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10 octobre 2007 3 10 /10 /octobre /2007 20:55

A qui donner la Zakât ?

Shaykh Sâlih Al-Fawzân

 

Sache qu’on ne peut donner la Zakât qu’aux catégories de personnes qu’Allah a exposé dans Son Livre, Allah dit : « Les aumônes (obligatoires, la Zakât) ne sont que pour les indigents, les pauvres, ceux qui travaillent (à les percevoir), ceux dont on veut rapprocher les cœurs, pour affranchir (les esclaves), ceux qui sont lourdement endettés, dans le sentier d’Allah, et pour le voyageur (dans le besoin). Ceci est une obligation venant d’Allah ! Et Allah sait tout et Il est Sage. » (At-Tawbah : 60) Les catégories citées dans ce noble verset sont celles qui méritent la Zakât, et il y a unanimité (des savants) pour dire qu’il n’est pas permis d’en donner quoi que ce soit à d’autres qu’eux.

[…]

Le Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) a dit à une personne qui l’interrogeait : « Si tu fais partie de l’une de ces catégories, je te donne (de la Zakât) », ceci car certains hypocrites s’étaient plaints auprès du Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) du partage des aumônes, et Allah a montré que c’est Lui qui a partagé, Il en a montré le jugement, Il se l’est attribué à Lui, et ce partage n’appartient à personne d’autre.

Shaykh ul-Islâm ibn Taymiyyah a dit : « Il est obligatoire de la donner à ces huit catégories si on en trouve, sinon on va la donnerqui sont présents et envoyer le reste vers les lieux où on trouve ces autres catégories. »

à ceux d’entre eux

Il dit aussi : « Il n’est permis de la donner qu’à celui qui va l’utiliser pour obéir à Allah, car Allah l’a légiférée comme aide pour l’obéissance pour celui qui en a besoin parmi les croyants ou ceux qui les soutiennent. Celui qui ne prie pas, même s’il en a besoin, il ne faut pas lui en donner quoi que ce soit, et ce jusqu’à ce qu’il se repente et accomplisse la prière. »

Il n’est pas permis de s’écarter de ces huit catégories citées par Allah pour donner dans d’autres actes de bien, comme la construction des mosquées ou des écoles, d’après la Parole d’Allah : « « Les aumônes (obligatoires) ne sont que pour les pauvres, les indigents… », ici « que » (innamâ) induit la stricte limitation, appuie le jugement de ce qui suit et rejette ce qui est en dehors (de ces huit catégories). Le sens est alors : les aumônes ne sont pas destinées à autres que ceux-là, mais uniquement à eux. Et Allah n’a nommé ces huit catégories que pour montrer que la Zakât ne sortait pas de ces catégories et ne pouvait être donnée à d’autres.

Ces catégories se divisent en deux :

- Ceux qui sont dans le besoin parmi les musulmans

- Ceux qui, si on leur donne de la Zakât, cela aidera l’islam et les renforcera (dans leur foi).
[…] ces huit catégories sont :

1 – Les indigents : ils sont plus dans le besoin que les pauvres, car Allah a commencé par eux, et Allah ne commence que par ce qui est plus important. Les indigents sont ceux qui ne trouvent rien pour vivre et ne peuvent chercher cette subsistance eux-mêmes, ou n’en trouvent qu’une partie mais insuffisante. Il faut leur donner de la Zakât ce qui va leur suffire s’ils ne trouvent vraiment rien de quoi vivre, ou leur donner le complément nécessaire s’ils ne trouvent pas suffisamment de quoi vivre une année complète.

2 – Les pauvres : leur condition est meilleure que celle des indigents, le pauvre est celui qui trouve presque suffisamment de quoi vivre ou la moitié. On lui donne de la Zakât le complément qui va lui suffire à vivre une année entière.

3 - Ceux qui travaillent à la percevoir : ils sont ceux qui la collectent, la protègent et la distribuent à ceux qui la méritent sous l’ordre du gouverneur des musulmans. On leur donne de la Zakât un salaire pour leur travail, sauf si le gouverneur leur octroie déjà un salaire, dans ce cas ils n’ont aucun droit à la Zakât. Aujourd’hui, les collecteurs sont payés par l’Etat, il leur est donc interdit de prendre quoi que ce soit de la Zakât pour leur travail, car ils ont déjà reçu un salaire pour leur travail.

4 - Ceux dont on veut rapprocher les cœurs : ils sont de deux types : mécréants et musulmans. On peut donner la Zakât au mécréant si on espère sa conversion à l’islam afin de renforcer son intention et sa motivation, ou si en lui donnant la Zakât on va protéger les musulmans de son mal ou du mal d’un autre. Quant au musulman, on peut lui donner de la Zakât pour renforcer sa foi ou si on espère la conversion des gens de son rang, et pour d’autres buts semblables profitables aux musulmans. Mais il ne faut faire cela qu’en cas de nécessité, car ‘Umar, ‘Uthmân et ‘Alî ont délaissé l’octroi à ceux dont on veut rapprocher les cœurs, car cela n’était pas nécessaire à leur époque.

5 - Pour affranchir (les esclaves) : ils sont ceux qui sont faits prisonniers et qui ne trouvent pas de quoi se faire libérer, on peut alors donner de quoi payer la rançon et les libérer de leur joug. Il est aussi permis au musulman d’acheter un esclave avec sa Zakât et de l’affranchir. Il peut aussi racheter avec la Zakât le prisonnier musulman, car en faisant cela on libère le musulman de la captivité.

6 - Ceux qui sont lourdement endettés : ils sont de deux types :

Celui qui est endetté pour d’autres, par exemple s’il y a une divergence entre deux tribus ou deux villages sur une affaire de droit du sang ou d’argent et que cela amène entre eux haine et inimitié, quelqu’un peut s’interposer et donner de ses biens en compensation de ce qu’il y a entre eux, afin de mettre fin à cette querelle. Celui qui fait cela aura fait un grand bien et il lui est permis de le prendre de la Zakât afin que cela ne le prive pas de tous ses biens et que cela l’encourage lui et d’autres à accomplir cet acte noble qui met fin aux querelles et aux troubles. Plus encore, le Législateur a clairement exposé ce cas, comme il est rapporté dans le Sahîh Muslim d’après Qubaysah qui dit : « Je me suis acquitté d’une dette (pour un autre) et le Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) m’a dit : « Reste jusqu’à ce que les aumônes (Zakât) nous arrivent, afin que nous ordonnions qu’on te la donne. »
Celui qui est endetté pour lui-même, comme celui qui veut acheter sa liberté à un mécréant, ou celui qui a une dette qu’il ne peut régler. On lui donnera alors de la Zakât de quoi payer sa dette.

7 - Dans le sentier d’Allah : c'est-à-dire donner à ceux qui sont partis combattre et qui ne perçoivent pas de salaire (du gouverneur), car le sens générale de « sur le sentier d’Allah » est le combat, Allah dit : « Allah aime ceux qui combattent sur Son sentier » (As-Sâff : 4) et Il dit : « Combattez sur le sentier d’Allah. » (Al-Baqarah : 190).

8 - Le voyageur (dans le besoin) : c'est-à-dire le voyageur stoppé dans son voyage du fait qu’il n’a plus d’argent ou qu’il l’a perdu. (Littéralement dans le verset : « Fils du chemin ») ainsi on a nommé celui qui est sur les routes « fils du chemin ». On peut lui donner ce qui va lui permettre de rentrer chez lui, et s’il est en chemin vers un autre pays, on va lui donner ce qui lui permettra de s’y rendre et de revenir chez lui. Entre dans cette catégorie : l’invité comme l’a dit Ibn ‘Abbâs et d’autres. Et si on donne quelque chose au voyageur, au combattant, à l’endetté ou au prisonnier et qu’il en reste quelque chose après avoir comblé leur besoin, ils doivent le rendre, car ils ne possèdent pas totalement ce qu’on leur a donné, mais uniquement ce qui leur est nécessaire. Cela ne leur est dû qu’en raison d’une cause et si cette cause disparaît le droit aussi disparaît.

Sache qu’il est permis de donner l’intégralité de la Zakât à une seule des catégories citées, Allah dit : « Si vous donnez ouvertement vos aumônes, c’est bien. Mais si vous les donnez en secret aux pauvres, c’est encore mieux pour vous. » (Al-Baqarah : 271) Aussi d’après le hadith de Muâdh ibn Jabal, lorsque le Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) l’a envoyé au Yémen : « Informe-les qu’Allah leur a rendu obligatoire une aumône prise de leurs riches et donnée à leurs pauvres. » (Al-Bukhârî et Muslim). Dans le verset et le hadith, une seule catégorie est citée, ce qui montre que l’on peut ne la donner qu’à eux.

On peut également ne la donner qu’à une seule personne, car le Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) a ordonné à Banî Zarîq de donner leurs aumônes à Salmah ibn Sakhr (Ahmad). Il dit aussi à Qubaydah : « Reste jusqu’à ce que les aumônes (Zakât) nous arrivent, afin que nous ordonnions qu’on te la donne. » Ces deux hadiths montrent qu’il est permis de ne donner qu’à une seule personne parmi les huit catégories.

Il est préférable de la donner aux proches dont la prise en charge n’est pas obligatoire, ceci de proche en proche, d’après la parole du Prophète : « L’aumône que tu feras à ton proche et à la fois une aumône et maintien des liens de parenté. » (At-Tirmidhî)

Il n’est pas permis de donner la Zakât à la tribu des Banî Hâshim, auxquels s’ajoutent la famille de ‘Abbâs, ‘Alî, Ja’far, ‘Aqîl, Al-Hârith ibn ‘Abd Al-Muttalib et Abû Lahab, d’après la parole du Prophète : « Les aumônes ne conviennent pas à la famille de Muhammad, ce ne sont que les impuretés des gens. » (Muslim)

Il n’est pas permis de donner la Zakât à une femme pauvre si elle est prise en charge par son mari qui lui est riche, également au pauvre s’il a un proche riche qui le prend en charge, car ils peuvent se passer de prendre de la Zakât.

Il n’est pas permis de donner la Zakât aux proches dont la prise en charge est obligatoire, car ce faisant celui qui agit ainsi « protègerait » son argent. Quant à ceux qu’il prend en charge par bonté (et non par obligation) il peut leur donner de sa Zakât. Ainsi, Al-Bukhârî rapporte que l’épouse de ‘Abdullah a interrogé le Prophète (salallahu ’alayhi wasalam) à propos de deux neveux orphelins qu’elle élevait, si elle pouvait leur donner sa Zakât ? Il répondit oui.

Il n’est pas permis de donner la Zakât aux ascendants qui sont les parents et grands-parents, ni aux descendants qui sont les enfants et petits-enfants.

Il n’est pas permis de donner la Zakât à l’épouse car elle n’en a pas besoin étant donné qu’il doit la prendre en charge, et que ce faisant il « protègerait » son argent.

Le musulman doit s’assurer de la situation de ceux à qui il donne sa Zakât, s’il la donne à celui dont il pense qu’il la mérite, puis il lui apparaît qu’il ne la mérite pas, cela ne lui est pas compté, mais si rien ne lui apparaît cela lui est compté. Il se suffit de ce quisalallahu ’alayhi wasalam), il les a regardés et a vu qu’ils étaient robustes, il leur dit : « Si vous voulez je vous en donne une part, mais (sachez) que ni le riche ni l’homme fort et capable n’y a droit. » (Abû Dâwûd).

Source : Al-Mulakhas Al-Fiqhi p.258-263.
Traduit par les salafis de l’Est.

 
 


Zakât Al Fitr

 

Zakât El Fitr est une aumône obligatoire pour tout jeûneur pour qu'il soit purifié de tout ce qui aurait pu entacher son jeûne. Il est en outre tenu de la verser, le cas échéant, pour toutes les personnes dont il a la charge.

Par ailleurs, cette Zakât permet aux nécessiteux de passer la fête de l’Aïd dans les meilleures conditions possibles. Cette journée étant caractérisée par un climat de joie, de pardon et de fraternité, elle devrait dispenser les pauvres de demander l'aumône. Son montant est fixé en fonction du prix de certaines denrées alimentaires. Elle a été fixée cette année à 5 € par personne à charge    

Quand la sortir ?

On peut la sortir dès le début de Ramadan. Surtout si on la donne à un organisme de charité . Plus tôt l''organisme la reçoit-il et plus tôt il peut prendre ses dispositions afin qu'elle puisse être remise aux nécessiteux pour l'Aïd El Fitr. C'est d'ailleurs cet avis que préconisent un grand nombre de savants dont le Cheikh Youssef Al Qaradawi.

       

Comment vous faire parvenir ma Zakât Al Fitr ?

Vous pouvez vous acquitter de votre Zakât dès le début du Ramadan par plusieurs méthodes:

  • En nous envoyant un chèque,

  • Par carte Bleue, soit en ligne sur notre site,

  • En utilisant les tirelires déposées à cet effet chez certains commerçants,

  • En liquide dans les locaux du Secours Islamique,

  • Par mandat compte: compte postal CCP 2919 D Paris en précisant "Zakât El Fitr".



    Zakât Al Maal

    Le mot " Zakât ", souvent traduit en français par "aumône légale" ou bien "impôt social purificateur", signifie littéralement "purification", « épanouissement ». Il est également lié aux notions de bénédiction, croissance et développement.

    Il désigne l'aumône obligatoire que chaque musulman verse en vertu des règles de solidarité au sein de la communauté musulmane.

    Troisième pilier de l'Islam (après l'attestation de foi et la prière), la Zakât est en effet une obligation pour tout musulman possédant une richesse minimum (appelée Nisâb).

    Le Nisâb :

    Le Nisâb est la fortune minimale au-delà de laquelle l'acquittement de la Zakât est obligatoire. Elle correspond à l'équivalent de 85g d'or, soit actuellement 1250 € environ. Le musulman qui possède ce niveau minimum de richesse , ou d'avantage, après un an est considéré comme assez riche pour payer la Zakât.

    Pour quels biens est-elle due ?

    La Zakât est due pour les biens suivantes : l'or, l'argent, les marchandises, le bétail, les produits agricoles, l'exploitation minière, les actions en bourse, les titres et les obligations… Si un bien est acheté avec l'intention d'en tirer un profit après la vente, la Zakât est payable sur la valeur actuelle totale.

    Si vous avez un commerce, la Zakât n'est pas due sur le bâtiment, les installations, les équipements de bureau ou les véhicules de fonction. En revanche, les fonds de roulement et tous les profits qui ont étés économisés plus d'un an, seront soumis à la Zakât (pour plus de détails, nous contacter).

    Pour l'argent qu'on possède, la Zakât s'élève à 2.5% du montant total. Par exemple une personne possédant 1000 € d'économie donnera 1000* 2,5/100 = 25 € pour la Zakat.

    Fatwa du Cheikh Fayçal Mawlawi (jurisconsulte et membre du Conseil Européen de la Fatwa et de Recherches) :

    “ En cas de besoin urgent, les musulmans sont autorisés à faire parvenir l’aumône collectée (Zakat al Maal ou Zakat al Fitr), dans tous pays où vivent d’autres musulmans. Donner la Zakat aux musulmans dans ces pays, a été autorisé par le consensus des Ulémas (Ijmâ'), et a été considéré préférable par la plupart des jurisconsultes.”  

     

 

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5 octobre 2007 5 05 /10 /octobre /2007 02:37
 

Traduction française, par Amernay, d'un texte en anglais du Père Zakaria Boutros.

 

 

                                     

Il est souvent dit que le coran est écrit avec un langage arabe pur.

 

 

 

« Nous l’avons fait descendre un coran en langue arabe, afin que vous raisonniez» chapitre joseph (surate Yusuf) 2.

 

 

 

Il existe 9 versets dans le coran qui stipulent que celui-ci est écrit avec un langage arabe pur. A cet égard, on peut citer les surates : surate Yusuf (Joseph), surate Taha, surate Alnnahl (les abeilles), surate chuâra (les poètes), surate Fussilat (distinguée),  surate achchura (consultation), surate azzukhruf (ornement), surate ahqaf, surate azzumar.

 

 

 

En effet, beaucoup d’annotateurs disent que « langage arabe pur » veut dire l’arabe le plus parlé couramment. Cependant, il se trouve que le coran contient 275 mots non arabes et qui proviennent à partir d’autres langues.

 

 

 

A ce sujet, on peut lire dans l’Encyclopédie Islamique, Tome 26 et page 8222, 8223 ceci : « les annotateurs ne voient aucune gaucherie que le coran contient dans son texte des mots qui proviennent des autres langues comme : l’hébreu, l’indien, le perse, l’éthiopien, l’amazighe, le latin, le copte, le grec et le syriaque. ».

