [41]. Par conséquent, les porte-parole de l’urbanisation et du progrès établirent une division hiérarchique entre les différents types de Juifs marocains que l’on retrouve souvent chez Slouschz et ses émules postérieurs. Ces différents types seraient les suivants Juifs hispanophones, à Tanger et dans les régions du Nord ; Juifs parlant français et arabe, sur la côte et dans les villes de l’intérieur ; groupe arabo-berbère du centre du pays ; groupe arabe et shleuh du sud ; Juifs arabophones du Sahara [42]. Les classifications postérieures adoptées par les chantres de l’occidentalisation, comme l’Alliance, ramenèrent ces divisions à quatre catégories essentielles hispanophones, francophones occidentalisés, arabophones et berbérophones.

Les divisions sociales, suivant le schéma tracé par Slouschz, correspondaient aux divisions entre : makhzen et siba, monde urbain / monde rural. Cette vision simpliste devait influencer un bon nombre de chercheurs ayant travaillé sur les Juifs marocains durant le Protectorat français [43]. Inventée ou réelle, elle influença pareillement la politique de l’organisation qui a marqué le plus la vie des Juifs marocains pendant le protectorat français : l’A.I.U et ses écoles qui distinguèrent entre les Juifs du bled, comme on appelait les Marocains ruraux, et ceux de la ville. Ces stéréotypes ont été intériorisés par les Juifs marocains eux-mêmes, qui considéraient les Juifs des régions parlant tashelhit spécialement ceux des montagnes de l’Atlas, comme des Shleuh primitifs, bien que ceux-ci aient eu généralement des conditions de vie plus saines que celle de leurs frères des mellah urbains. Pendant la période du Protectorat, des tensions très vives entre les différentes couches de la population, accompagnèrent l’arrivée de nombreux Juifs ruraux originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Ce qui fit dire, en 1940, à un observateur vivant à Marrakech que les Juifs " étrangers ", d’origine espagnole qui étaient mieux éduqués, furent submergés par les Juifs berbères. Ces Juifs ruraux, pensait-on, " ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif approprié à leur mentalité. La culture de la Torah, l’observation de quelques rites extérieurs, l’aumône au rabbin de Palestine, le mépris et l’hostilité des populations qui l’entourent tels étaient les seuls liens qui les rattachaient à la famille d’Israël ". Ces Juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs. Mais " de ces origines surtout rustiques et montagnardes, le juif marrakchi semble avoir gardé quelque chose de farouche et de têtu. Parmi ces coreligionnaires marocains, c’est lui qui se rattache aujourd’hui avec le plus de force aux coutumes de ses ancêtres [45] ". Flamand, qui reprenait les idées de ses informateurs de l’Alliance, considérait que les traditions religieuses des Juifs du Sud avaient été contaminées par des influences " orientales ", déformées par un isolement millénaire des grands centres du judaïsme mondial, assimilant et intégrant concepts et symboles de l’Islam, ainsi que toutes sortes de rites païens tirant leurs sources d’un animisme agraire chargé de pratiques superstitieuses. Les Juifs restés dans les régions berbères, de plus en plus isolés du reste du pays au fur et à mesure que s’intensifiait l’urbanisation, étaient plus marginalisés encore, et cela d’autant plus que l’émigration les privait de leurs meilleurs éléments [47]. Le fossé entre ceux qui restaient dans les campagnes, parmi les Berbères, et ceux vivant en ville était plus profond que jamais : " entre le Juif espagnol ou oriental lettré érudit, urbain et le Juif berbère, fruste, primitif, attaché à son sol, l’opposition est saisissante [48] ".
Ainsi, l’image du Juif berbère, " isolé du monde civilisé [49] ", descendant des tribus berbères autochtones et maintenant des coutumes primitives était parfaitement acceptée par la société coloniale. L’idée de trouver des Juifs shleuh a guidé initialement mes recherches dans le Sous. Une des questions à laquelle je voulais répondre était de savoir jusqu’à quel point les Juifs de l’Atlas et de l’Anti-Atlas utilisaient le berbère dans l’enseignement pour expliquer et traduire les textes religieux, ou pour réciter certaines prières seulement [50]. La question fut posée déjà par Galand et Zafrani avec la publication de la Haggada de Pessah de la communauté juive de Tinrhir, basée sur un texte oral en tamazight. Cette Haggada berbère a toutefois soulevé plus de questions qu’elle n’a apporté de réponses. Le paysage linguistique de la communauté juive, comme le souligne Zafrani, n’est pas net. La question de l’usage du berbère par cette communauté et par d’autres communautés judéo-berbères à des fins liturgiques est loin d’être élucidée.