 

 

 

Ibn Abbas exprime dans son livre : « Ils montraient le grand intérêt de l’origine de ses mots et de leur signification. ».

 

 

 

Egalement, Al Syouty  dans son livre « la perfection dans les sciences coraniques », met en évidence l’existence de 275 mots non arabes dans le coran. Et que ces derniers, ne peuvent en aucun cas être rattachés à la langue arabe.

 

 

 

De même, Al Moutawakely a publié une étude qui traite ce sujet. Idem pour le cheikh Ibrahim Al-lbiary dans son livre « l’Histoire du coran » « Tarikh  al quran » publié en 1981 au Caire par les Editions la maison du livre arabe.

 

 

 

Exemple de ces mots étrangers :  

 

 

 

·        « Tafaq’a » est un mot amazigh qui veut dire « projeté ». Voir la surate Alâraf, verset 22.

 

·        « Al toar » est un mot syriaque qui veut dire « la montagne ». Voir la surate Al baqarah, verset 63 (la vache).

 

·        « Al raq’im »  est un mot amazigh qui veut dire « la plaque ». Voir la surate Al kahf, verset 9 (la caverne).

 

·        « Taha » est un mot hébreu. Voir la surate Taha.

 

·        « Senin » est un mot hébreu qui veut dire « joli ».

 

·        «Assijjîl » est un mot perse qui veut dire « le livre ». Voir la surate Al anbiya, verset 104 (les prophètes).

 

·        « Al lstabrek » est un mot perse qui veut dire « épais ». Voir la surate Al dukhane, verset 53 (la fumée).

 

·        « Al sundus » est un mot indien qui veut dire « le rideau transparent ». Voir la surate addukhane verset 53 (la fumée).

 

·        « Sariah » est un mot grec qui veut dire « le ruisseau ». Voir la surate de Maryam, verset 24 (Marie).

 

·        « Mechkat » est un mot éthiopien qui veut dire « trou dans le mur ». Voir la surate Al nnur (la lumière).

 

·        « Juhannam » est un mot hébreu qui veut dire « l’enfer ». Voir la surate Al anfal, verset 36 (le butin).

 

·        « Al zakat » est un mot hébreu qui veut dire « la taxe sur l’argent ».

 

·        « Sajjîl » est un mot perse qui veut dire « la boue caillouteuse ».

 

·        « Adduria » est un mot éthiopien qui veut dire « la planète lumineuse ».

 

·        « Nachit Alaîl » est un mot éthiopien qui veut dire « l’insomniaque ». Voir la surate Al muzammil, verset 6 (l’emmitouflé).

 

·        « Keflain » est un mot éthiopien qui veut dire « deux plis». Voir la surate Alhadid, verset 28 (le fer).

 

·        « Al Q’swara » est un mot éthiopien qu veut dire « le lion ». Voir la surate Al muddattir, verset 51 (l’enveloppé).

 

·        « Al melah al oukhra » est un mot copte qui veut dire « la première religion ». Voir la surate saad, verset 7.

 

·        « Wara’houm » est un mot copte qui veut dire « aux trousses ». Voir la surate Al kahf (la caverne).

 

·        « Bata’nha » est un mot copte qui veut dire « regard externe ». Voir la surate Al rahmane, verset 53 (le gracieux).

 

·        « Uho’d » est un mot hébreu qui veut dire « un ».

 

·        « Assamad » est un mot hébreu qui veut dire « inclus tous les caractères ».

 

·        « Abareeq » est un mot perse qui veut dire « les récipients ». Voir la surate Al waqiah, verset 18.

 

·        « Injil » est un mot grec qui veut dire « annonciation ».

 

·        « Tabout » est un mot copte qui veut dire « cercueil ».

 

·        « Saradeq » est un mot perse qui veut dire « la tente ».

 

·        « Surah » est un mot syriaque qui veut dire « le chapitre ».

 

·        « Al Firdouss » est un mot perse qui veut dire « le jardin ».

 

·        « Attaghout » est un mot éthiopien qui veut dire « les opposés ».

 

·        « Maôun » est un mot hébreu qui veut dire « la marmite ».

 

 

 

Ce sont là quelques exemples de mots non arabes inclut dans le coran.

 

Et l’on se demande, si celui-ci est écrit en langue arabe pur ?


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22 mars 2006 3 22 /03 /mars /2006 12:41

LES JUIFS AMAZIGHS

Avant l'émigration massive vers Israël, l'Europe et l'Amérique du Nord, il existait de nombreux groupes juifs au Maroc. Si, dans les villes, ces communautés habitaient dans des quartiers "réservés" appelés mellahs, il existait également de nombreuses communautés qui vivaient au sein de tribus amazighes. Ces communautés parlaient amazigh et empruntaient aux groupes voisins (Berbères musulmans) des formes d'organisation sociale ainsi que certains rites.
Le dossier que nous mettons en ligne traite des différents problèmes inhérents à ces communautés qui constituent encore le parent pauvre des études sur le judaïsme marocain. La polémique sur leur origine (la Palestine, l'Espagne ou tout simplement des Amazighs judaïsés ?) est abordée, ainsi que les fonctions que le berbère remplit dans leur pratique langagière et les traits qui les distinguent des groupes juifs arabophones.

Mondeberbere.com

La découverte des Juifs berbères, Daniel J. Schroeter

The Mellahs of Southern Morocco, Harvey E. Goldberg

Jewish Existence in a Berber Environment, Moshe Shokeid

Le Judéo-berbère, Haïm Zafrani

Une version berbère de la Haggadah de Pesah (extrait), P. Galand-Pernet et H. Zafrani


Communautés juives au Maroc vers 1950

 


Les diveres photos sont extraites du livre Juifs parmi les Berbères: Photographies d'Elias Harrus, édité par Sarah Harel Hoshen, Paris : Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme ; Tel-Aviv: Beth Htefutsoth, Musée de la Diaspora, 1999.
Ce livre est en vente à la librairie du Musée d'art et d'histoire du judaïsme : librairie@mahj.org

 

 

Source: mondeberbere.com

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29 octobre 2005 6 29 /10 /octobre /2005 00:00
 1
MIGRATIONS ÉTUDES

Revue de synthèse sur l’immigration et la présence étrangère en France
N° 63 - mars 1996
Le sacrifice de l'Ayd-al-Kabîr en
France (1990-1995)
Synthèse réalisée par : BRISEBARRE A.M., DIOP A.M. (Équipe Anthropologie
Comparative des Sociétés Musulmanes Laboratoire d’Anthropologie Sociale)
Directeur de la publication : Luc GRUSON
Conseiller scientifique : Moustapha DIOP
ADRI - 4, rue René Villermé 75 011 PARIS
Tél : 01 40 09 69 19 - Fax : 01 43 48 25 17
Email : info@adri.fr
Site Internet http://www.adri.fr
2
Cette étude, consacrée à Ayd al-Kabîr en France, a été réalisée à la demande,
en 1990, du Fonds d’Action Sociale, par Mme Anne-Marie Brisebarre et M. A.
Moustapha Diop (Équipe Anthropologie Comparative des Sociétés
Musulmanes Laboratoire d’Anthropologie Sociale).
Elle s’ouvre sur une présentation, d’une part, des textes islamiques en vue
d’appréhender le sens de l’Ayd, et les codes régissant le sacrifice et la
consommation de la viande, et d’autre part, des textes législatifs concernant
l’abattage rituel.
Elle met en relief les diverses pratiques individuelles à l’occasion de cette fête,
et à partir d’une étude de cas, elle analyse une expérience-pilote, initiée dans
le Val d’Oise.
LE SACRIFICE DE L'AYD AL-KABIR EN FRANCE
(1990-1995)


INTRODUCTION
L'islam, en tant que religion orthodoxe, a de longue date fait l'objet de
nombreuses études de la part d'historiens, de linguistes, mais aussi de
sociologues et d'anthropologues, les chercheurs de ces différentes disciplines
ayant surtout fait oeuvre d'orientalistes, privilégiant l'étude des textes plutôt que
l'observation des pratiques1. La part de cette production concernant le versant
populaire de l'islam et la vie quotidienne, est peu importante et assez ancienne,
datant à quelques exceptions près de la période coloniale. Enfin, ces travaux
s'intéressent surtout à l'islam dans le contexte des pays non européens d'où
sont originaires les musulmans aujourd'hui immigrés en Europe.
Depuis le début des années 80, les croyances religieuses des étrangers
non européens ont retenu à la fois l'attention des médias, celle des milieux
politiques et de la recherche ; toutefois ces travaux et études ont plus mis
l'accent sur les institutions (associations, "mosquée"...), sur la mise en relation
de l'islam et de la laïcité, sur le développement supposé ou réel d'un islam de
type radical. Selon les approches, les grilles de lecture, cet islam-là génère
crainte, fantasmes, interrogations autour de l'intégration, autour de la
construction d'une identité religieuse synonyme de repli communautaire. Les
rares études ou sondages consacrés aux pratiques cultuelles des musulmans
tentent soit de mettre en relief les frontières de la "citadelle intérieure", soit de
prouver la distanciation des musulmans par rapport à ces pratiques (prière,
jeûne du mois de Ramadan...).
Si le thème de la consommation alimentaire défraie la chronique quasi
annuellement autour du "mouton égorgé dans la salle de bains", du sang
dégoulinant dans certains terrains vagues des banlieues, peu de recherches se
sont penchées sur le sens de l'acte sacrificiel, appelé cAyd al-Kabîr (la grande
1 Galey J.-C., 1991 - Orientalisme et anthropologie, pp. 529-532 in Bonte P. et Izard M. éd. Dictionnaire de
l'ethnologie et de l'anthropologie, Paris, P.U.F
3
fête)2 , sur les difficultés de "couper le mouton", sur les représentations au
niveau de l'imaginaire des musulmans, sur les tentatives de transaction entre
pratiquants et pouvoirs institutionnels - au niveau national et/ou local.
Problématique et méthodologie
Au cours de nos recherches nous avons cherché à répondre aux
interrogations suivantes: dans le contexte français d'immigration et
d'urbanisation, y a-t-il maintien de pratiques musulmanes telles que l'cAyd al-
Kabîr ? Dans l'affirmative, quelles sont les conditions matérielles et sociales de
la célébration de cette fête au centre de laquelle se trouve le sacrifice d'un
animal, pratique illégale au regard de la loi française ? En se référant au
déroulement de la fête dans les pays d'origine des musulmans résidant en
France, peut-on constater une évolution du rituel sacrificiel ?
Notre méthode de travail a été celle de l'anthropologie: elle consiste à
observer les pratiques des acteurs sociaux dans le contexte direct qui nous
intéresse (la fête de l'cAyd al-Kabîr) et à faire ressortir, au cours d'entretiens,
les représentations qui sous-tendent ces pratiques.
Observer un événement qui n'a lieu qu'un jour par an présente la
difficulté, si on veut multiplier les observations, de devoir attendre l'année
suivante pour effectuer des comparaisons. Nous avons tourné cette difficulté
en multipliant les observateurs et en diversifiant les lieux d'observation. Pour
celà, nous avons constitué un groupe de travail de douze enquêteurs. La
plupart des participants étaient déjà en contact avec des familles ou des
communautés musulmanes. Le choix des lieux d'enquête a donc été dicté par
l'existence de ces liens ou réseaux : de l'appartement ou de la maison familiale
au foyer, en passant par des fermes, des abattoirs, des lieux collectifs au statut
très particulier (officiel/semi-officiel/clandestin ; visible/caché ; privé/public).
Nous avons aussi cherché à mettre en lumière les différentes sortes
d'organisation du sacrifice : Qui organise ? Un musulman ou une association
musulmane ? Un éleveur ou un responsable d'abattoir ? Une commune ou un
service de l'administration française ?
D'autre part, nous avons confronté les pratiques des musulmans avec
les textes traitant du sacrifice de l'cAyd (Coran, Sunna, Écoles juridiques) et
ceux portant sur la législation de l'abattage en France.
Un "guide d'enquête" a été établi : il n'a pas été utilisé comme un
questionnaire pour interroger les musulmans rencontrés, mais il a permis aux
enquêteurs d'origine française, maghrébine, négro-africaine, de recueillir des
informations qui puissent par la suite être comparées. L'observation collective
s'est déroulée de juin 1990 à juin 1992, trois fêtes de l'cAyd ayant ainsi pu être
2 A partir de 1990, les recherches sur le sacrifice musulman sont devenues un des axes prioritaires du GDR 745 du
CNRS "Anthropologie comparative des sociétés musulmanes". Des contrats avec le Ministère de la Recherche (1990-
1993) et avec le FAS (1990-1995) ont permis de mettre en oeuvre des études comparatives sur les diverses formes et
fonctions du sacrifice musulman. Une ouverture européenne (Belgique et Angleterre) a été engagée lors d'un séminaire
de recherche organisé en 1993-94 à l'Université Paris X-Nanterre. Enfin, une enquête a été menée sur l'cAyd al-Kabîr
en milieu urbain marocain (1994-95), en collaboration avec un enseignant chercheur de l'École nationale d'Agriculture
de Meknès, dans une perspective comparative.
4
suivies, et a porté sur trois terrains : la région parisienne, la Picardie (Amiens et
ses environs), les Bouches-du-Rhône.
En 1993 et 1994, il a été possible de suivre, étape après étape, une
expérience-pilote d'organisation de "sites dérogatoires de sacrifice" menée,
avec l'accord de la Préfecture, par les services vétérinaires du Val d'Oise. Nos
compétences ont été sollicitées afin de participer à la réflexion au sein d'un
groupe de travail rassemblant des représentants des ministères concernés
(Intérieur et Agriculture), des associations musulmanes, des professionnels de
l'élevage et de la viande, des associations de protection animale, etc...
Après un parcours des textes de l'islam afin de saisir le sens de l'cAyd
al-kabîr et les codes qui régissent le sacrifice et la consommation de la viande,
nous exposerons la législation sur la pratique de l'abattage rituel en France.
Puis nous nous intéresserons aux pratiques des musulmans lors de la fête de
l'cAyd al-kabîr en suivant la chronologie des différents moments de la fête.
Nous analyserons enfin, l'expérience-pilote du Val d'Oise, menée de 1993 à
1995 et ayant débouché sur l'organisation de sites dérogatoires de sacrifice.
NOURRITURES LICITES (HALAL) ET ILLICITES (HARAM)
La première source de l'islam, le Coran, accorde une place relativement
significative aux questions alimentaires. Partant d'un principe général : "C'est
Lui (Dieu) qui a créé pour vous (pour toute l'humanité) tout ce qui est sur terre"
(sourate 2, verset 29), le Coran introduit une classification entre les choses
"excellentes" (tayyibat) de l'ordre du licite et les nourritures (aliments et
boissons) considérées comme haram, c'est-à-dire interdites non par leur
caractère sacré mais plutôt en raison de leur nocivité: "Il leur (ceux qui suivent
le Messager) interdit tout ce qui est mauvais" (7, 157), et ce depuis l'époque de
Moïse.
Le verset 3 de la sourate 5, intitulée "La Table Servie", spécifie les
champs de l'interdiction : la bête morte; le sang ; la viande de porc ; les bêtes
immolées à d'autres divinités qu'à Dieu ; les bêtes étouffées, assommées,
mortes des suites d'une chute ou d'un coup de corne ; ou celles qu'un fauve a
dévorées, à moins d'avoir été égorgées avant de mourir ; enfin les bêtes
immolées sur les autels païens. S'ajoute à l'interdiction de la viande du porc,
celle des chevaux, des mulets et des ânes (16, 8).
La deuxième source de l'islam, la Sunna (Tradition) déclare haram la
viande de tout carnivore et de tout rapace. Toutefois, en cas de nécessité
absolue, ces interdits sont levés, à condition qu'il n'y ait aucune intention
sacrilège à consommer des aliments déclarés haram (5, 3).
Quant aux nourritures "excellentes" (tayyibat), elles sont de deux ordres
: la nourriture des Gens du Livre (5, 5), et la viande des bêtes immolées en
invoquant le nom de Dieu ; en effet, il ne faut pas toucher "aux viandes sur
lesquelles le nom de Dieu n'a pas été prononcé, ce serait défier le Seigneur"
(6, 121).
Les conditions requises pour que l'égorgement entre dans le domaine du
halâl s'agencent autour de plusieurs axes :
5
- d'abord l'animal : celui-ci doit être valide et sain, choisi dans les espèces
ovine, caprine, bovine, caméline ;
- ensuite, au moment de l'immolation, la bête couchée sur son côté gauche
(sauf pour les chameaux) est tournée vers la Qibla (la Pierre noire de la Mekke)
;
- enfin le sacrificateur doit invoquer le nom de Dieu avant de trancher avec
célérité et dextérité gorge, oesophage et jugulaires de l'animal.
L'cAyd al-Kabîr : la grande fête
Appelée aussi cAyd al-adha ou Kurban ou cAyd al-nahr ou encore
Tabaski, cette fête se circonscrit dans un double rappel: celui adressé à
l'individu qui doit prier en l'honneur de son Seigneur et sacrifier (108, 2), et celui
adressé à la communauté pour commémorer le geste d'Abraham (Ibrahim) mis
à l'épreuve et récompensé : "Nous rachetâmes l'enfant par un bélier
considérable" (37, 107).
Cette fête sacrificielle, initiée lors de la deuxième année de l'Hégire,
puise ses sources dans le Coran, la Sunna et l'Ijma (consensus de la
communauté musulmane). Elle a lieu le 10 du mois du pèlerinage (dhoul hidja),
c'est-à-dire deux mois et dix jours après l'cAyd al-fitr qui clôt le jeûne du
Ramadan.
Ce sacrifice - le sacrifice en général - ne fait pas partie des cinq arcanes
(piliers) de l'islam, mais c'est un rite "recommandé". Le même jour, les pèlerins
de la Mekke sacrifient dans la vallée de Mina. Ce sacrifice clôt, en quelque
sorte, le pèlerinage.
Acte religieux, l'cAyd al-kabîr est aussi une grande fête sociale - fête du
pardon, partage de la viande sacrificielle - et familiale. Pour les musulmans en
situation d'immigration, le versant identitaire est très présent : "L'cAyd ? c'est
comme Noël pour vous, c'est la fête des enfants. Mais c'est aussi comme votre
14 juillet", nous a dit un ouvrier algérien rencontré en 1988 dans une ferme de
la région parisienne où il était venu en famille acheter et sacrifier un mouton.
Si tous les musulmans interrogés, quelle que soit leur provenance
ethnique, se sont référés au sacrifice d'Abraham pour expliquer le sens de
l'cAyd al-kabîr, si l'observation du sacrifice lui-même (l'acte d'égorgement)
montre une remarquable unicité de la pratique et de la technique sacrificielles,
de nombreuses différences ont été relevées en amont comme en aval du
sacrifice : dans le choix de l'animal et son traitement avant le sacrifice, lors du
dépouillement et de la découpe du corps de la victime sacrificielle, à propos
des dons de viande (sadaqa) qui permettent une identification des différents
corps sociaux concernés, mais aussi en ce qui concerne la cuisine sacrificielle.
Ces différences sont surtout dues à l'importance de la part culturelle dans ces
pratiques.
LA LEGISLATION EN FRANCE
En France, pays laïque, le sacrifice de l'cAyd al-kabîr est considéré comme un
acte technique, relevant de la stricte réglementation de l'abattage des animaux
de boucherie. Celui-ci est codifié par les articles 7 à 12 du décret 80-791 du 1er
6
octobre 1980 (pris pour l'application de l'article 276 du Code rural) et par le
décret 81-606 du 18 mai 1981 modifiant les articles 10 et 11 du précédent
décret en ce qui concerne la pratique de l'abattage rituel.
Le décret du 1er octobre 1980
Il concerne les espèces bovine, ovine, caprine et porcine, les équidés, les
volailles, les lapins domestiques et le gibier (art. 7) et précise :
- l'immobilisation préalable des animaux est obligatoire (avant la saignée pour
les abattages rituels) ; la suspension des animaux est interdite avant leur
étourdissement et, en cas d'abattage rituel, avant la saignée - sauf volailles,
lapins et petit gibier (art. 8) ;
- l'étourdissement (procédé qui plonge immédiatement les animaux dans un
état d'inconscience) est obligatoire avant la mise à mort, sauf pour l'abattage
d'extrême urgence, l'abattage pour raisons de police sanitaire, l'abattage de
gibier d'élevage, l'abattage rituel (art. 9) ;
- il est interdit de procéder à un abattage rituel en dehors d'un abattoir (art. 10) ;
- les installations, appareils et instruments, utilisés pour l'immobilisation avant
l'abattage rituel et pour l'étourdissement des animaux, ainsi que ceux utilisés
pour la mise à mort sans saignée du gibier, doivent être agréés par le ministère
de l'Agriculture (art. 11) ;
- l'introduction d'un animal vivant dans un établissement d'équarrissage est
interdite (art. 12).
Le décret du 18 mai 1981
Il précise les conditions de la pratique de l'abattage rituel :
- il ne peut être effectué que par des sacrificateurs habilités par les organismes
religieux, agréés sur proposition du ministre de l'Intérieur par le ministère de
l'Agriculture (art. 1) ;
- pour l'abattage rituel des bovins, l'immobilisation des animaux avant l'égorgement
et pendant l'effusion de sang doit être effectuée au moyen
d'installations, appareils ou instruments mentionnés à l'article 11 du précédent
décret (art. 2).
En résumé, la réglementation porte sur :
- le lieu, l'abattoir étant le seul lieu légal de la mort de l'animal de
consommation ;
- l'acte de mise à mort (étourdissement/immobilisation, saignée, suspension) ;
- les instruments et équipements qui sont utilisés pour cette mise à mort ;
- les acteurs et leur savoir professionnel (la nécessité de leur double habilitation
- religieuse et technique - en cas d'abattage rituel).
On remarquera qu'il n'est pas prévu d'immobilisation pour l'abattage rituel des
ovins (article 2 du décret de 1981). Il n'existe, à l'heure actuelle, qu'un seul
appareil de contention agréé pour les petits ruminants. Or son coût élevé ne
permet pas à la plupart des abattoirs de s'équiper de cet appareil. Ceux qui
existent aux abattoirs d'Ezanville, de Marseille, de Saint-Etienne, etc... sont des
bricolages ingénieux mis au point par le personnel de l'abattoir.
L'arrêté du 15 décembre 1994
7
Pris par le ministre de l'Agriculture sur proposition du ministre de l'Intérieur, il
agrée la Mosquée de Paris comme organisme religieux chargé d'habiliter les
sacrificateurs et de contrôler l'abattage rituel. Cette hégémonie donnée à un
seul organisme musulman sur le contrôle de la viande halâl et sur le recueil des
taxes afférentes a provoqué une vive émotion au sein des grandes fédérations
d'associations musulmanes (UOIF et FNMF)3 . D'autant plus que le 15 juin
1995, le recteur de la Mosquée de Paris signait une convention avec la
Fédération Nationale des Exploitants d'Abattoirs Prestataires de services
(FNEAP) lui garantissant une exclusivité du label authentifiant la qualité halâl et
le prélèvement d'une taxe de 1F par kilo sur un marché estimé entre 300.000 et
500.000 tonnes de viande par an - sauf sur Lyon et sa région où l'Association
rituelle de la Mosquée de Lyon devait, après signature d'un compromis avec la
Mosquée de Paris, contrôler l'abattage et la commercialisation de la viande
halâl. Entré en application le 1er novembre 1995, l'arrêté a été suspendu le 24
novembre 1995 pour six mois, prolongés jusqu'au 30 juin 1996. Mettant à profit
cette attente de nombreuses associations se sont réunies, cherchant à doter
l'islam de France d'un Haut-Conseil destiné à "structurer démocratiquement la
communauté musulmane de France par le biais d'états généraux prévus pour
le mois de mai 1996" (Libération, 18 déc. 1995). L'enjeu de l'organisation de
l'abattage rituel et de la certification halâl est, outre la "moralisation" d'une
filière qui échappe souvent aux contrôles sanitaires du fait de sa clandestinité,
le financement du culte musulman.
LES PRATIQUES DES MUSULMANS
L'observation du déroulement de la fête de l'cAyd al-kabîr montre que s'y
mêlent intimement la religion (la prière, puis le sacrifice proprement dit) et la
tradition (du choix de la victime sacrificielle aux pratiques culinaires). Mais,
nombreux sont ceux qui revendiquent l'ensemble des festivités comme faisant
partie du religieux. Car l'islam investit tous les pans de la vie de ses fidèles, en
particulier l'alimentation. Les familles musulmanes interrogées lors de nos
enquêtes en France, ont maintes fois exprimé le lien existant entre le sacrifice
de l'cAyd et la viande halâl consommée au quotidien, le sacrifice ibrahimien
donnant sens à l'abattage rituel.
Ce qui explique que certaines familles dont la pratique musulmane est
devenue très lâche, continuent cependant à sacrifier pour l'cAyd al-kabîr ;
quant à ceux qui se revendiquent de culture musulmane mais non pratiquants,
ils sont nombreux à consommer de la viande halâl en invoquant à la fois la
recherche d'un goût particulier et la garantie d'une sorte de pureté alimentaire
primordiale lors du processus de transformation du vivant animal en viande.
Le choix de la victime
3 UOIF : Union des organisations islamiques de France
FNMF : Fédération nationale des musulmans de France
8
Le premier acte qui prépare l'cAyd al-kabîr est le choix de l'animal : la
meilleure victime est un mouton, en référence au sacrifice d'Abraham, de
préférence un mâle non castré. Il ne doit être "ni borgne, ni malade, ni boiteux,
ni maigre au point de ne plus avoir de graisse"4. Des éleveurs français se sont
organisés depuis une quinzaine d'années pour offrir aux musulmans des
animaux répondant aux critères attendus : ils ont donc arrêté de castrer et
d'écourter (couper la queue) les agneaux mâles destinés au sacrifice de l'cAyd.
On relève cependant des différences dans le choix de l'animal destiné
au sacrifice : respectant les traditions de leur pays d'origine, des musulmans
pakistanais, indonésiens ou mauriciens se mettent en quête de jeunes bovins,
acceptant aussi bien un mâle entier ou castré qu'une femelle, tandis que des
Comoriens affichent leur préférence pour le sacrifice de caprins, choisissant
des femelles dont la viande est considérée comme plus saine. Ici, la tradition
locale semble supplanter la référence au mythe d'origine.
S'agissant des moutons, nos informateurs ont ajouté aux critères de
sexe, d'âge et d'état physiologique, d'autres critères d'ordre physionomique :
couleur, présence ou non de cornes, conformation... Ce choix physionomique
est explicité comme une recherche du "plus beau mouton". Les uns - des
Maghrébins - se référaient à la vie du Prophète : pour l'cAyd celui-ci aurait
sacrifié un mouton cornu, de couleur blanche, marqué de taches ou de
mouchetures noires sur le mufle et aux pattes ; d'autres - en particulier des
musulmans originaires d'Afrique noire - recherchaient au contraire un mouton
blanc immaculé. Beaucoup décrivent comme victime idéale un mouton dont la
physionomie se rapproche au maximum de ceux qui, dans leur région d'origine,
sont choisis pour l'cAyd. Un choix qui confirme la nouvelle fonction identitaire
de cette fête religieuse dans le contexte de l'immigration, une recherche de
"racines".
L'achat du mouton de l'cAyd se fait souvent en présence de toute la
famille : les hommes et les garçons, grands et petits, en sont les acteurs, tandis
que les femmes et les filles restent spectatrices, même si la mère est parfois
consultée sur l'adéquation entre le poids de l'animal et la taille de la famille.
Cependant, peu de chefs de famille possèdent encore le savoir pastoral qui
détermine le bon mouton, c'est-à-dire celui dont la chair répondra aux goûts de
la famille et qui offrira le meilleur rapport entre le poids vif et le poids de viande.
Ce qui est aujourd'hui transmis aux garçons par les pères semble relever plus
de l'esthétique ou de l'affectif que d'un savoir portant sur des critères objectifs.
Une question a été soulevée par certains de nos informateurs : peut-on
s'endetter ou priver sa famille du nécessaire pour acheter une victime à
sacrifier pour l'cAyd ? Si en France on peut se procurer un mouton pour 700 à
1000 F, au Maghreb, les familles doivent parfois débourser jusqu'à deux mois
de salaire. Les écoles juridiques musulmanes se sont prononcées sur cette
question. Celle de Chaféi - les Comoriens et les Franco-Comoriens sont
chaféites - estime que doit sacrifier le musulman disposant du prix d'achat du
mouton et d'une épargne servant pour ses besoins et les besoins de ceux qui
sont à sa charge durant les trois jours de la fête. D'après celle de Abou Hanifa,
4 Ibn Abi Zayd al Qayrawâni, 1968, La Risala, Alger, Editions populaires de l'armée
9
seul le musulman disposant de cent dihrams ou d'une "valeur équivalente
indépendante de ce dont il se sert pour sa nourriture" est habilité à acheter
l'animal sacrificiel. Pour l'école de Ibn Hanbal - certains Pakistanais et les
Saoudiens se réclament de cette obédience - tout musulman qui dispose du
prix d'achat, même s'il est emprunté, est en mesure de se procurer l'animal, à
condition bien sûr que l'emprunteur soit assuré de pouvoir honorer sa dette.
Enfin, celle de Malik - Maghrébins et Négro-Africains sont malékites - dit que
doit sacrifier le musulman à qui le prix de l'achat de l'animal "n'a pas fait défaut
durant toute l'année", ou "celui qui a procédé à un emprunt"; toutefois Malik n'a
pas été suivi par nombre de ses disciples qui récusent la notion d'emprunt du
prix de l'animal sacrificiel. Des commentateurs, tel A. Djaber El Djazaîri5, disent
que "tout musulman dépourvu de moyens bénéficie du sacrifice", puisque "le
Prophète a offert un sacrifice au nom de tout son peuple".
L'intégration de l'animal à la famille
Au Maghreb, le mouton de l'cAyd est - si cela est possible et c'est de
moins en moins souvent le cas en milieu urbain - installé à la maison et intégré
à la famille: il reçoit un nom ; les femmes le nourrissent avec les restes du
repas familial; les enfants le promènent et comparent sa force, dans des
combats singuliers, à celui de leurs petits voisins. Un jeune musulman vivant à
Amiens nous a expliqué : "Entre nous il y avait une sorte de concurrence, entre
les familles, entre nous surtout, les gamins. On allait regarder le mouton du
copain d'en face, du voisin, et on lui disait : "Le nôtre est plus gros." A la limite,
il disait : "Oui, mais le vôtre, il y a plus de graisse. Moi, je ne mangerai que de
la viande rouge". C'est en fin de compte de très bons souvenirs. Et je n'ai pas
l'impression que les gamins qui ont mon âge aujourd'hui, (celui) que j'avais à
l'époque, ressentent cette fête avec la même notion que j'en ai eu" (1990).
Lors des fêtes, un mariage par exemple, le mouton de l'cAyd porte,
comme les femmes et les enfants, des décorations au henné. Si à l'approche
de la fête les enfants disent : "pauvre mouton on va bientôt te tuer", les parents
les font taire : "ne lui dites rien, il comprend tout". Le jour de l'cAyd on louera la
résignation du mouton qui, comme Ismail, acceptera d'être sacrifié.
Cette intégration à la famille, période de familiarisation avec l'animal, est
pratiquement impossible à réaliser lorsque la famille réside en milieu urbain en
France. Les familles laissent donc l'animal choisi, payé et identifié par un
numéro, entre les mains du vendeur jusqu'au matin de l'cAyd. Le sacrifice aura
le plus souvent lieu en dehors de l'habitation familiale, ce que regrettent
beaucoup de musulmans : "Le meilleur endroit pour égorger le mouton c'est à
la maison, dans la salle de bain, alors toute la maison est bénite jusqu'à l'cAyd
suivant. Normalement, bon, ici on n'a pas la possibilité, mais en principe, le
mouton il passe la nuit à la maison avec les enfants. Chez nous on l'achète la
veille, on le met avec les enfants. Il passe au moins une nuit avec les enfants,
que les enfants ils le voient, ils le lavent, ils lui mettent le henné, ils le font
manger, ils le font boire, ils s'amusent avec toute la nuit, et puis le lendemain
matin on égorge le mouton à la maison" (Seine-et-Marne, 1988).
5 El Djazaîri, La voie du musulman, s.l., ASLM Ed., p. 362
10
Certaines municipalités dépourvues d'abattoir ont essayé de "sortir le
sacrifice" des appartements pour éviter les heurts entre communautés : "dans
la ville de Corbeil, ils ont trouvé un endroit pour que les musulmans puissent
venir égorger le mouton, un endroit qui sera nettoyé par la municipalité.
D'habitude dans toutes les villes communistes et dans certaines villes
socialistes on trouve une solution pour pouvoir égorger ou faire la prière"
(1990).
Comment symboliser, dans cette situation urbaine, la substitution du
mouton à l'enfant en commémoration du sacrifice d'Abraham ? L'observation,
plusieurs années de suite, de l'achat du mouton dans les fermes ou les
abattoirs de la région parisienne, a permis de constater que cet acte à première
vue strictement commercial était considéré par des musulmans comme déjà
inclus dans le rituel de l'cAyd al-kabîr. Ainsi avons-nous vu, lors du choix du
mouton, le père d
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29 septembre 2005 4 29 /09 /septembre /2005 00:00
JUDÉO-BERBÈRE

Haïm Zafrani
in Encyclopédie de l'Islam

Les Juifs berbérophones des pays chleuh et tamazight avaient, avec leurs dialectes vivants et un folklore qui n'a rien à envier à celui de leurs voisins musulmans, une littérature orale traditionnelle et religieuse dont il ne subsiste malheureusement que les quelques vestiges que l'auteur du présent article a recueillis à une date récente. Dans la vallée de l'Atlas, dans le Sous et aux confins sahariens (comme aussi, semble-t-il, dans certaines contrées algériennes et tunisiennes), ils constituaient naguère de petites communautés groupées dans des mellahs et établies là depuis des siècles sinon un ou deux millénaires. Aujourd'hui, on n'en trouve guère de trace ; depuis l'indépendance du Maroc, ils ont immigré en bloc en Israël.