Certaines preuves linguistiques semblent démontrer l’existence, au XXe siècle, de communautés juives éparses berbérophones. Certains chercheurs estiment que ce phénomène était beaucoup plus étendu que je ne le considérais moi-même. Des recherches récentes effectuées en Israël parmi les Juifs originaires de régions berbérophones m’ont confirmé cependant que très peu de communautés parlaient berbère à la maison avant la seconde guerre mondiale [51]. Peu d’observateurs des périodes antérieures se sont penchés sur la géographie linguistique juive du Maroc rural. Exception faite de Foucauld qui affirme : " les Israélites du Maroc parlent l’arabe. Dans les contrées où le tamazight est en usage, ils le savent aussi ; en certains points le tamazight leur est plus familier que l’arabe, mais nulle part ce dernier idiome ne leur est inconnu [52] ". Foucauld se réfère-t-il aux deux dialectes du Moyen-Atlas, le tamazight et le tashelhit ? Ce n’est pas clair. Mais ses observations datant de la fin du XIXe siècle, selon lesquelles la plupart des Juifs des régions berbérophones connaissaient aussi bien le berbère que l’arabe et que dans certains endroits le berbère était mieux connu que l’arabe, semblent plausibles. Il s’avère par ailleurs que nombre de communautés importantes du Sous et du Haut-Atlas étaient arabophones même si la plupart des Juifs y parlaient aussi le berbère [53].
C’était le cas d’Iligh dont les habitants juifs parlaient l’arabe. Bien qu’on connaisse mal leur passé lointain, les documents écrits montrent que le judéo-arabe était leur langue de culture, du moins depuis le début du XIXe siècle. L’hébreu aussi était connu de l’élite culturelle, mais il n’y a nulle part trace du judéo-berbère, ni dans les textes écrits, ni dans la tradition orale. On n’a retrouvé aucune tradition indiquant que le berbère était utilisé dans l’enseignement, dans la lecture de textes religieux ou dans la récitation des prières.

S’agissant encore de la communauté juive d’Iligh, ce qui est frappant dans son histoire relativement courte – moins de 400 ans – c’est son cosmopolitisme et son ouverture relative sur le monde. Ainsi, ses habitants eurent vent, au début du XVIIe siècle, de l’avènement de Shabtai Tzvi [54].

Iligh fut détruite par Moulay Rashid en 1670, mais retrouva sa position politique à la fin du XVIIIe siècle sous Sidi Hashim. En 1815, Sidi Hashim est ainsi décrit : " un homme entre 50 et 60 ans, possédant une grande richesse et un grand pouvoir ; il est très rusé et très brave mais rapace et cruel ; il a sous ses ordres 15 000 cavaliers des mieux armés... Toutes les caravanes qui traversent le désert... jugent nécessaire de s’assurer son amitié et sa protection par des présents. Entre ce chef et l’empereur du Maroc existent la plus implacable des haines et une jalousie continuelle qui, il y a quelques années, a éclaté en guerre ouverte [55] ". Assurément le chiffre de 15 000 soldats est exagéré, car un marin naufragé qui fut détenu pendant un certain temps dans l’Oued Noun parle de 600 Arabes " montés " seulement sillonnant le pays [56]. Mais les observateurs contemporains évoquent la puissance politique d’Hashim et le rôle prépondérant d’Iligh dans le commerce transsaharien. Grâce à ses commerçants juifs, Iligh était reliée à l’Europe par le port d’Essaouira [57]. Il n’y avait pas que les marchandises et les commerçants qui arrivaient du littoral à lligh. Des émissaires de Palestine, comme Haim Joseph Masliah, en 1817, passèrent également par Iligh [58], ainsi que des marins européens naufragés sur la côte et tenus en otage à Iligh. Grâce à leurs relations avec le port d’Essaouira, les Juifs d’Iligh servaient d’intermédiaires pour le rachat et la restitution de ces captifs aux consulats européens installés dans cette ville [59].