Laissons de côté le problème de l'origine de ces communautés et l'hypothèse très controversée de la « judaïsation des Berbères » (H. Z. Hirschberg, Histoire des Juifs d’Afrique du Nord, Jérusalem 1965, 2 tomes en hébreu, et compte rendu dans Journal of African History, VIII/3, 1966), il nous importe de savoir que le berbère a été, jusqu’à ces dernières années, l’une des langues vernaculaires des communautés juives vivant dans la montagne marocaine et le Sud du pays. La plupart d’entre elles étaient bilingues (berbéro-arabophones) ; d’autres semblent avoir été exclusivement berbérophones, comme à Tifnut ; de cette dernière catégorie, nous connaissons quelques individus isolés, immigrés en Israël et repérés à Ashkelon. (Sur la distribution géographique des communautés juives du Maroc, notamment dans l’Atlas et le Sud marocain, et sur les migrations internes de leurs populations, voir H. Zafrani, Vie intellectuelle juive du Maroc, Pensée juridique et Droit appliqué dans leurs rapports avec les structures socio-économiques et la vie religieuse…, thèse de doctorat, dactylographiée, 210-21 ; sur les Juifs du Dadès et les autres communautés berbérophones, voir ibid., 171 sqq. et, du même auteur, Pédagogie juive en Terre d’Islam, Paris, 1969, 33-8). Dans la vallée du Todgha (Tinghir), dans la région de Tiznit (Wijjan, Asaka), de Ouarzazate (Imini), à Ufran de l’Anti-Atlas, à Illigh et ailleurs, non seulement le berbère était un parler juif de communication dans le milieu familial, social et économique et dans les contacts avec les autres groupes ethniques et confessionnels, mais il constituait aussi, à côté de l’hébreu, la langue de culture et de l’enseignement traditionnel qui l’utilisait pour l’explication et la traduction des textes sacrés comme le judéo-arabe ou le vieux castillan dans les communautés de langue arabe ou d’origine hispanique ; certaines prières, les bénédictions de la Torah entre autres, étaient dites uniquement en berbère, dont le rôle est attesté dans la liturgie pascale, ainsi que nous allons le voir. Une documentation écrite et sonore sur le folklore et la vie intellectuelle de ces communautés berbérophones a été réunie : quelques textes bibliques dans leur version hébraïque et berbère, cantiques liturgiques et chants de fêtes qui marquent les grands moments de l’existence juive (circoncision, bar-mitsva, mariage, etc.) et notamment la Haggada de Pesah, la pièce la plus importante et la plus précieuse de notre collection et qui présente à nos yeux un intérêt capital pour la connaissance des traditions linguistiques et culturelles d’un monde trop peu exploré quand il en était encore temps, appartenant à une diaspora longtemps ignorée et désormais irrévocablement disparue. (Une liste de ces documents a été publiée dans H. Zafrani, Compte rendu d’enquête, dans Journal asiatique, CCLII/1 (1964) ; nous en avons recueilli d’autres ultérieurement, en Israël même).

   
  Pierre tombale, Juifs de l'Anti-Atlas occidental.
Traduction : «Pierre tombale de l'honorable femme Hanina, fille de Isaac le Séfarade. Elle mourut sainte le vendredi 30 du mois de Sivan en l'an 5635 (1875), ... Puisse son âme...»
Photo : Musée royal de l'Afrique central (Belgique)
 

Ce dernier document est la version intégrale en berbère de la composition liturgique que les Juifs récitent au cours de la veillée pascale et dont le thème fondamental est l’histoire de la sortie d’Égypte, accompagnée du hallel (groupe des Psaumes CXIII à CXVIII qui entrent dans la liturgie des grandes fêtes et de certains jours solennisés). C’est une traduction traditionnelle, comme il en existe en judéo-arabe ou en ancien castillan, du texte hébraïque par rapport auquel elle présente néanmoins des variantes et des nuances d’interprétation. Le texte en a été transcrit, à Tinghir, dans la vallée du Todgha à une date récente (vers 1959), en caractères hébraïques carrés munis de voyelles (on ne connaît, à ce jour, aucun autre manuscrit transcrivant un texte berbère en caractères hébraïques). Certaines ambiguïtés et bizarreries morpho-syntaxiques qui en rendent parfois la compréhension difficile, sont consécutives au procédé habituel de la traduction littérale, aux « décalques » berbères du texte hébraïque, la récitation berbère recouvrant celle de l’original hébraïque, soulignée par le même rythme et la même mélodie. La langue de notre Haggada s’apparente à la tamazight, ensemble des parles des Berabers ; elle est néanmoins caractérisée par des traits composites qui en rendent difficile une localisation précise ; elle suppose l’existence d’une langue littéraire qui n’est pas le parler d’un groupe donné, ni d’une époque déterminée (voir P. Galand-Pernet et H. Zafrani, Une version berbère de la Haggadah de Pesah, Texte de Tinhir du Todhra (Maroc), Paris 1970, Supplément au tome XII des Comptes rendus du G.L.E.C.S.).

Bibliographie

Outres les références du texte,

  • H. Zafrani, Les langues juives du Maroc, dans Revue de l’occident musulman et de la Méditerranée, IV (1967), 175-88 ;
  • H. Zafrani, Littératures dialectales et populaires juives en Occident musulman, P. Geuthner, Paris.
  • Source: mondeberbere.com
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29 septembre 2005 4 29 /09 /septembre /2005 00:00

LE JUDAISME BERBERE


L’arrivée des juifs en Afrique du Nord, sans doute en compagnie ou dans le sillage des navigateurs-commerçants phéniciens, remonte très loin dans le temps, sans qu’il soit possible de situer exactement la date à laquelle cette migration a commencé. Certains la font remonter à l’époque de Salomon (1er millénaire av. J.-C.), d’autres à la période qui a suivi la destruction du Premier Temple (587 av. J.-C.), d’autres encore à une date plus récente, après la destruction du Second Temple (70 de l’ère chrétienne).

Une première remarque s’impose : de tous les peuples qui, très tôt, ont commencé à se déplacer en Méditerranée d’Est en Ouest, seuls les Juifs n’avaient aucune visée conquérante ou colonisatrice et tout à fait paradoxalement, de tous les peuples qui se sont succédés, seuls ont survécu jusqu’à nos jours, s’infiltrant dès le début et s’intégrant dans la trame de la société et de la culture locales. Très tôt, ils essaimèrent depuis les comptoirs phéniciens côtiers vers l’intérieur des terres, s’insérant de manière organique dans chaque tribu, chaque village, s’imprégnant de l’environnement et l’influençant en retour.

Ironie du sort : ceux qui ont su et pu survivre à tous les bouleversements qui ont secoué la région, se sont trouvés, au milieu de ce siècle, impliqués, imbriqués dans un autre phénomène historico-politique non moins étonnant que leur survie. C’est celui du retour en masse des juifs du Maghreb et d’Orient, sous l’impulsion de la vague messianico-sioniste des années 50 et 60, vers la même terre qui a vu certains de leurs lointains ancêtres, plusieurs siècles auparavant, partir à l’aventure en compagnie des intrépides marins de Tyr et Sidon. Ici semble se clore un chapitre passionnant de l’histoire des migrations en Méditerranée. Fin d’une coexistence qu’évoquent avec nostalgie ceux qui sont restés sur place, beaucoup moins ceux qui sont partis vers leur nouveau-antique destin.

Le « printemps berbère », comme a été baptisé l’éveil ethno-culturel amazigh, constitue une motivation supplémentaire pour tenter d’élucider ce phénomène d’osmose entre le Maghreb pré-islamique et les premiers représentants du monothéisme que les Berbères ont rencontrés, ce qui les a probablement préparés à adopter plus facilement l’autre version du monothéisme, celle de l’islam. Cette rencontre judéo-berbère que certains auraient tendance à décrire comme un coup de foudre, présente des aspects énigmatiques que l’absence de preuves historiques irréfutables rend encore plus obscurs. L’intérêt très marqué de la part de certains militants pour le judaïsme, qu’ils considèrent comme une composante de leur identité, est à la fois un adjuvant et un danger. Une recherche plus poussée s’impose pour en savoir plus sur les affinités, les apports mutuels et les relations réelles entre la communauté juive minoritaire qui a conservé sa pleine et entière autonomie religieuse et culturelle, et la communauté berbère majoritaire qui, malgré son islamisation totale, a cependant conservé dans son patrimoine quelques traces indélébiles de son contact avec le judaïsme bien avant l’arrivée de l’islam.

Mais qui sont les Berbères ? Ont-ils toujours vécu en Afrique du Nord et aux abords du Sahara ? L’incertitude des historiens et des archéologues, l’insuffisance de preuves épigraphiques, laissent la place libre à l’imagination qui, de toute façon et traditionnellement, s’est donné libre cours, renforcée en cela par certains écrits juifs et arabes du Moyen Age. Ces écrits font état de légendes sur l’origine « cananéenne » des Berbères, dont l’ancêtre ne serait autre que le célébre chef militaire Goliath (en berbère Jalout). Le légendaire s’imbrique ici dans l’histoire, l’interprète, la pervertit, l’idéalise, favorisant l’exploitation idéologique, culturaliste. Il faut dire qu’il y a là une sorte de revanche de la part d’une civilisation dénigrée cherchant à se réhabiliter, en minimisant ce qu’elle doit à l’environnement culturel dominant et en amplifiant la dette qu’elle pense avoir contractée vis-à-vis d’une autre, dénuée, celle-là, de toute prétention à l’hégémonie. Mais il y a davantage : outre le mythe de l’origine juive (ou cananéenne), a cours une autre thèse reconnue plus ou moins comme historique, bien qu’encore insuffisamment attestée, selon laquelle les Berbères auraient été en partie judaïsés. Les divergences à ce sujet entre historiens vont bon train, principalement quand il s’agit de la figure historico-légendaire de la Kahina.

La société berbère semble avoir été l’une des rares à n’avoir pas connu l’antisémitisme. Le droit berbère, azref, dit « coutumier », contrairement au droit musulman (et au droit juif, soit dit en passant), est tout à fait indépendant de la sphère religieuse. Il serait, par essence, « laïque » et égalitaire, et n’impose aucun statut particulier au juif, alors que la législation musulmane fixe le statut du juif (et du chrétien) en tant que dhimmi, « protégé », soumis à certaines obligations et interdictions. Le juif occupait une place bien définie dans le système socio-économique du village berbère : il remplissait généralement la fonction soit d’artisan (orfèvre, cordonnier, ferblantier), soit de commerçant, l’une et l’autre occupation pouvant être ambulantes. Aujourd’hui encore, après trente ou quarante ans, les villageois de l’Atlas et des vallées sahariennes se souviennent avec nostalgie du temps où les juifs faisaient partie du paysage, allant jusqu’à imputer à leur absence la raison de leurs misères actuelles.

Peut-on en dire autant de l’image du Berbère musulman auprès de son ex-compatriote juif ? Rien n’est moins sûr. Il y a eu là comme un refoulement chez les juifs berbères immigrés en Israël quant à leur passé, dû sans doute à plusieurs raisons : leur nouvelle identité israélienne acquise « aux dépens » de leur précédente identité, les préjugés et quolibets qui frappaient et frappent encore les « chleuhs » (même en Israël). Leurs enfants et petits-enfants, nés en Israël, sont dans l’ignorance totale du patrimoine berbère de leurs parents.

Source: harissa.com

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29 septembre 2005 4 29 /09 /septembre /2005 00:00
Les berbères judaïsés

 

Les tribus berbères étaient installées depuis très longtemps en Afrique du Nord. Les écrivains arabes font remonter leur origine à Goliath le Philistin et évoquent l’émigration des Canaanites.

Des récits talmudiques et rabbiniques, dont les sources remontent au I° siècle de notre ère, font état, en effet, d’une migration volontaire des habitants de Canaan vers l’Afrique du Nord après la conquête de Josué.

Procope, historien byzantin du VI° siècle, cite une inscription phénicienne à Tigisis (aujourd’hui, Aïn-El-Bordj, à 50 km au sud-est de Constantine) affirmant : "C’est nous qui avons pris la fuite devant ce bandit de Josué". Ibn Khaldoun, au XIV° siècle, reprend cette affirmation : "Les Berbères sont les enfants de Canaan, fils de Cham, fils de Noé".

Il s’agit probablement de légendes qui ont été entretenues tout au long de la domination carthaginoise et rendues plausibles par la proximité de la langue punique et de l’hébreu.

Salluste parle des Numides (berbères nomades) et des Maures (berbères sédentaires). Il s’agit probablement de tribus éthiopiennes d’origine sémitique, arrivées en Afrique du Nord en vagues successives : d’abord les Louata et les Haouara, puis les Néfoussas et Djéraoua, enfin les Zénata qui refoulèrent les autres tribus.

Quoi qu’il en soit de leur véritable origine, certaines de ces tribus berbères ont probablement été judaïsées lors des multiples émigrations juives en Afrique du Nord. Dès 814 av J-C, des juifs auraient suivi les Phéniciens fondateurs de Carthage.

Après la destruction du Premier Temple et surtout celle du second Temple par Titus en 7O, des dizaines de milliers de Juifs auraient été déportés ou auraient émigré vers la Cyrénaïque puis le Maghreb occidental. Plus de 30 000 colons juifs auraient été installés à Carthage par Titus.

Enfin, une nouvelle vague d’immigrants juifs suivit l’échec de la révolte juive de Cyrénaïque (115-116 après J-C) puis la défaite de la Révolte de Bar-Kokhba (132-135). Les juifs auraient alors pratiqué un certain prosélytisme, convertissant les tribus berbères qui les accueillaient (et notamment les tribus nomades refoulées vers le désert saharien par la colonisation romaine).

On en trouve notamment témoignage dans les écrits de Tertullien au III° siècle et de Saint Augustin au V° siècle, qui s’indignent de ces conversions berbères au judaïsme.

Lorsque Bélisaire reprend le contrôle de l’Afrique du Nord pour le compte de Constantinople, il applique avec cruauté les Édits de Justinien : massacres, conversions forcées se succèdent. Beaucoup de juifs trouvent refuge auprès des Berbères des massifs montagneux ou du désert.

Les juifs berbères d’aujourd’hui descendent-ils des tribus berbères judaïsées avant les conquêtes byzantine puis arabe ou sont-ils les descendants de juifs palestiniens (ou espagnols) ayant trouvé refuge parmi ces tribus berbères ? Ce point est sujet à controverse parmi les spécialistes.

La conquête arabe se traduisit par la quasi-disparition de la religion chrétienne mais les juifs berbères subsistèrent en petits groupes, vivant dans des villages isolés dans les zones montagneuses ou dans les territoires pré-sahariens. La reine Kahéna (de la tribu Djeraoua), dans l’Aurès oriental, symbolise cette résistance des juifs berbères : les grands nomades juifs berbères combattent armés de leurs lances derrière leurs chameaux disposés en éventail. Mais la Kahéna est vaincue en 693 et les vieilles communautés juives sont détruites. Des juifs de Palestine, qui ont suivi les armées arabes, reconstruisent de nouvelles communautés. Kairouan, fondée en 670, devient la capitale d’une orthodoxie juive professant le judaïsme babylonien, qui s’oppose aux pratiques judéo-berbères considérées comme hétérodoxes.

L’arrivée des juifs espagnols après 1391 et surtout à partir de l’expulsion de 1492 a bien évidemment modifié la vie de ces juifs berbères. Le clivage entre les deux communautés est resté manifeste : à Alger, les juifs espagnols (les megorachim : les exilés) sont surnommés les porteurs de capuches (kabbusiyyin) et les juifs indigènes (les tochavim : les natifs) les porteurs de turbans (shikliyyin ).

Mais peu à peu, l’élite des rabbins espagnols impose son autorité et ses règles aux communautés locales. En 1394, par exemple, Simon ben Semah Duran dit Rachbatz (1361-1444) rédige des ordonnances, les taqqanot d’Alger, qui établissent une législation matrimoniale appliquée par toutes les communautés juives algériennes.

La coutume de Castille devient la coutume d’Alger. De même Amram ben Merouass Ephrati, descendant d’une illustre famille de rabbins de Valence (Espagne), devient rabbin d’Oran.

A partir de cette époque, les juifs d’Algérie, dans l’empire ottoman, constituent une seule communauté, même si certains particularismes locaux subsistent qui témoignent d’origines historiques différentes.

Source: amazigh.info

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29 septembre 2005 4 29 /09 /septembre /2005 00:00
A la découverte des Juifs Berbères

 

Parmi les travaux et domaines d’études concernant le passé des Juifs marocains, l’histoire des Juifs dans les régions à dominance berbère occupe une très faible place. Cela provient en partie de la nature fragmentaire des sources historiques provenant des zones rurales du pays .

Comparée à la documentation sur les Juifs parlant arabe, vivant dans les régions urbaines du Maroc et qui ont produit un nombre considérable d’écrits, les données historiques sur la vie des Juifs berbères ou vivant parmi les Berbères, avant la période coloniale, sont très éparses, presque toujours de seconde main, et sont souvent basées sur des mythes d’origines et des légendes. Les voyageurs étrangers en visite au Maroc dans la période pré-coloniale, qui ont établi, quoique de façon inexacte, les listes des tribus et des " races " du pays ont rarement fait la distinction entre Juifs berbérophones et Juifs arabophones [2]. Les Juifs ont été considérés comme une catégorie à part, aux côtés des Maures ou Andalous, des Arabes, des Berbères et shleuh. Peu d’Européens ont voyagé à l’intérieur du Maroc avant le XXe siècle, et ceux qui le firent, comme John Davidson (qui fut tué) en rapportèrent des informations peu fiables. James Richardson, un militant anti-esclavagiste britannique, qui a visité le Maroc en 1840, a poussé plus loin les observations de Davidson ; il a été le premier à désigner les Juifs de l’Atlas comme des " juifs shelouh ", parlant berbère et dont les coutumes et caractéristiques étaient les mêmes que celles de leurs voisins non-juifs [3].

Cette référence aux Juifs berbères est, cependant, encore très inhabituelle et de fait, elle n’a pas donné lieu à des hypothèses hasardeuses sur les origines berbères des Juifs. D’après la plupart des visiteurs européens du XIXe siècle, les communautés juives elles-mêmes se revendiquent fermement comme descendant des Juifs de l’Ancien Israël. Les seules distinctions qu’on y trouve sont celles relatives aux clivages entre Juifs espagnols et Juifs autochtones, un clivage que les Juifs du Maroc eux-mêmes mentionnent par les termes " d’expulsés " et de " résidents " (megorashim et toshavim).

A la fin du XIXe et au XXe siècles, les voyageurs et ethnographes " découvrent " un grand nombre de communautés dispersées et donnent de ces Juifs vivant parmi les Berbères une image totalement différente de celle des communautés juives des régions urbaines. Sous le protectorat français, l’image des Juifs berbères va être définitivement établie conformément aux études qui leur seront consacrées par l’ethnographie coloniale, ainsi que par les hommes de l’Alliance israélite universelle. Enfin, la société israélienne va y ajouter sa touche, reflétant l’apport sioniste et le développement de stéréotypes à l’égard des Juifs marocains, dont la plupart ont immigré en Israël entre 1950 et 1960.

Mon propos concerne la façon dont a été formulée la perception des relations judéo-berbères aux XIXe et XXe siècles en me référant tout particulièrement à la documentation sur les Juifs d’Iligh, une communauté qui vivait avec les Berbères dans une région de langue tashelhit, du Sous [4].

La découverte des Juifs berbères L’intérêt des Européens pour les Juifs des régions apparemment " éloignées " du monde n’est pas une invention du XIXe siècle ; ce qui est nouveau, c’est la signification conférée à cet intérêt. La recherche sur les tribus perdues n’est plus motivée uniquement par des considérations d’ordre messianique, car à l’ère du colonialisme triomphant, la recherche ethnographique sur les communautés lointaines d’Orient est devenue un moyen de gouvernement.

De plus, pour les Juifs européens, la découverte de coreligionnaires primitifs n’évoque pas seulement le souvenir des tribus perdues mais leur révèle aussi d’anciennes coutumes disparues, à un moment où eux-mêmes commencent à se considérer comme une nation et se tournent vers les terres bibliques du Levant pour restaurer la souveraineté juive [5].

Au début du XXe siècle, l’orientaliste et hébraïsant Nahum Slouschz parcourut l’Afrique du Nord pour y étudier les origines et l’histoire des communautés juives. Il a été le premier à étudier sérieusement l’histoire des communautés vivant dans les régions intérieures du Maghreb. Slouschz croyait que pendant les siècles qui ont précédé l’expansion arabe en Afrique du Nord, les Juifs, originaires de Palestine, se sont répandus parmi la population berbère et en sont devenus un élément dominant [6]. Durant l’époque coloniale, ses opinions sur les origines berbères des Juifs vont avoir force de loi [7]. En 1906, Slouschz fut envoyé en mission au Maroc par la Mission scientifique du Maroc, grâce à ses relations avec son directeur, Le Chatelier [8]. La mission, parrainée par le Comité de l’Afrique française, a publié les premiers travaux importants sur la société marocaine. Slouschz faisait partie de ce cercle et ses idées influencèrent largement la vision française du judaïsme marocain. Après l’établissement du protectorat français, il retourna au Maroc et fut chargé par les autorités coloniales d’étudier les communautés juives et de soumettre ses conclusions au Résident-Général Lyautey en vue de leur réorganisation. Slouschz était sioniste et, en tant que tel, voulut " régénérer " le judaïsme marocain et réveiller sa conscience nationale juive. C’est en partie à cause de ses idées sionistes que les autorités françaises décidèrent de le relever de ses fonctions officielles [9].

Les tendances sionistes de Slouschz et ses efforts pour découvrir le passé juif berbère pré-arabe du Maroc procédaient d’une vision très cohérente. La population juive urbaine des grandes villes arabes du Maroc était très attachée à ses savants autant qu’à ses traditions. Pour Slouschz, ce sont les Juifs descendant des Berbères (comme il le croyait), avec leurs manières primitives et pénétrées d’influences locales, qui représentent les " vrais " Juifs nord-africains

" maintenant que l’Afrique est entrée également sous l’égide de l’influence occidentale ", écrit-il, " la pénétration de la civilisation française et l’émancipation de nos frères de Tunisie et du Maroc, suivant en cela l’exemple des Juifs algériens, vont faire disparaître le caractère spécifique du juif africain. Comme c’est déjà le cas dans les grandes villes françaises d’Afrique, les changements sociaux ont eu un effet radical sur les masses de la population, qui perdent rapidement leur individualité et leurs traditions millénaires [10] ".

Une fois ces coutumes abandonnées, grâce aux bienfaits de l’éducation occidentale, le judaïsme marocain aura-t-il une autre alternative que celle de rejoindre la nation juive moderne ?

C’est H. Z. Hirschberg qui le premier a mis en doute la thèse admise - établie d’abord par Slouschz et adoptée ensuite par de nombreux chercheurs de l’époque coloniale - selon laquelle les Juifs d’Afrique du Nord descendraient des tribus berbères converties au judaïsme dans 1’Antiquité. Hirschberg étudia systématiquement les traditions anciennes et parvint à la conclusion qu’il y a peu de preuves confirmant la thèse des Berbères judaïsés. D’après lui, la plupart des communautés se formèrent beaucoup plus tard, grâce à l’arrivée de commerçants juifs à l’intérieur du pays. Bien qu’il n’exclut pas qu’il ait pu exister des Berbères judaïsés, Hirschberg est sceptique quant à l’importance de ce phénomène [11]. Dans une étude récente basée sur des données linguistiques et ethnographiques importantes, Paul Wexler a réexaminé cette question, pour aboutir à la conclusion que la grande majorité des Juifs sépharades descendraient d’habitants d’Afrique du Nord convertis au judaïsme et installés en Espagne12. Si l’hypothèse de Wexler était exacte, il en découlerait que la plupart des Juifs marocains (toshavim comme megorashim) descendraient de Berbères convertis.

Les rares preuves contemporaines de l’existence de communautés juives en Afrique du Nord à l’époque pré-islamique ne permettent pas d’affirmer avec assurance l’importance démographique et culturelle du judaïsme parmi les Berbères. La première source historique évoquant des tribus juives berbères date du XIVe siècle. C’est le Kitab al-cibar d’Ibn Khaldoun [13]. Certes il y a également de nombreuses légendes locales sur les Juifs berbères au Sud marocain préislamique. Jacques Meunié, par exemple, est convaincu de l’authenticité de ces traditions et légendes, même si nombre d’entre elles n’ont été consignées que récemment [14]. Quelle que soit notre opinion au sujet de la conversion des tribus berbères au judaïsme dans l’Antiquité, on peut affirmer que des mythes sur les Juifs berbères ont existé au Moyen Age et que ces mythes concernaient également l’origine des Berbères dans leur ensemble. Ces mythes ont été élaborés afin de légitimer le pouvoir mérinide au XIVe siècle [15], avant d’être reformulés durant la période coloniale. L’historicité des légendes sur l’expansion du christianisme et du judaïsme parmi les Berbères à l’époque pré-islamique a pu servir les besoins de l’administration coloniale dans sa volonté de séparer les Berbères des Arabes. Comme l’écrit Jacques Meunié : " malgré la précarité des indications que nous possédons sur l’extension ancienne du christianisme et du judaïsme dans le Sud marocain, [ces traditions] méritent cependant d’être retenues parce qu’elles peuvent aider à connaître les divers éléments de populations berbères et leurs usages anté-islamiques, au cours de siècles plus récents, et même jusqu’à l’époque actuelle [16] ".

Exhumer les séquelles du passé berbère judéo-chrétien est un moyen parmi d’autres visant à justifier le régime colonial au Maroc.

Relations judéo-berbères : un cas particulier ? Les études sur le Maroc des premières années du Protectorat français soulignent les différences existant entre les régions contrôlées par le Makhzen et les régions non soumises au contrôle du gouvernement central : bilad al makhzen / bilad al-siba. Considérée comme une division entre Arabes et Berbères, cette perception prédominante de la société marocaine développée par les ethnographes coloniaux et perpétuée - largement - par l’ethnographie post-coloniale, a été sérieusement remise en question [17]. Peu d’attention a été accordée à la façon dont ce dualisme simpliste entre makhzen et al-siba a influencé les débats sur le judaïsme marocain.

L’affirmation selon laquelle les relations judéo-berbères étaient complètement différentes des relations arabo-juives est liée de très près à cette vision d’une dichotomie entre makhzen et siba. On cite en exemple la protection efficace des commerçants juifs par les chefs tribaux, ou les patrons berbères, au point de les rendre intouchables. " Tout juif de bilad al-siba appartient corps et biens à son seigneur, son sid ", écrit Charles de Foucauld, dont les relations avec les communautés juives du Maroc font partie du corpus historique sur le judaïsme marocain [18]. Bien que le Juif soit protégé, Foucauld le décrit comme un être servile, exploité sans merci par son maître. Comme les régions berbères appartiennent au bilad al-siba, les Juifs se doivent d’obtenir la protection de chefs locaux et indépendants du Sultan. Slouschz considère la situation des Juifs du bilad al-siba à la manière de Foucauld : " à Tililit commence, pour les Juifs, le pays du servage, on pourrait même dire de l’esclavage. Tout ce que les Juifs possèdent appartient au Qaid, qui a droit de vie et de mort sur ses sujets. Il peut les tuer en toute impunité, il peut les vendre si tel est son désir... En échange de la perte de tous ses droits, le juif jouit de la sécurité, que le maître lui assure au risque de sa propre vie... Un Juif qui veut se marier doit acheter sa future femme au sid auquel appartient le père de la fille et qui est l’unique maître de son destin [19] ".

Alors que certains écrivains de la période coloniale considèrent la vie des Juifs dans les territoires berbères comme plus difficile que dans les régions citadines arabophones, d’autres au contraire, influencés par la thèse développée par l’ethnographie coloniale selon laquelle les Berbères étaient plus libres, plus démocrates et plus indépendants que les Arabes, qualifient la condition des Juifs dans les régions berbères de " meilleure " que parmi les Arabes. Cette idée avait des précurseurs depuis la première moitié du XIXe siècle. D’après Davidson, par exemple, les Juifs du Sous et du Rif étaient la " propriété des Maures ", mais " ils bénéficiaient néanmoins d’une plus grande liberté qu’à Tanger [20] ". De plus, d’après Davidson " les Juifs de l’Atlas sont de loin supérieurs, physiquement et moralement à leurs frères résidant au sein des Maures. Leurs familles sont nombreuses, et chacune d’elles est sous la protection immédiate d’un Berbère (les habitants originels d’Afrique du Nord), d’un patron, ou d’un seigneur. Ils ont par ailleurs leur propre sheikh, un juif, à la décision duquel tous les cas sont soumis. À la différence des Juifs résidant parmi les Maures, qui sont soumis à la loi musulmane, ils ne vivent pas dans le même état d’avilissement ou de servitude ; ils développent des relations de type patron/client [avec leurs voisins], tous ont les mêmes privilèges, et le Berbère est tenu de défendre la cause du juif en cas d’urgence. Ils disposent d’armes, et servent leurs patrons à tour de rôle [21] ".

Famille juive devant la porte de sa maison du mellah d’Illigh, Anti-Atlas, 1953 En un lieu indéfini au sud de l’Atlas que Davidson n’a pas pu atteindre durant son voyage, on rapporte que 3 000 à 4 000 Juifs " vivent en toute liberté, et pratiquent tous les métiers ; ils possèdent des mines et des carrières qu’ils exploitent, ont de grands jardins et d’immenses vignobles, et cultivent plus de maïs qu’ils ne peuvent en consommer ; ils disposent de leur propre forme de gouvernement, et possèdent leurs terres depuis l’époque de Salomon [22] ". Faisant sien le point de vue de Davidson, Richardson y ajoute que les pratiques religieuses de ces Juifs, datent de l’époque pré-exilique, et de ce fait " ils redisposent les parties du Pentateuque et de la Torah dans le même ordre que celui de l’ensemble des Juifs ". Vivant isolés, ils considèrent leurs frères des autres parties du Maroc comme des hérétiques [23]. Les Juifs de l’Atlas jouissent d’une " quasi indépendance vis-à-vis de l’autorité impériale ", comme leurs voisins berbères. De plus, ces Juifs " possèdent toutes les caractéristiques des montagnards... ils portent le même costume qu’eux, et on ne peut pas les distinguer [de leurs voisins musulmans [24]]".

L’une des raisons pour lesquelles certains écrivains de la période coloniale considéraient la situation des Juifs parmi les Berbères comme meilleure que parmi les Arabes venait de l’idée que les Juifs étaient totalement intégrés à la société berbère, partageant nombre de coutumes de leurs voisins musulmans. On considérait que les Juifs du Haut-Atlas, par exemple, vivaient en paix et en symbiose avec les Musulmans [25]. Les chercheurs contemporains se sont appuyés souvent sur la littérature ethnographique coloniale pour décrire les relations entre Musulmans et Juifs dans l’intérieur du pays. Malheureusement peu de Juifs originaires des zones berbères ont été interrogés sur leur expérience. Aussi loin que l’on remonterait, on découvrirait sans doute une variété d’expériences que l’on ne saurait ramener à une simple dichotomie arabo-berbère ou à un clivage entre zones citadines et rurales. Les sources dont nous disposons sur les relations entre Musulmans et Juifs à Iligh pendant la période pré-coloniale offrent à cet égard une image très contrastée de ces relations.