Avec le déclin du commerce transsaharien et la ruine d’Essaouira comme port international à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, Iligh cessa d’être un centre de commerce international. Ceci porta atteinte à la communauté juive locale dont les relations avec le monde extérieur s’amenuisèrent. Cette situation s’aggrava davantage encore pendant la période coloniale et jusqu’à la seconde Guerre mondiale. Après la guerre, l’Alliance commença à développer son réseau des " écoles de bled ". Dans l’optique de ses dirigeants, cette expansion à l’intérieur du " vrai bled " devait englober les " villages isolés des vallées de l’Atlas, du grand Sud et des oasis pré-sahariennes [60] ". C’est donc vers la fin du Protectorat français qu’Iligh devait attirer l’attention de l’Alliance qui y créa sa première école en 1954 [61], aussitôt fermée avec le départ de la communauté quelques années plus tard. Pour marquer l’ouverture de l’école, on tourna un film : " Ils seront des hommes ". Lors de la projection du film, Jules Brunschvig, le vice-président de l’Alliance, proclama : " l’École tirera ces populations de leur misère [62] ". Un délégué de l’Alliance, en visite à Iligh, mentionna l’école comme " ’héroïne si l’on peut dire, du récent film de l’Alliance, et qui le mérite si bien [63] ". Toutefois, après l’indépendance du Maroc, l’idée de perpétuer les communautés juives des petits mellah du Sud marocain fut rapidement abandonnée, les dirigeants du judaïsme marocain ne pouvant faire grand-chose pour relever ces communautés rurales du Sud, pensant que celles-ci seraient mieux en Israël. " J’ai vidé les mellah ", me dit un membre important de la communauté en 1981.

ligh était considérée comme éloignée du monde civilisé tant par les Juifs urbains que par l’Alliance. Sa communauté qui s’installa en Israël, entre la fin des années 1950 et le début des années 1960, n’était pas aussi éloignée du monde juif, comme les hommes de l’Alliance se l’imaginaient. Mais avant leur départ, les Juifs d’lligh ont enterré dans la vieille synagogue de leur localité une Geniza que j’ai fouillée en 1981. Malheureusement, presque tout son contenu était en décomposition à cause de l’humidité du sol. Il en restait quelques fragments datant de la période précédant le départ des Juifs. Des textes religieux, des livres de prières ainsi que des fragments de lettres et de livres de comptes en judéo-arabe. Certains fragments révélaient que quelques livres de prières en usage à lligh avaient été publiés en Pologne. Contrairement à l’idée prévalant en Israël, selon laquelle les Juifs de cette contrée étaient totalement ignorants du sionisme politique, la Geniza d’lligh nous a apporté la preuve de la diffusion de textes hébreux modernes et de pamphlets sionistes.

La recherche sur les Juifs vivant parmi les Berbères reste encore à faire et nous sommes conscients des lacunes qui restent à combler. Ce que j’ai essayé de montrer dans cette étude est que notre savoir sur les Juifs ruraux du Maroc reste largement tributaire des stéréotypes sur le Juif berbère, stéréotypes acceptés aussi bien par le colonisateur et que par les colonisés – reflétant les divisions internes existant au sein des communautés juives du Maroc sous le protectorat. Ces divisions ont été entretenues en Israël du fait de la pérennité des mythes concernant les Juifs berbères.

Source: darnna.com
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5 juin 2006 1 05 /06 /juin /2006 13:21

Culture amazighe : Histoire.

Sommaire

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Les origines.

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La préhistoire.

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Période ancienne.

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L'antiquité.

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Chrétiens et barbares.

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La période musulmane.

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La colonisation française.

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Bibliographie.

Les origines.

Quelles sont les origines des Imazighen ?

La préhistoire.

  • Le peuplement de l'Afrique du Nord et du Sahara est très ancien. Vous trouverez ici des textes sur la préhistoire, de l'australopithèque au néolithique.

  • Vous trouverez d'abord une Introduction à cette période.

  • L'Afrique du Nord et le Sahara sont occupés pratiquement depuis le début de l'humanité.

    • Les premiers furent des australopithèques. Leurs ont succédé  des pithécanthropes et des néandertaliens. Vous trouverez des éléments sur eux sous le lien : les premiers occupants

    • La fin de néandertalien est surprenante en Afrique du Nord : on trouve une transition étrange avec l'Homo Sapiens . Ce sont les    Ibéro-Maurusien et  les Mechtoides.