Les sources provenant d’Iligh montrent que la communauté juive de cette localité, aussi bien que la communauté voisine d’Ifran, étaient étroitement liées au chef de la puissante famille du Sharif de la famille Abu Dami’a. Les signatures et parfois les déclarations en judéo-arabe des Juifs d’Iligh et d’Ifran quand ils recevaient des acomptes du Shanf ou quand ce dernier leur payait ses dettes, sont consignées dans deux livres de comptes appartenant à Husayn b. Hashim [26]. Les Juifs d’Iligh, qui voyageaient souvent à Essaouira pour leur commerce, étaient considérés comme des protégés du Sharif. S’ils étaient dévalisés ou tués, le Sharif punissait en représailles la localité à laquelle appartenaient les criminels. Parallèlement, le Sultan étendait sa protection à ses tujjar qui voyageaient à Iligh pour le commerce ou pour recouvrer leurs dettes. Les Juifs entretenaient avec les puissants chefs d’Iligh des relations comparables à celles des Juifs du Sultan. Dans un rapport envoyé d’Essaouira (Mogador) à l’A.l.U, en 1874, par Abraham Corcos il y est relaté que les Juifs d’Iligh considéraient le Sharif comme tout puissant. " Étant donné que ce gouverneur... n’est pas soumis à l’autorité de notre roi du Maroc, tout est objet de prières et de suppliques [27] ". Ce qui y était en cause cependant n’était pas l’oppression du Sharif, mais celle dont la responsabilité en incombait à leur propre Shaykh (Nagid en hébreu) qui était fondé de pouvoir du Sharif. Le Nagid Mas’ud b. Bokha, est décrit comme étant " une personne non civilisée et inculte, qui soutire d’eux (les Juifs d’Iligh) des amendes pour rien ou pour les moindres choses [28] ". Nous y apprenons également que ce personnage même, Mas’ud b. Bokha avait des relations d’affaires étroites avec le Sharif Husayn b. Hashim [29]. Ce qui compte ici, c’est le fait qu’un appel ait été fait à Essaouira, en parfaite connaissance de l’influence exercée par l’Alliance israélite universelle. Sachant l’indépendance virtuelle du Sharif Husayn, les Juifs d’Iligh avaient compris que ce n’était pas au Sultan qu’ils pouvaient demander assistance. Mais vue l’interdépendance économique entre Iligh et Essaouira, c’est par le truchement des Corcos et de l’Alliance qu’ils avaient cru obtenir l’intervention du Sharif contre le Nagid.

Dans les années 1880, les relations entre les Juifs d’Iligh et les autorités d’Iligh changèrent de nature. Désormais, opprimés par le Sharif plutôt que par leur Shaykh, ils firent appel à l’Alliance et à l’opinion juive d’Europe de l’Ouest : sous le joug du puissant Sharif Muhammad b. Husayn b. Hashim, ils pouvaient être dépouillés à tout moment de leurs biens et de leur argent, et quand ils voyageaient pour leur commerce, leurs femmes et leurs enfants étaient tenus en otages sur place. En 1889, un commerçant prospère d’lligh, Isaac Souissa, se plaignit d’avoir été battu à mort par ordre du Sharif, le 9 Av. Il s’enfuit à Essaouira, où il demanda l’aide de l’A.I.U., de l’Anglo-Jewish Association et des consulats étrangers, pour obliger le Sharif d’Iligh à libérer sa femme et ses enfants et les autoriser à le rejoindre à Essaouira. Suivant les témoignages émanant de Juifs de cette localité, la plupart des Juifs du Sous vivaient en paix avec leurs voisins berbères à l’exception d’lligh et de son chef tyrannique [30]. Foucauld, qui visita cette région à la même période, explique que chez les Berbères disposant d’institutions démocratiques, chaque Juif y avait son patron, au contraire de la situation prévalant sous le régime des Shaykhs puissants, comme au Tazerwalt (c’est-à-dire à lligh), où les Juifs appartenaient corps et biens au Shaykh[31].

Plusieurs remarques s’imposent au sujet de ces témoignages. Le fait qu’ils aient été transmis à Essaouira, avec laquelle les Juifs d’Iligh avaient des liens étroits, montre que les Juifs étaient conscients de l’influence des organisations juives étrangères et recherchaient leur intervention. Il faut également souligner le fait que l’indépendance du Sharif d’Iligh fut compromise vers 1880 par les harka du Sultan Moulay al-Hasan [32]. Muhammad b. Husayn fut même nommé Qayid du Makhzen,recevant une maison à Essaouira [33]. Investi de l’autorité du Sultan, son pouvoir dépendait du Makhzen. Ce fut à cette période également que la ville de Tiznit devint le principal centre politique du Sous. Certains Juifs d’Iligh voulurent tirer profit de cette évolution et déménagèrent à Tiznit ou à Essaouira où ils pouvaient bénéficier de nouvelles possibilités commerciales. C’est ainsi que Isaac Souissa vint à la mahalla du Sultan pendant la harka de 1886 pour implorer la protection royale et demander au Sultan la permission de s’installer avec les siens à Tiznit. Il semble toutefois que le Sultan ne souhaitait pas porter atteinte à ses nouvelles relations politiques avec Iligh en provoquant la chute de son économie qui dépendait des commerçants juifs. Ainsi, invoquant le prestige du Murabit d’Iligh, le Sultan évita de faire pression sur le Sharif afin qu’il laisse partir les Juifs. Isaac Souissa et sa famille continuèrent à vivre à Iligh jusqu’au moment où Isaac parvint à s’enfuir à Essaouira en 1889. Le Sharif nia avoir maltraité Isaac ou sa famille et refusa de les laisser partir. Plusieurs mois plus tard, il annonça au Sultan qu’il avait relâché les enfants d’Isaac pour mettre fin aux accusations fallacieuses de la communauté juive à son égard [34]. Le Sharif d’Iligh reconnut à cette occasion que, soumis à des pressions étrangères, le Sultan était désormais le garant de la dhimma (protection) des Juifs du Sous.

De même qu’on a tendance à considérer les relations judéo-musulmanes comme étant le reflet des relations entre le Sultan et ses sujets Juifs, on a aussi tendance à considérer les relations judéo-berbères comme étant l’extension des relations entre les chefs de tribus et leurs protégés juifs. Autant qu’on puisse en projeter le sens dans le passé, les études récentes sur Iligh et sur les Juifs d’Iligh montrent que les liens sociaux entre Juifs et Arabes d’Iligh étaient très étroits, peut-être plus étroits que l’impression qu’en laisse le tableau des relations entre le Sharif et la communauté juive. Il ressort des conversations effectuées en 1980 qu’il les avait souvent fréquentés. Il nous a montré un manuscrit qu’il avait écrit lui-même sur la communauté juive. Il y mentionne en tout début de texte que les Juifs vivant à Iligh ont quitté " notre pays (ou village) pour se diriger vers leur pays " kharaju min baladina ila baladihim, et recense ensuite chaque individu de la communauté, par son nom, sur huit pages, non seulement les chefs de famille, mais aussi leurs femmes et leur enfants. Il poursuit en décrivant les coutumes des Juifs, puis signale " leur knesset, qui s’appelle sla ", et indique par leurs noms les fêtes juives : Pessah, Souccot, Yom Kippour et Hanouka [35], les prières quotidiennes qu’il appelle cArbit (Macariv), Sahrit (shahrit) et Milha (minha), et au moment de la [nouvelle] année, écrit-il, ils font des prières appelées slihot, pour lesquelles ils doivent se lever au milieu de la nuit. Le Faqih nous a également raconté qu’il écrivait des amulettes pour les Juifs. Les Juifs d’Iligh interviewés à Casablanca et en Israël nous ont confirmé l’étroitesse de leurs liens sociaux avec les Musulmans, tout en refusant d’admettre que le Faqih leur fournissait des amulettes. Ainsi donc, à la suite de l’exemple de cette seule communauté juive, nous pouvons affirmer que les relations judéo-musulmanes étaient loin d’être statiques et inchangées.

Le colonialisme et la question judéo-berbère La politique coloniale française à l’égard des Berbères, telle qu’elle a été développée sous Lyautey avant d’atteindre son point culminant en 1930, avec la publication du Dahir berbère visant à séparer les Berbères des Arabes, reposait sur plusieurs stéréotypes. En premier lieu, celui de la résistance des Berbères indigènes du Maroc aux Arabes puis à toute forme d’autorité centrale, préservant jalousement leur liberté, leur individualisme et leurs institutions démocratiques. Deuxièmement, les Berbères n’auraient adopté que superficiellement l’Islam, conservant intactes ou presque leurs coutumes, leurs croyances et leurs superstitions pré-islamiques. Par conséquent, ils auraient résisté à l’application de la Sharia, maintenant farouchement leurs lois coutumières. Faute de respecter l’autorité suprême du Amir al-Mu’minin, les Berbères auraient " produit " leurs propres chefs marabouts. Le culte des saints, répandu chez les Berbères, serait le vestige d’une pratique pré-islamique. Fortement influencées par ces idées, les autorités françaises ont cru que les anciennes zones siba pourraient être assimilées à la culture française afin d’empêcher les progrès de l’arabisation [36].

Ces stéréotypes sur les Berbères furent d’une certaine façon reproduits à l’égard des Juifs vivant parmi les Berbères dont l’histoire, selon Slouschz, ne serait " que la quintessence de l’histoire des Berbères ". D’après lui, c’est " dans le blad es-siba, dans les qsour algériens et tripolitains, demeurés jusqu’ici inaccessible à l’infiltration européenne, qu’on peut retrouver le Judéo-Berbère dans un état à peu près semblable à celui des maghrabia tels que nous les représentent les littératures juives et arabe du Moyen Age ". A l’exemple de la population berbère musulmane qui est superficiellement islamisée, ces Juifs berbères primitifs " du judaïsme ne connaissent presque rien ". Là où il y a des saints judéo-berbères pré-islamiques, on trouve ces populations anciennes [37]. Slouschz se fait l’écho du discours colonial sur les Berbères, quand il écrit que les Juifs de l’Atlas font montre " d’une bonne dose de liberté [38] ". La dichotomie excessive entre makhzen et siba, élaborée pendant la période coloniale, est reproduite par Slouschz les Juifs du bilad al-makhzen reçoivent la protection royale de la dhimma, alors que ceux du bilad al-siba reçoivent celle de Sayyid individuels. Ces stéréotypes attachés aux Juifs vivant parmi les Berbères ont perduré pendant toute la période coloniale, pour devenir partie intégrante des idées reçues sur le Maroc traditionnel que l’on rencontre reproduites dans de nombreux ouvrages.

Toutefois il ne s’agissait pas seulement de représentations de l’Autre telles qu’elles avaient cours chez les Européens. Les Juifs marocains eux-mêmes ont fini par intérioriser ces stéréotypes, en particulier ceux d’entre eux ayant reçu une éducation française. Les Juifs du Haut-Atlas, du Sous et du Sahara - régions que les Français ont mis du temps à contrôler - étaient considérés par les Juifs marocains des villes comme des marginaux. Le mythe des Juifs berbères répercuté par les maîtres de l’Alliance et par les chercheurs français était devenu la réalité pour les Juifs marocains eux-mêmes. Dans l’étude la plus détaillée sur les conditions de vie des Juifs du Sud marocain, publiée peu après l’indépendance et basée essentiellement sur les informations fournies par les directeurs des écoles de l’Alliance, Pierre Flamand explique comment la " mentalité " des Juifs autochtones originaires des régions berbères a été façonnée par le milieu berbère. D’après lui, les Juifs appelés Shleuh sont faciles à identifier du fait de leurs noms, de leurs traits physiques et leur mode de comportement qui leur sont très typiques : leurs coreligionnaires d’autres extractions reconnaissent les Juifs dits shleuh à leurs patronymes : Abergel, Abouzaglo, Amoch, Assouline, Chriqui, Harrus, Oiknine, etc., et à quelques traits physiologiques et caractériels sommaires : larges épaules, fortes poitrines, yeux vifs dans des visages à traits fermes et droits, esprit d’entreprise, acceptation de rudes besognes [39].

L’épithète utilisé par les Juifs marocains pour désigner leurs coreligionnaires moins évolués, " fils de shleuh " avait une connotation péjorative. Répercutée chez Flamand cette image stéréotypique des Juifs ruraux s’est transportée en Israël par les immigrants juifs du Maroc et le terme shleuh est devenu synonyme de simplet en argot israélien.

Déjà à l’époque pré-coloniale, la migration des Juifs ruraux vers les villes a produit des clivages entre Judéo-berbères et Judéo-arabes. A Essaouira et à Marrakech, les Juifs " autochtones " se distinguaient de leurs coreligionnaires ruraux. Cependant une fois installés en ville, les Juifs berbères s’arabisaient et s’adaptaient à un environnement urbain plus civilisé [40]. Ce processus s’intensifia à l’époque coloniale, mais un certain nombre de Juifs vécurent dans leur région d’origine jusqu’à leur départ en Israël [41]. Par conséquent, les porte-parole de l’urbanisation et du progrès établirent une division hiérarchique entre les différents types de Juifs marocains que l’on retrouve souvent chez Slouschz et ses émules postérieurs. Ces différents types seraient les suivants Juifs hispanophones, à Tanger et dans les régions du Nord ; Juifs parlant français et arabe, sur la côte et dans les villes de l’intérieur ; groupe arabo-berbère du centre du pays ; groupe arabe et shleuh du sud ; Juifs arabophones du Sahara [42]. Les classifications postérieures adoptées par les chantres de l’occidentalisation, comme l’Alliance, ramenèrent ces divisions à quatre catégories essentielles hispanophones, francophones occidentalisés, arabophones et berbérophones.

Les divisions sociales, suivant le schéma tracé par Slouschz, correspondaient aux divisions entre : makhzen et siba, monde urbain / monde rural. Cette vision simpliste devait influencer un bon nombre de chercheurs ayant travaillé sur les Juifs marocains durant le Protectorat français [43]. Inventée ou réelle, elle influença pareillement la politique de l’organisation qui a marqué le plus la vie des Juifs marocains pendant le protectorat français : l’A.I.U et ses écoles qui distinguèrent entre les Juifs du bled, comme on appelait les Marocains ruraux, et ceux de la ville. Ces stéréotypes ont été intériorisés par les Juifs marocains eux-mêmes, qui considéraient les Juifs des régions parlant tashelhit spécialement ceux des montagnes de l’Atlas, comme des Shleuh primitifs, bien que ceux-ci aient eu généralement des conditions de vie plus saines que celle de leurs frères des mellah urbains. Pendant la période du Protectorat, des tensions très vives entre les différentes couches de la population, accompagnèrent l’arrivée de nombreux Juifs ruraux originaires de l’Atlas dans le mellah de Marrakech. Ce qui fit dire, en 1940, à un observateur vivant à Marrakech que les Juifs " étrangers ", d’origine espagnole qui étaient mieux éduqués, furent submergés par les Juifs berbères. Ces Juifs ruraux, pensait-on, " ne pratiquaient qu’un judaïsme très primitif approprié à leur mentalité. La culture de la Torah, l’observation de quelques rites extérieurs, l’aumône au rabbin de Palestine, le mépris et l’hostilité des populations qui l’entourent tels étaient les seuls liens qui les rattachaient à la famille d’Israël ". Ces Juifs berbères primitifs, une fois urbanisés, devinrent plus juifs. Mais " de ces origines surtout rustiques et montagnardes, le juif marrakchi semble avoir gardé quelque chose de farouche et de têtu. Parmi ces coreligionnaires marocains, c’est lui qui se rattache aujourd’hui avec le plus de force aux coutumes de ses ancêtres [45] ". Flamand, qui reprenait les idées de ses informateurs de l’Alliance, considérait que les traditions religieuses des Juifs du Sud avaient été contaminées par des influences " orientales ", déformées par un isolement millénaire des grands centres du judaïsme mondial, assimilant et intégrant concepts et symboles de l’Islam, ainsi que toutes sortes de rites païens tirant leurs sources d’un animisme agraire chargé de pratiques superstitieuses. Les Juifs restés dans les régions berbères, de plus en plus isolés du reste du pays au fur et à mesure que s’intensifiait l’urbanisation, étaient plus marginalisés encore, et cela d’autant plus que l’émigration les privait de leurs meilleurs éléments [47]. Le fossé entre ceux qui restaient dans les campagnes, parmi les Berbères, et ceux vivant en ville était plus profond que jamais : " entre le Juif espagnol ou oriental lettré érudit, urbain et le Juif berbère, fruste, primitif, attaché à son sol, l’opposition est saisissante [48] ".

Jeune femme en tenu traditionnelle, Tineghir, vallée du Todra, 1958 Ainsi, l’image du Juif berbère, " isolé du monde civilisé [49] ", descendant des tribus berbères autochtones et maintenant des coutumes primitives était parfaitement acceptée par la société coloniale. L’idée de trouver des Juifs shleuh a guidé initialement mes recherches dans le Sous. Une des questions à laquelle je voulais répondre était de savoir jusqu’à quel point les Juifs de l’Atlas et de l’Anti-Atlas utilisaient le berbère dans l’enseignement pour expliquer et traduire les textes religieux, ou pour réciter certaines prières seulement [50]. La question fut posée déjà par Galand et Zafrani avec la publication de la Haggada de Pessah de la communauté juive de Tinrhir, basée sur un texte oral en tamazight. Cette Haggada berbère a toutefois soulevé plus de questions qu’elle n’a apporté de réponses. Le paysage linguistique de la communauté juive, comme le souligne Zafrani, n’est pas net. La question de l’usage du berbère par cette communauté et par d’autres communautés judéo-berbères à des fins liturgiques est loin d’être élucidée.

Certaines preuves linguistiques semblent démontrer l’existence, au XXe siècle, de communautés juives éparses berbérophones. Certains chercheurs estiment que ce phénomène était beaucoup plus étendu que je ne le considérais moi-même. Des recherches récentes effectuées en Israël parmi les Juifs originaires de régions berbérophones m’ont confirmé cependant que très peu de communautés parlaient berbère à la maison avant la seconde guerre mondiale [51]. Peu d’observateurs des périodes antérieures se sont penchés sur la géographie linguistique juive du Maroc rural. Exception faite de Foucauld qui affirme : " les Israélites du Maroc parlent l’arabe. Dans les contrées où le tamazight est en usage, ils le savent aussi ; en certains points le tamazight leur est plus familier que l’arabe, mais nulle part ce dernier idiome ne leur est inconnu [52] ". Foucauld se réfère-t-il aux deux dialectes du Moyen-Atlas, le tamazight et le tashelhit ? Ce n’est pas clair. Mais ses observations datant de la fin du XIXe siècle, selon lesquelles la plupart des Juifs des régions berbérophones connaissaient aussi bien le berbère que l’arabe et que dans certains endroits le berbère était mieux connu que l’arabe, semblent plausibles. Il s’avère par ailleurs que nombre de communautés importantes du Sous et du Haut-Atlas étaient arabophones même si la plupart des Juifs y parlaient aussi le berbère [53]. C’était le cas d’Iligh dont les habitants juifs parlaient l’arabe. Bien qu’on connaisse mal leur passé lointain, les documents écrits montrent que le judéo-arabe était leur langue de culture, du moins depuis le début du XIXe siècle. L’hébreu aussi était connu de l’élite culturelle, mais il n’y a nulle part trace du judéo-berbère, ni dans les textes écrits, ni dans la tradition orale. On n’a retrouvé aucune tradition indiquant que le berbère était utilisé dans l’enseignement, dans la lecture de textes religieux ou dans la récitation des prières.

S’agissant encore de la communauté juive d’Iligh, ce qui est frappant dans son histoire relativement courte - moins de 400 ans - c’est son cosmopolitisme et son ouverture relative sur le monde. Ainsi, ses habitants eurent vent, au début du XVIIe siècle, de l’avènement de Shabtai Tzvi [54].

Iligh fut détruite par Moulay Rashid en 1670, mais retrouva sa position politique à la fin du XVIIIe siècle sous Sidi Hashim. En 1815, Sidi Hashim est ainsi décrit : " un homme entre 50 et 60 ans, possédant une grande richesse et un grand pouvoir ; il est très rusé et très brave mais rapace et cruel ; il a sous ses ordres 15 000 cavaliers des mieux armés... Toutes les caravanes qui traversent le désert... jugent nécessaire de s’assurer son amitié et sa protection par des présents. Entre ce chef et l’empereur du Maroc existent la plus implacable des haines et une jalousie continuelle qui, il y a quelques années, a éclaté en guerre ouverte [55] ". Assurément le chiffre de 15 000 soldats est exagéré, car un marin naufragé qui fut détenu pendant un certain temps dans l’Oued Noun parle de 600 Arabes " montés " seulement sillonnant le pays [56]. Mais les observateurs contemporains évoquent la puissance politique d’Hashim et le rôle prépondérant d’Iligh dans le commerce transsaharien. Grâce à ses commerçants juifs, Iligh était reliée à l’Europe par le port d’Essaouira [57]. Il n’y avait pas que les marchandises et les commerçants qui arrivaient du littoral à lligh. Des émissaires de Palestine, comme Haim Joseph Masliah, en 1817, passèrent également par Iligh [58], ainsi que des marins européens naufragés sur la côte et tenus en otage à Iligh. Grâce à leurs relations avec le port d’Essaouira, les Juifs d’Iligh servaient d’intermédiaires pour le rachat et la restitution de ces captifs aux consulats européens installés dans cette ville [59].

Avec le déclin du commerce transsaharien et la ruine d’Essaouira comme port international à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, Iligh cessa d’être un centre de commerce international. Ceci porta atteinte à la communauté juive locale dont les relations avec le monde extérieur s’amenuisèrent. Cette situation s’aggrava davantage encore pendant la période coloniale et jusqu’à la seconde Guerre mondiale. Après la guerre, l’Alliance commença à développer son réseau des " écoles de bled ". Dans l’optique de ses dirigeants, cette expansion à l’intérieur du " vrai bled " devait englober les " villages isolés des vallées de l’Atlas, du grand Sud et des oasis pré-sahariennes [60] ". C’est donc vers la fin du Protectorat français qu’Iligh devait attirer l’attention de l’Alliance qui y créa sa première école en 1954 [61], aussitôt fermée avec le départ de la communauté quelques années plus tard. Pour marquer l’ouverture de l’école, on tourna un film : " Ils seront des hommes ". Lors de la projection du film, Jules Brunschvig, le vice-président de l’Alliance, proclama : " l’École tirera ces populations de leur misère [62] ". Un délégué de l’Alliance, en visite à Iligh, mentionna l’école comme " ’héroïne si l’on peut dire, du récent film de l’Alliance, et qui le mérite si bien [63] ". Toutefois, après l’indépendance du Maroc, l’idée de perpétuer les communautés juives des petits mellah du Sud marocain fut rapidement abandonnée, les dirigeants du judaïsme marocain ne pouvant faire grand-chose pour relever ces communautés rurales du Sud, pensant que celles-ci seraient mieux en Israël. " J’ai vidé les mellah ", me dit un membre important de la communauté en 1981.

Iligh était considérée comme éloignée du monde civilisé tant par les Juifs urbains que par l’Alliance. Sa communauté qui s’installa en Israël, entre la fin des années 1950 et le début des années 1960, n’était pas aussi éloignée du monde juif, comme les hommes de l’Alliance se l’imaginaient. Mais avant leur départ, les Juifs d’lligh ont enterré dans la vieille synagogue de leur localité une Geniza que j’ai fouillée en 1981. Malheureusement, presque tout son contenu était en décomposition à cause de l’humidité du sol. Il en restait quelques fragments datant de la période précédant le départ des Juifs. Des textes religieux, des livres de prières ainsi que des fragments de lettres et de livres de comptes en judéo-arabe. Certains fragments révélaient que quelques livres de prières en usage à lligh avaient été publiés en Pologne. Contrairement à l’idée prévalant en Israël, selon laquelle les Juifs de cette contrée étaient totalement ignorants du sionisme politique, la Geniza d’lligh nous a apporté la preuve de la diffusion de textes hébreux modernes et de pamphlets sionistes.

La recherche sur les Juifs vivant parmi les Berbères reste encore à faire et nous sommes conscients des lacunes qui restent à combler. Ce que j’ai essayé de montrer dans cette étude est que notre savoir sur les Juifs ruraux du Maroc reste largement tributaire des stéréotypes sur le Juif berbère, stéréotypes acceptés aussi bien par le colonisateur et que par les colonisés - reflétant les divisions internes existant au sein des communautés juives du Maroc sous le protectorat. Ces divisions ont été entretenues en Israël du fait de la pérennité des mythes concernant les Juifs berbères.

Source: amazigh.info

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29 septembre 2005 4 29 /09 /septembre /2005 00:00
Cultes de lantiquité : Mythologie et religions en Afrique du Nord

 

Bien avant la venue des Romains en Afrique, les Nords Africains avaient des pratiques religieuses qui ont d’une certaine façon été "enrichies" par les cultes barbares et sanguinaires des Phéniciens. Ces derniers respectèrent les croyances des autochtones du fait d’une analogie probable de la plupart des rites et les dispensèrent donc de faire du prosélytisme. Par la suite, ils ont adopté les dieux phéniciens dont les plus importants furent Baal Hammon et Tani Péné Baal, la Déesse.

D’autre part, pendant plusieurs siècles le dieu bélier fut adoré par les Berbères ; des stèles gravées et des statuettes à l’image du bélier divin ont été retrouvées dans toute l’Afrique du Nord.

Les tribus berbères adoraient un dieu appelé Gurzil au service duquel Jerin roi des Levathes (Louata) était consacré en qualité de prêtre. Il semble donc en définitif qu’il y ait eu fusion des divinités berbères et puniques, et qu’ensuite elles aient été admises dans le panthéon Romain, ils passèrent ainsi un polythéisme plus organisé. Les Carthaginois n’eurent pas de dissensions avec les autochtones préoccupés avant tout par l’aspect tout commercial de leurs relations. Peuple pratique avant tout, ils attirèrent à eux les populations autochtones par les intérêts matériels. La religion carthaginoise, ce mélange de rites sanglants et de superpositions eut généralement répugné les Berbères qui iront rarement jusqu’à immoler’ leurs enfants pour plaire à leurs divinités. Tertullien nous apprend que même de son temps, on sacrifiait des enfants à Saturne et ceci près de deux siècles après l’avènement du christianisme ! Les stèles dédiées à Saturne et qui avaient pris la place de Baal Hammon des Phéniciens n’étaient pas rares en Afrique. Ainsi à titre d’exemple à Ain Tounga (l’ancienne Thinaga des Romains) près de 400 stèles ont été trouvées près de Tunis. Il en est de même en Algérie plus exactement aux Ouled Agla (au sud de Bordj Bou Arréridj), une stèle à Saturne comparable à celles connues de Sétif, Béni Fouda, dédiée par un prêtre Caelicus Sabinus et sa femme. Cependant Saturne ne fut pas la seule divinité les Berbères rendaient aussi en général un culte à leurs rois numides après leurs morts ; C’est le cas notamment du Juba II. Ce culte d’adoration des rois et empereurs était aussi pratiqué à Rome. Ce culte des divinités devient populaire chez les Africains qui, après la mort de leurs rois indigènes les adoraient comme des dieux. Ces pratiques religieuses subsistèrent parallèlement à l’apparition de Judaïsme et par la suite du Christianisme qui tour à tour et sans qu’il y ait prédominance absolue de l’une ou de l’autre des religions, se sont substituées progressivement aux rites berbères "propres". Les théologies catholiques

Cyprien :

Théologien d’expression latine est l’un des plus illustres Pères de l’Eglise latine, il est né à Carthage au début du 3ème siècle et meurt en 258 rhéteur et martyr. Il fut baptisé vers 246 évêques de Carthage en 249. Ce fut lui qui organisa l’Eglise d’Afrique. Sa tâche fut compliquée par le schisme de Novatien puis par la peste qui désola Carthage en 253. Il s’opposa au pape Etienne dans la question de baptême conféré par les hérétiques. IL fut décapité en 258 par Valérien.

Optât de Milev :

Né à Milev (Mila près de Constantine) vers 320, mort vers 392. Evêque de Milev, il est l’auteur d’un ouvrage en sept livres contre les donatistes. Augustin : Théologien d’expression latine, il est le plus Célèbres des Pères de l’Eglise latine : né à Tagaste (Souk-Ahras en Algérie) en 354, il meurt à Hippone (Annaba) en 430. Son père était païen, sa mère chrétienne. IL se fit baptiser par Ambroise en 387. Prête à Hippone en 391, il devient évêque en 396. L’influence de Docteur de l’Eglise est certainement la plus forte de celles qui ont marqué la théologie. Les grands thèmes augustiniens connaissance et amour, mémoire et présence, sagesse) ont dominé toute la théologie occidentale jusqu’à la scolastique thomiste.

Originaires de Berbèrie

A - Victor 1er : pape de 189 à 199, il meurt à Rome en 199. Il gouverna l’Eglise à la fin de son règne de Commode et au début de celui de Septime Sévères C’est à dire à une époque relativement calme pour l’Eglise. Il du intervenir dans les affaires doctrinales. Il ne semble pas qu’il ait subi le martyre.

B - Miltiade : pape d 311 à 314, il meurt à Rome en 314. Il est appelé parfois à tort Melchiade. Il obtient de Maxence la restitution des biens de l’Eglise confisqués depuis 303 et fut témoin du triomphe de Constantin au pont Milvius, en 312, il réunit un concile au Latran, contre les donatistes. Il serait le premier pape non martyrisé. C - Gélase 1er : pape de 492 à 496, il meurt à Rome en 496. Il combattit les manichéens, les pélasgiens et les ariens. Il définit avec netteté la subordination du temporel au spirituel et la primauté de l’Eglise romaine, refusant même au patriarche de Constantinople le rang de métropolite. Restaurant systématiquement la discipline du clergé, il est surtout connu par le décret gélasien, attribué parfois à Damase, qui distingue les écrits canoniques et apocryphes, et par le sacramentaire gélasien. Parmi les cinquante et un papes dénombrés jusqu’à la fin du 6ème siècle, trois sont berbères et un ibère.C’est au cours de la primatie de Miltiade qu’eut lieu la conversion de l’empereur Constantin, et l’édit de Milan qui mettait aux persécutions.

Rites funéraires : Les rites funéraires berbères

Les anciens Berbères enterraient leurs morts et possédaient des rites funéraires. Leurs tombeaux variaient de la simple fosse surmontée de terre ou du tumulus de pierres au superbe mausolée royal.

La position du corps dans la tombe variait d’une religion à une autre. On a retrouvé ainsi des corps étendus de tout leur long. en position fléchie ou encore les genoux ramenés jusqu’au menton. On a pensé que cette position visait à réduire l’espace occupé par le mort, mais elle correspond probablement à un rite de reconnaissance, le défunt prenant la forme du foetus dans le ventre de sa mère.

Les Berbères avaient un grand respect de leurs morts. Comme de nombreux peuples de l’antiquité, il craignaient qu’un abandon ou mauvais traitement ne favorise leur retour sous forme de fantômes ou de mauvais esprits. En les traitant bien, au contraire, ils s’assuraient leur protection et bénéficiaient de leur connaissance de l’au-delà.

Les pratiques funéraires berbères.

Les rites funéraires sont si nombreux chez les Libyens qu’on a parlé, à leur propos, d’une véritable religion funéraire. En fait- il- s’agit de pratiques archaïques que ni l’influence punique ni la romanisation n’ont pu effacer. Certains rites, comme les sacrifices animaux ou la communication avec les morts, nous sont parvenus, sous des formes plus ou moins altérées.

La sépulture : comme nous l’avons vu ci -dessus, celle-ci prend diverses formes : tumulus de pierres recouvrant une fosse ou au contraire un mausolée élevé à la gloire d’un souverain. Les besoins des morts : on croyait que le mort continuait à vivre dans l’au-delà, aussi subvenait-on à ses besoins en déposant dans la sépulture des aliments, des armes et des poteries. Les sacrifices d’animaux : avant ou après l’enterrement, comme cela se pratique encore dans de nombreuses régions du Maghreb, on procédait à des sacrifices d’animaux. Dans les tombes préhistoriques les ossements humains sont souvent mêlés aux ossements animaux : boeuf, mouton, chèvre, oiseaux, cheval, lapin, chameau, gazelle...

La protection magique : pour soustraire le cadavre à l’anéantissement, on le parait d’objets magiques, bijoux de cuivre ou colliers de coquillages. Quand le cadavre avait subi la décarnisation on peignait le squelette de rouge, couleur de la vie et de la force.

L’incubation. Pour communiquer avec les morts, les anciens Berbères recouraient à l’incubation. Cette pratique divinatoire attestée dans toutes les civilisations méditerranéennes consistait à prier puis à s’endormir sur la tombe du mort qui communiquait alors au moyen du rêve, sa volonté. On s’endormait aussi dans les temples et on recevait, toujours au moyen du rêve des messages des dieux. Rites païens, l’incubation fut interdite par l’islam qui la remplaça par l’istikhara, prière de demande par le rêve. Mais le vieux rite a subsisté et on y recourt encore dans de nombreuses régions du Maghreb. Au Maroc, il est courant de passer la nuit au pied des tombeaux des saints, dans certaines régions de Kabylie, on dort sur la tombe du mort dont on veut connaître les volontés, au Hoggar, les femmes dorment à proximité des vielles tombes pour avoir des nouvelles de leurs maris absents. 3- Culte des ancêtres

Dans la pensée méditerranéenne traditionnelle telle qu’elle est encore exprimée par les paysans d’Algérie, les morts et les vivants sont tellement mêlés dans la vie quotidienne, associés aux même gestes et aux même rites, qu’il est difficile de dire si les morts sont encore liés à leurs clans terrestres ou si les vivants participent encore ou déjà au plan des choses de l’invisible.