    • Une dernière civilisation a eu une très grande importance : les Capsiens. Elle est considérée comme étant à l'origine de la civilisation amazighe.

  • Le néolithique fut en Afrique du Nord comme partout une véritable révolution.

   Période ancienne.

On ne sait que peu de choses sur la période qui va de la fin de la préhistoire à l'antiquité. Vous trouverez dans les pages suivantes quelques éléments.

L'antiquité

  • Les premiers témoignages que nous possédons des Imazighen sous l'antiquité sont dus aux Egyptiens. Vous les trouverez dans la page : Les débuts de l'histoire antique.

  • On sait aussi qu'ils furent en contact avec Carthage. Leurs royaumes vont se trouver impliquer dans les guerres puniques, qui opposent cette cité phénicienne et Rome. C'est l'époque des rois Massinissa et Syphax.  Vous trouverez l'histoire de cette période dans la page :  Imazighen et Carthaginois.

  • Avec l'occupation romaine s'ouvre une longue période. Pour en comprendre le contexte nous vous proposons de lire cette page sur ses débuts.

  • Parmi les souverains Imazighen en  lutte contre Rome, il en est un qui reste un symbole, par sa valeur et son intelligence. C'est Jugurtha.

  • Après lui on assiste au long effondrement des souverains. C'est la période des  derniers souverains imazighen.

  • Cette période est également marquée par la résistance populaire à l'empire.

  • Si vous voulez en savoir plus sur l'empire romain en Afrique, nous vous proposons de le découvrir sous deux pages qui sont complémentaires :

  • L'empire romain n'a pas vraiment influencé les Imazighen. Voici un bilan de la romanisation.

  • Sur l'Afrique romaine nous vous invitons à découvrir de nombreuses photographies. pour voir les diaporamas cliquez sur les liens suivants :

Chrétiens et barbares.

Cette période de l'histoire des Imazighen est d'une grande complexité. L'empire romain entre dans une longue phase de déclin. L'avènement du christianisme, qui reçoit un accueil très favorable en Afrique du Nord, commence par une terrible répression. Ensuite, les hérésies et révoltes entraînent des guerres. Les Imazighen tentent, parfois avec succès, d'établir des sociétés stables, mais la permanence d'invasions les remettent en cause. Si historiquement, on connaît bien celles venues du Nord (Byzantins et Vandales) celles venues du Sud, qui n'ont été étudiées que récemment, sont également d'une grande importance. Les nomades remontent régulièrement du Sud, à tel point que l'on a pu parler de péril chamelier.
Durant sept siècles, l'Afrique du Nord connaît une histoire particulièrement mouvementée. Vous trouverez dans cette partie :

  • Des éléments sur la christianisation des Imazighen. L'Afrique du Nord donne à la chrétienté des martyrs, des saints et des intellectuels remarquables.

  • Pour illustrer les auteurs chrétiens de cette période, nous vous proposons trois textes :

  • Avec la christianisation de l'empire romain arrivent un schisme et des révoltes. Ce sont les Donatistes et circoncellions.  On trouvera également dans cette page un lien qui traite des hérésies chrétiennes de l'époque.

  • En Afrique survient finalement le déclin de l'empire romain.

  • Les germains finissent par envahir l'Afrique du Nord. C'est l'invasion des Vandales.

  • Après cette période, c'est le retour en Afrique des successeurs en Europe des Romains,  Les Byzantins. Elle ne se fait pas sans résistances.

  • Un autre événement historique moins bien connu est important lors de cette période : c'est la remontée des tribus sahariennes vers l'Afrique du Nord. Ceux sont les invasions venues du Sud.

  • Cette partie se termine par une conclusion sur l'impact culturel des chrétiens et vandales en Afrique.

La période musulmane.

L'islamisation est un événement important de l'histoire des Imazighen. Pour en comprendre le contexte nous vous proposons d'abord une  Introduction. Vous trouverez dans les pages suivantes l'histoire musulmane de l'Afrique du Nord :

La colonisation française.

Nous vous proposons ici une série de textes sur cette période qui ne fut pas brillante.

Bibliographie

Nous vous proposons une bibliographie de l'histoire amazighe.

 

Source: http://perso.orange.fr/michel.behagle/Cultureberbere/Histoireamazigh/Histoire.htm

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