Il n’y pas de culte des morts à proprement parler. Le plan humain se propage dans l’invisible par les morts, continuant l’étroite solidarité de la famille méditerranéenne. Le paysan algérien qui traverse un cimetière en salue les habitants comme il saluerait ses égaux assis sur les bancs de pierres de la place du village ou sur les nattes du café maure. Vivants et morts membres d’une même famille s’entraident de tous les moyens dont ils disposent. Le mort reste membre du groupe terrestre, comme l’ouvrier parti pour la France reste solidaire des siens. Il sait qu’il peut compter sur l’exactitude des vivants à accomplir les rites.

Les rites de passage marquent les saisons de la vie de l’homme et, comme les rites agraires, sont empreints d’un caractère funéraire venu de la volonté des vivants d’associer les morts au rythme de la vie terrestre. Le deuil n’est pas une manifestation de tristesse subjective, mais une attitude rituelle prescrite pour entrer en communication avec ceux que les paysans appellent les gens de l’autre Vie ita. Il est impossible d’étudier un seul des aspects de la vie des paysans maghrébins sans se référer à ce monde des morts toujours présent dans leur pensée, à ces croyances nouées autour des stèles de pierre ou de bois auxquelles les religions révèles qui ont recouvert l’Afrique du Nord ont dû, l’une après l’autre, se soumettre.

Les religions révélées se sont insérées sans heurts dans cet ensemble harmonieux de croyance et d’institutions. Le christianisme a adopté les tombeaux et les hauts lieux : mais il n’entre pas dans le cadre de cette étude de parler du culte des saints dans le nord de la méditerranée ;le rigide judaisme et l’islam ont accepté les morts comme intermédiaires naturels des hommes et de l’Invisible, leur ajoutant une couronne de pieuses vertus et de miracles, monotones dans leur répétition.

Mais les traditions populaires montrent bien que les religions révélées, ailleurs puissantes, ont du disparaitre du nord de l’Afrique, comme le christianisme, sans laisser la moindre trace dans les coutumes et dans les moeux, alors que les tombeaux ont traversé les siècles et les invasions parce qu’ils sont les môles d’amarrage de la pensée mère de toute une civilisation. Les conceptions méditerranéennes de l’homme et de l’univers les plus subtiles, avec tous leurs symboles et leurs mystères, reposent sur la clé de voute unique que nous trouvons présente dans la pensée des paysans maghrebins.

Pour comprendre l’univers, l’homme doit se connaître, et nous qui cherchons à comprendre l’univers du paysan maghrébin afin d’atteindre l’univers méditerranéen, nous devons connaitre d’abord sa reprentation de la personne humaine, une "personne"que le dernier des paysans conçoit comme faite d’abord de principes bindivisibles placés sous la garde d’un ange.

Le grave Salut des paysans : ¨Assalam alaykoum¨la paix sur vous-n’emploie pas un pluriel de politesse, étranger an langage, courant, mais un pluriel réel qui s’adresse aux entites réunies dans la personne humaine et à l’ange qui les accompagne. Ainsi, par ce salut si souvent répété dans la vie quotidienne, nous pouvons pénétrer au plus intime, de pensée des paysans maghrebins, au plus secret des philosophies méditerranéennes. Dans les conceptions populaires du nord de l’Afrique, le corps humain, à l’image de l’univers, est formé de couples .

Le mot qui designe le corp avecle sens refléchi de "personne"est un masculin pluriel en tamazight : "iman". Il est habité par deux âmes : une âmes : une âmes végétative"nefs, une âme subtile ou souffle"rruh". Al’âme végétative, correspondent les passions et le comportement émotionnel, elle est portée par le sang, son siège est dans le foie. Al’âme subtile ou souffle, correspond la volonté, elle circule dans les os, son siège est le coeur.

Le Matin

Source: amazigh.info

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17 septembre 2005 6 17 /09 /septembre /2005 00:00
 Cultes de l'antiquité : Mythologie et religions en Afrique du Nord 


Bien avant la venue des Romains en Afrique, les Nords Africains avaient des pratiques religieuses qui ont d'une certaine façon été "enrichies" par les cultes barbares et sanguinaires des Phéniciens. Ces derniers respectèrent les croyances des autochtones du fait d'une analogie probable de la plupart des rites et les dispensèrent donc de faire du prosélytisme. Par la suite, ils ont adopté les dieux phéniciens dont les plus importants furent Baal Hammon et Tani Péné Baal, la Déesse.

Les tribus berbères adoraient un dieu appelé Gurzil au service duquel Jerin roi des Levathes (Louata) était consacré en qualité de prêtre. Il semble donc en définitif qu'il y ait eu fusion des divinités berbères et puniques, et qu'ensuite elles aient été admises dans le panthéon Romain, ils passèrent ainsi un polythéisme plus organisé. Les Carthaginois n'eurent pas de dissensions avec les autochtones préoccupés avant tout par l'aspect tout commercial de leurs relations. Peuple pratique avant tout, ils attirèrent à eux les populations autochtones par les intérêts matériels. La religion carthaginoise, ce mélange de rites sanglants et de superpositions eut généralement répugné les Berbères qui iront rarement jusqu'à immoler' leurs enfants pour plaire à leurs divinités. Tertullien nous apprend que même de son temps, on sacrifiait des enfants à Saturne et ceci près de deux siècles après l'avènement du christianisme !
Les stèles dédiées à Saturne et qui avaient pris la place de Baal Hammon des Phéniciens n'étaient pas rares en Afrique. Ainsi à titre d'exemple à Ain Tounga (l'ancienne Thinaga des Romains) près de 400 stèles ont été trouvées près de Tunis. Il en est de même en Algérie plus exactement aux Ouled Agla (au sud de Bordj Bou Arréridj), une stèle à Saturne comparable à celles connues de Sétif, Béni Fouda, dédiée par un prêtre Caelicus Sabinus et sa femme.
Cependant Saturne ne fut pas la seule divinité les Berbères rendaient aussi en général un culte à leurs rois numides après leurs morts ; C'est le cas notamment du Juba II. Ce culte d'adoration des rois et empereurs était aussi pratiqué à Rome. Ce culte des divinités devient populaire chez les Africains qui, après la mort de leurs rois indigènes les adoraient comme des dieux. Ces pratiques religieuses subsistèrent parallèlement à l'apparition de Judaïsme et par la suite du Christianisme qui tour à tour et sans qu'il y ait prédominance absolue de l'une ou de l'autre des religions, se sont substituées progressivement aux rites berbères "propres". Les théologies catholiques
Cyprien :
Théologien d'expression latine est l'un des plus illustres Pères de l'Eglise latine, il est né à Carthage au début du 3ème siècle et meurt en 258 rhéteur et martyr. Il fut baptisé vers 246 évêques de Carthage en 249. Ce fut lui qui organisa l'Eglise d'Afrique. Sa tâche fut compliquée par le schisme de Novatien puis par la peste qui désola Carthage en 253. Il s'opposa au pape Etienne dans la question de baptême conféré par les hérétiques. IL fut décapité en 258 par Valérien.
Optât de Milev :
Né à Milev (Mila près de Constantine) vers 320, mort vers 392. Evêque de Milev, il est l'auteur d'un ouvrage en sept livres contre les donatistes.
Augustin :
Théologien d'expression latine, il est le plus Célèbres des Pères de l'Eglise latine: né à Tagaste (Souk-Ahras en Algérie) en 354, il meurt à Hippone (Annaba) en 430. Son père était païen, sa mère chrétienne. IL se fit baptiser par Ambroise en 387. Prête à Hippone en 391, il devient évêque en 396. L'influence de Docteur de l'Eglise est certainement la plus forte de celles qui ont marqué la théologie. Les grands thèmes augustiniens connaissance et amour, mémoire et présence, sagesse) ont dominé toute la théologie occidentale jusqu'à la scolastique thomiste.

Originaires de Berbèrie

A - Victor 1er : pape de 189 à 199, il meurt à Rome en 199. Il gouverna l'Eglise à la fin de son règne de Commode et au début de celui de Septime Sévères C'est à dire à une époque relativement calme pour l'Eglise. Il du intervenir dans les affaires doctrinales. Il ne semble pas qu'il ait subi le martyre.
B - Miltiade : pape d 311 à 314, il meurt à Rome en 314. Il est appelé parfois à tort Melchiade. Il obtient de Maxence la restitution des biens de l'Eglise confisqués depuis 303 et fut témoin du triomphe de Constantin au pont Milvius, en 312, il réunit un concile au Latran, contre les donatistes. Il serait le premier pape non martyrisé.
C - Gélase 1er : pape de 492 à 496, il meurt à Rome en 496. Il combattit les manichéens, les pélasgiens et les ariens. Il définit avec netteté la subordination du temporel au spirituel et la primauté de l'Eglise romaine, refusant même au patriarche de Constantinople le rang de métropolite. Restaurant systématiquement la discipline du clergé, il est surtout connu par le décret gélasien, attribué parfois à Damase, qui distingue les écrits canoniques et apocryphes, et par le sacramentaire gélasien.
Parmi les cinquante et un papes dénombrés jusqu'à la fin du 6ème siècle, trois sont berbères et un ibère.C'est au cours de la primatie de Miltiade qu'eut lieu la conversion de l'empereur Constantin, et l'édit de Milan qui mettait aux persécutions.

Rites funéraires - Les rites funéraires berbères

Les anciens Berbères enterraient leurs morts et possédaient des rites funéraires. Leurs tombeaux variaient de la simple fosse surmontée de terre ou du tumulus de pierres au superbe mausolée royal.

La position du corps dans la tombe variait d'une religion à une autre. On a retrouvé ainsi des corps étendus de tout leur long. en position fléchie ou encore les genoux ramenés jusqu'au menton. On a pensé que cette position visait à réduire l'espace occupé par le mort, mais elle correspond probablement à un rite de reconnaissance, le défunt prenant la forme du foetus dans le ventre de sa mère.

Les Berbères avaient un grand respect de leurs morts. Comme de nombreux peuples de l'antiquité, il craignaient qu'un abandon ou mauvais traitement ne favorise leur retour sous forme de fantômes ou de mauvais esprits. En les traitant bien, au contraire, ils s'assuraient leur protection et bénéficiaient de leur connaissance de l'au-delà.

Les pratiques funéraires berbères.

Les rites funéraires sont si nombreux chez les Libyens qu'on a parlé, à leur propos, d'une véritable religion funéraire. En fait- il- s'agit de pratiques archaïques que ni l'influence punique ni la romanisation n'ont pu effacer. Certains rites, comme les sacrifices animaux ou la communication avec les morts, nous sont parvenus, sous des formes plus ou moins altérées.

La sépulture : comme nous l'avons vu ci -dessus, celle-ci prend diverses formes: tumulus de pierres recouvrant une fosse ou au contraire un mausolée élevé à la gloire d'un souverain. Les besoins des morts : on croyait que le mort continuait à vivre dans l'au-delà, aussi subvenait-on à ses besoins en déposant dans la sépulture des aliments, des armes et des poteries. Les sacrifices d'animaux : avant ou après l'enterrement, comme cela se pratique encore dans de nombreuses régions du Maghreb, on procédait à des sacrifices d'animaux. Dans les tombes préhistoriques les ossements humains sont souvent mêlés aux ossements animaux : boeuf, mouton, chèvre, oiseaux, cheval, lapin, chameau, gazelle...

La protection magique : pour soustraire le cadavre à l'anéantissement, on le parait d'objets magiques, bijoux de cuivre ou colliers de coquillages. Quand le cadavre avait subi la décarnisation on peignait le squelette de rouge, couleur de la vie et de la force.

L'incubation. Pour communiquer avec les morts, les anciens Berbères recouraient à l'incubation. Cette pratique divinatoire attestée dans toutes les civilisations méditerranéennes consistait à prier puis à s'endormir sur la tombe du mort qui communiquait alors au moyen du rêve, sa volonté. On s'endormait aussi dans les temples et on recevait, toujours au moyen du rêve des messages des dieux. Rites païens, l'incubation fut interdite par l'islam qui la remplaça par l'istikhara, prière de demande par le rêve. Mais le vieux rite a subsisté et on y recourt encore dans de nombreuses régions du Maghreb. Au Maroc, il est courant de passer la nuit au pied des tombeaux des saints, dans certaines régions de Kabylie, on dort sur la tombe du mort dont on veut connaître les volontés, au Hoggar, les femmes dorment à proximité des vielles tombes pour avoir des nouvelles de leurs maris absents.

3- Culte des ancêtres

Dans la pensée méditerranéenne traditionnelle telle qu'elle est encore exprimée par les paysans d'Algérie, les morts et les vivants sont tellement mêlés dans la vie quotidienne, associés aux même gestes et aux même rites, qu'il est difficile de dire si les morts sont encore liés à leurs clans terrestres ou si les vivants participent encore ou déjà au plan des choses de l'invisible.

Il n'y pas de culte des morts à proprement parler. Le plan humain se propage dans l'invisible par les morts, continuant l'étroite solidarité de la famille méditerranéenne. Le paysan algérien qui traverse un cimetière en salue les habitants comme il saluerait ses égaux assis sur les bancs de pierres de la place du village ou sur les nattes du café maure. Vivants et morts membres d'une même famille s'entraident de tous les moyens dont ils disposent. Le mort reste membre du groupe terrestre, comme l'ouvrier parti pour la France reste solidaire des siens. Il sait qu'il peut compter sur l'exactitude des vivants à accomplir les rites.

Les rites de passage marquent les saisons de la vie de l'homme et, comme les rites agraires, sont empreints d'un caractère funéraire venu de la volonté des vivants d'associer les morts au rythme de la vie terrestre. Le deuil n'est pas une manifestation de tristesse subjective, mais une attitude rituelle prescrite pour entrer en communication avec ceux que les paysans appellent les gens de l'autre Vie ita. Il est impossible d'étudier un seul des aspects de la vie des paysans maghrébins sans se référer à ce monde des morts toujours présent dans leur pensée, à ces croyances nouées autour des stèles de pierre ou de bois auxquelles les religions révèles qui ont recouvert l'Afrique du Nord ont dû, l'une après l'autre, se soumettre.

Les religions révélées se sont insérées sans heurts dans cet ensemble harmonieux de croyance et d'institutions. Le christianisme a adopté les tombeaux et les hauts lieux : mais il n'entre pas dans le cadre de cette étude de parler du culte des saints dans le nord de la méditerranée;le rigide judaisme et l'islam ont accepté les morts comme intermédiaires naturels des hommes et de l'Invisible, leur ajoutant une couronne de pieuses vertus et de miracles, monotones dans leur répétition.

Mais les traditions populaires montrent bien que les religions révélées, ailleurs puissantes, ont du disparaitre du nord de l'Afrique, comme le christianisme, sans laisser la moindre trace dans les coutumes et dans les moeux, alors que les tombeaux ont traversé les siècles et les invasions parce qu'ils sont les môles d'amarrage de la pensée mère de toute une civilisation. Les conceptions méditerranéennes de l'homme et de l'univers les plus subtiles, avec tous leurs symboles et leurs mystères, reposent sur la clé de voute unique que nous trouvons présente dans la pensée des paysans maghrebins.

Pour comprendre l'univers, l'homme doit se connaître, et nous qui cherchons à comprendre l'univers du paysan maghrébin afin d'atteindre l'univers méditerranéen, nous devons connaitre d'abord sa reprentation de la personne humaine, une "personne"que le dernier des paysans conçoit comme faite d'abord de principes bindivisibles placés sous la garde d'un ange.

Le grave Salut des paysans : ¨Assalam alaykoum¨la paix sur vous-n'emploie pas un pluriel de politesse, étranger an langage, courant, mais un pluriel réel qui s'adresse aux entites réunies dans la personne humaine et à l'ange qui les accompagne. Ainsi, par ce salut si souvent répété dans la vie quotidienne, nous pouvons pénétrer au plus intime, de pensée des paysans maghrebins, au plus secret des philosophies méditerranéennes. Dans les conceptions populaires du nord de l'Afrique, le corps humain, à l'image de l'univers, est formé de couples .

Le mot qui designe le corp avecle sens refléchi de "personne"est un masculin pluriel en tamazight : "iman". Il est habité par deux âmes: une âmes: une âmes végétative"nefs, une âme subtile ou souffle"rruh". Al'âme végétative, correspondent les passions et le comportement émotionnel, elle est portée par le sang, son siège est dans le foie. Al'âme subtile ou souffle, correspond la volonté, elle circule dans les os, son siège est le coeur.
 
Source: awalinoo.net
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